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ALEXANDRE VIII, PROPOSITIONS CONDAMNÉES PAR LUI


Je péché, et à ce titre encore ne peut être surnaturelle. Le vrai de tout ceci, c’est qu’il peut y avoir une crainte de l’enfer naturelle et n’excluant pas efficacement la volonté de pécher ; telle, la crainte qu’on appelle servilité)— servilis et qui s’exprime par cette disposition : s’il n’y avait pas d’enfer, je pécherais. Mais cette disposition n’est nullement essentielle à la crainte simpliciter servilis ; l’homme peut voir dans l’enfer ou la peine qu’entraînerait pour lui le péché, un motif bon et raisonnable de s’en abstenir. Sous l’action de la grâce et la lumière de la foi, cet acte peut être surnaturel et salutaire comme le suppose clairement la doctrine du concile de Trente, sess. VI, can. 8, et sess. XIV, c. iv, can. 5. Denzinger, n. 700, 778, 793. Plus tard, dans la constitution Auclorem fidei, n. 25, la doctrine niant en général que la crainte de l’enfer soit en elle-même bonne et utile, comme un don surnaturel et un mouvement inspiré de Dieu, a été qualifiée par Pie VI de « fausse, téméraire, pernicieuse, injurieuse à l’égard des dons divins, déjà condamnée, contraire à la doctrine du concile de Trente et à l’avis commun des Pères ».

16. Ordinem præmittendi satisfactionem absolutioni induxit non politia aut institutio Ecclesiæ sed ipsa Christi lex et prœscriptio, natura rei id ipsum quodammodo dictante.

17. Per illam praxim mox absolvendi oi’do psenitentiæ est inversus.

18.Consuetudo moderna quoad administrationem sacramenti pænitentiæ, etiamsi eam plurimorum hominum sustentet auctoritas et multi temporis diuturnitas confirmet, nihilominus ab Ecclesia non habetur pro usu sed abusu.

L’usage de n’absoudre qu’après la satisfaction n’a pas été introduit par la discipline ou l’institution de l’Église, mais il vient de la loi même et de l’ordonnance de Jésus-Christ, la nature de la chose le demandant ainsi en quelque sorte.

La pratique d’absoudre aussitôt après la confession renverse l’ordre de la pénitence.

L’Église ne tient point pour un usage, mais pour un abus, la coutume moderne en ce qui regarde l’administration du sacrement de la pénitence, encore que cette pratique soit soutenue par l’autorité de plusieurs et confirmée par une longue suite d’années.

Cette doctrine, relative à l’administration du sacrement de la pénitence, représente dans son ensemble les idées jansénistes, habilement insinuées par Antoine Arnauld dans son livre De la fréquente communion, Paris, 1643, 2e édit., in-4°, II* part., c. viii, p. 290 ; c. xi, p. 429, et préface, p. 66-67. Cependant aucune des trois propositions ne s’y trouve à la lettre. La première est proprement de l’auteur anonyme, fort connu de son temps en Belgique, d’un ouvrage publié à Gand en 1672, sous ce titre : Canones pxnitentiales a S. Carolo Borromseo ex antiquis Psenitentialibus collecti, quibus præmittitur compendiosa deductio, etc. Cf. Spécimen doctrinse, p. 173-174. La seconde appartient à Gilles de Gabriel, dans son ouvrage intitulé Spccimina moralis christianse, in-12, Bruxelles, 1675, IIe part., § 42, p. 154155. Cf. Spécimen doctrines, p. 177-178. La dernière proposition, sans être littéralement dans Arnauld, a été formée presque en entier des expressions dont il se sert à l’endroit cité de la préface. On trouve l’historique de cette tentative de réforme janséniste en Belgique dans un ouvrage de François Simonis : Status, origo et scopus reformationis hoc tempore attentatee in Bclgio circa administrationem et usum sacramenti pxnitentiæ, etc., in-12, Mayence, 1675.

En condamnant ces trois propositions, fausses en elles-mêmes, injurieuses pour la sainte Église et scandaleuses dans leurs conséquences, le siège apostolique a montré que, sous prétexte de ramener l’administration du sacrement de la pénitence à sa pureté primitive, les jansénistes s’attaquaient non point à un abus, mais à une pratique légitime, fondée sur la nature même de ce sacrement. Comme tribunal destiné à réconcilier les pécheurs, il suppose essentiellement de la part de

ceux-ci le repentir et la confession des fautes avec la volonté d’accomplir la pénitence qui leur sera imposée, satisfactio in volo ; mais l’accomplissement même de la pénitence, satisfactio in re, n’est pas une partie essentielle du sacrement ; ce n’est qu’une partie intégrante, qui peut suivre le prononcé de la sentence d’absolution. Prendre pour règle absolue dans l’administration de ce sacrement, ce qui se pratiquait dans la pénitence canonique des premiers siècles de l’ère chrétienne, c’était une grave erreur que Pie VII a, plus tard, qualifiée de « téméraire, scandaleuse, de nature à faire mépriser la dignité du sacrement tel qu’on l’administre d’ordinaire dans l’Eglise, injurieuse envers l’Église ellemême ». Constitution Auclorem fidei, n. 34 ; Denzinger, n. 1397.

19. Homo débet agere tota vita pamitentiam pro peccato original ! .

L’homme doit faire pénitence toute sa vie pour le péché originel.

Assertion relevée dans un catéchisme de Gand, qui fut, du reste, assez vite supprimé. Elle se comprendrait dans la doctrine janséniste qui fait consister, en tout ou en partie, le péché originel dans la concupiscence, car celle-ci reste après le baptême ; mais, dans la doctrine catholique, il en va tout autrement. Le baptême ne lave pas seulement de la tache du péché originel ; il enlève encore toute la peine qui lui est due. Concile de Trente, sess. V, can. 5. La concupiscence que Dieu nous laisse comme matière de lutte et de mérite, n’est qu’une pénalité qui ne laisse pas de place à la pénitence proprement dite, mais seulement à l’austérité et à la mortification chrétienne. De plus, comme acte personnel, le péché originel est le fait de nos premiers parents ; eux seuls ont pu en avoir la contrition. S. Thomas, Suni. tkeol., IIP, q. lxviii, a. 2, et Supplem., q. ii a. 2.

20. Confessiones apud religiosos factæ pleræque vel sacrilegoe sunt, vel invalidée.

21. Parochianus potest suspicari de mendicantibus, qui eleemosynis communibus vivunt, de imponenda nimis levi et incongrua psenitentia seu satisfactione ob quæstum seu lucrum subsidii temporalis.

Les confessions faites aux religieux sont, pour la plupart, ou sacrilèges, ou invalides.

Un paroissien a droit de soupçonner que les religieux mendiants, qui vivent d’aumônes, imposent des pénitences trop légères et peu proportionnées aux fautes, en vue de quelque secours ou intérêt temporel.

Dans son Mémoire, le Père Duffy visait, d’une façon générale, pour la première de ces deux propositions, « ceux qui, ça et là, traitent de sacrilèges les confessions faites d’après une autre méthode que la leur. » Il citait, pour la seconde, un livre intitulé : Thcopliilusparocliialis, part. III, a. 26, dont l’auteur est un capucin gallo-belge, Louis dePippre, en religion Bonaventure Basseus. Il n’est pas nécessaire de montrer longuement ce qu’il y a, dans les deux propositio’ns, de téméraire et d’injurieux soit à l’égard des religieux eux-mêmes, soit à l’égard de l’Église romaine qui se sert largement de leur ministère. Steyært, prêtre séculier, ajoute finement, au sujet de la seconde proposition, qu’en soi le danger d’égoïsme n’est pas plus grand chez les religieux que chez les séculiers : Nec paupertas avidior esse solet ijuam abundantia. Au fond, les confesseurs plus ou moins jansénistes en voulaient aux religieux incriminés de ne pas partager leur rigorisme décourageant.

22. Sacrilegi sunt judicandi, Il faut regarder comme des

qui jus ad communionem per— sacrilèges ceux qui prétendent

cipiendam prætendunt, antequam condignam de delictis suis pænitentiam egerint.

23. Similiter arcendi sunt a sacra communione, quibus nondum inest amor Dei purissiraub etomnis mixtionis expers.

avoir droit à la communion, avant que d’avoir fait une pénitence proportionnée à leurs péchés.

Il faut aussi éloigner de la sainte table ceux qui n’ont pas encore un amour de Dieu très pur et sans aucun mélange.