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ALEXANDRE VIII, PROPOSITIONS CONDAMNÉES PAR LUI

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plus d’un endroit des vertus et des bonnes œuvres de certains infidèles, par exemple, De civit. Dei, 1. V, c. xv, P. L., t. xli, col. 160, et Lib. de Spirit. et lilt., c. xxvii, P. L., t. xliv, col. 229.

9. Rêvera peccat, qui odio Celui-là pèche véritablement habet peccatum mère ob ejus qui ne hait le péché qu*à cause turpitudinem et disconvenien— de sa laideur et de la disprotiam cum natura, sine ullo ad portion qu’il a avec la nature, Deum offensum respectu. sans avoir égard à l’offense de

Dieu.

Cette assertion se trouve en toutes lettres dans Haverrnans, Tyrocinium theologise moralis ad menton SS. Pat l’uni, preesertim S. Augustini, tr. II, c. iv, § 2, 2e édit, in-12, Anvers, 1675, p. 97. Mais la doctrine était commune aux professeurs baianistes et jansénistes des Pays-Bas pour lesquels c’était pécher que de ne pas agir par le motif de la charité ; c’est ainsi que dans une thèse soutenue à Louvain le 23 mai 1653, Fromond taxait de péché ceux qui font le bien moral en s’en tenant au motif de l’honnêteté naturelle. Spécimen docli’inæ, p. 123-126. Le principe sur lequel ces théologiens s’appuyaient étant faux, la conclusion ou l’application l’est aussi. Haïr le péché pour sa laideur et la disproportion qu’il a avec la nature, c’est le haïr pour un motif que le concile de Trente fait rentrer dans l’attrition, ex turpitudinis peccati consideratione, et qu’il regarde comme bon et, la grâce aidant, salutaire. Sess. XIV, c. IV, Denzinger, n. 778. Au reste, cet acte a, par le fait même, un certain rapport à Dieu, rapport au moins virtuel ; seulement les docteurs baianistes et jansénistes voulaient le rapport spécial que donne le motif de la charité, ce qui rentrait dans leur erreur générale.

10. Intentio, qua quis dete— L’intention par laquelle on ne statur malum et prosequitur déteste le mal et ne recherche bonum mère, ut cælestem ob— le bien, que pour gagner le tineat gloriam, non est recta ciel, n’est ni droite, ni agréable nec Deo placens. à Dieu.

Cette doctrine est encore d’IIavermans, au même endroit* p. 101-102 ; elle comptait aussi des défenseurs à Louvain. Spécimen doctrinse, p. 116-117. Pour en comprendre mieux le sens, il est bon de connaître cette autre proposition d’IIavermans, p. 103-104, qu’on avait aussi citée dans le Mémoire présenté à Rome : « Nous n’agissons droitement en vue de la récompense éternelle, que quand nous agissons pour la récompense à cette fin que, l’ayant obtenue, nous servions Dieu mieux et plus exactement, quando operamur propter mercedem in eum finem, ut itla obtenta Deo melius et exaclius serviamus. » On voit la liaison étroite qui existait dans la pensée d’IIavermans entre la proposition présente et la 7e ; c’est toujours le motif de la charité, ou du moins une relation due à l’inlluence de ce motif qu’il requiert dans l’intention de celui qui agit. Doctrine erronée dans ses conséquences comme dans son principe. Détester le mal et embrasser le bien pour gagner le ciel, c’est agir par le motif de l’espérance chrétienne, vertu théologale distincte et même séparable de la charité ; or l’acte d’espérance est par lui-même saint et agréable à Dieu. Autrement, les saintes Écritures et les saints Pères ne nous exhorteraient pas si fréquemment à faire le bien en nous proposant le motif de la récompense céleste.

11. Omne, quod non est ex Tout ce qui ne part point fide christiana supernaturali, d’une foi chrétienne, surnaqua ; per dilectionem operatur, lurelle et qui opère par la chapeccatum est. rite, est péché.

Thèse soutenue à Louvain sous Fromond, le 4 décembre 1652. Spécimen doclrinx, p. 128. La raison se trouvait exprimée dans ces mots, se rapportant à la charité : per quam omnia opéra nostra referri debent in Deum. C’est toujours la même doctrine : pour qu’il ne soit pas péché, il faut que l’acte se rapporte à Dieu par le motif de la charité. Il suffira donc de la réfutation

donnée précédemment. Remarquons toutefois que pour ceux qui entendaient parler de la charité parfaite, la conséquence était que tous les actes des pécheurs étaient péchés ; erreur condamnée dans Baius, propositions 35 et 40. Denzinger, n. 915, 920.

12. Quando in magnis pecca— Quand il n’y a plus dans les toribus déficit omnis amor, de— grands pécheurs d’amour de ficit etiam fuies : et etiamsi Dieu, la foi fait aussi délaut ; videantur credere, non est fides et quoiqu’ils semblent croire, divina, sed humana. ce n’est que par une foi humaine, et non par une foi divine.

L’auteur de cette proposition est François van Vianen ; il la soutint à Louvain, le 25 juin 1676. Le sens s’explique par cette autre thèse qu’il avait donnée le 14 janvier de la même année : « Il faut qu’il y ait avant la foi un pieux mouvement. Ce pieux mouvement est une bonne volonté, et pour saint Augustin toute bonne volonté est charité, omnis autem bona voluntas Augustino est charitas. » Cette doctrine, entendue d’un amour au moins imparfait de Dieu pour lui-même, se retrouve chez d’autres théologiens de l’époque, comme Jacques Pontanus, Gérard van Werm, Havermans, Gilles de Gabriel. Spécimen doctrinse, p. 112-113. Elle n’est alors qu’un corollaire de la proposition 7e et tombe avec celleci. Ce pieux mouvement de la volonté, qui précède nécessairement l’acte de foi, peut être autre chose que l’amour même imparfait de Dieu pour lui-même ; ce peut être l’amour de tout bien capable de mouvoir la volonté : secundum aliquem affectum boni, comme dit saint Thomas, Sum. theol., II a II" 1, q. v, a. 2, ad 2um. Dès lors, il est faux de conclure que tout amour de Dieu manquant, la foi manquerait aussi. S’il s’agissait non de l’acte, mais de la vertu théologale de foi, la fausseté de l’assertion ne serait pas moins évidente, car cette vertu ne se perd que par le péché d’infidélité. Concile de Trente, sess. VI, c. xv, Denzinger, n. 691. Elle peut donc rester dans les grands pécheurs comme dans les autres, et reste de fait en eux tant qu’ils ne commettent pas le péché d’infidélité.

13. Quisquis etiam œlernae Celui qui sert Dieu, même mercedis intuitu Deo faniula— en vue de la récompense étertur, charitate si caruerit, vitio nelle, mais en manquant de non caret, quoties intuitu licet charité, n’est pas sans péché, beatitudinis operatur. toutes les fois qu’il agit en vue

même de la béatitude.

Cette thèse, comme la précédente, est de François van Vianen, qui la soutint à Louvain, le 12 juin 1676. Spécimen doctrinse, p. 117. Elle s’explique et se réfute par ce qui a été dit à propos de la 10e proposition.

14. Timor gehennæ non est supernaturalis.

15. Attritio, quæ gehennoe et poenarum metu concipitur, sine dilectione benevolentia ? Dei propter se, non est bonus motus ac supernaturalis.

La crainte de l’enfer n’est point surnaturelle.

L’attrition qu’on conçoit par la crainte de l’enfer et des peines, sans amour de Dieu pour lui-même, n’est pas un bon mouvement, ni un mouvement surnaturel.

De ces deux proposilions, la première est de Christian Lupus, Dissertât, dogmat. de Christ, contrit, et attrit., c. xv, Opéra omnia, Venise, 1724 sq., t. xi, p. 236 ; la seconde se trouve en substance dans des thèses soutenues à Louvain, en 1653 et en 1670, par Gérard van Werm et François van Vianen. Spécimen doctrinse, p. 110-142. Ces docteurs et autres partisans de la même opinion s’appuyaient sur un double fondement. L’un, plus général, était tiré de la doclrine contenue dans les propositions 7, 10 et 11 ; l’attrition conçue par la crainte de l’enfer et des peines ne procédant pas de l’amour de Dieu, ne peut être un bon mouvement, ni un mouvement surnaturel. L’autre raison se tirait de ce qu’une telle attrition ne renferme pas la volonté efficace d’éviter