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ALEXANDRE VI —ALEXANDRE VII, SON PONTIFICAT


dogme et de culte. Il travailla à la propagation de la foi, spécialement dans le nouveau monde, découvert au début de son pontificat.

Cet événement l’amena à statuer sur les prétentions de l’Espagne et du Portugal, relativement aux territoires découverts et à découvrir. D’après la coutume du moyen âge, l’Espagne lui demanda de trancher le dill’érend ; dans trois documents, du 3 et du 4 mai 1 193, il délimita la sphère d’influence des deux rivaux. Dans la suite, une fausse interprétation de cet acte le lui a fait amèrement reprocher. Alexandre, a-t-on dit, donna ce qui ne lui appartenait pas. Mais il ne prétendait point statuer sur la liberté des peuples indigènes : il ne visait qu’à délimiter les droits de l’Espagne et du Portugal afin d’éviter des luttes sanglantes entre ces deux puissances.

Enfin, Alexandre fit exécuter dans Rome de nombreux travaux d’embellissement et d’utilité publique ; il transforma la cité Léonine, fit restaurer le fort Saint-Ange et décorer, dans le Vatican, les appartements Borgia. Ils ont été restaurés sous Léon XIII et convertis en un musée du moyen âge et de la Renaissance, ouvert au public le 8 mars 1897.

En 1881, H. de l’Épinois terminait par les lignes suivantes un article remarquable sur Alexandre VI : « Catholique et disciple du Dieu qui a horreur du mensonge, je cherche la vérité, rien que la vérité, toute la vérité, et bien que parfois nos faibles yeux ne discernent pas immédiatement l’avantage qui en résulte, et même croient apercevoir dans son expression un dommage et un péril actuel, nous devons en histoire la proclamer sans crainte, car c’est la providence de Dieu qui, en fin de compte, sera toujours justifiée. » Revue des questions historiques, t. xxix, p. 427. C’est dans le même esprit que nous avons écrit cette notice, nous rappelant cette parole de saint Léon le Grand : « La dignité de Pierre ne déchoit pas, même dans un héritier indigne… » Seim., iii De nat., P. L., t. liv, col. 147, et ces lignes, que Léon XIII adressait naguère aux évêques et au clergé de France : « L’historien de l’Église sera d’autant plus fort pour faire ressortir son origine divine, supérieure à tout concept d’ordre purement terrestre et naturel, qu’il aura été plus loyal à ne rien dissimuler des épreuves que les fautes de ses enfants, et parfois même de ses ministres, ont fait subir à cette Epouse du Christ dans le cours des siècles. » Encyclique du 8 septembre 1890.

On a attribué à Rodrigue Borgia un ouvrage théologique : Clypcus defensioms fidei sanctse Romanse ecclesise, Strasbourg, 1497. Ilurter, Nomenclàtor literarius, t. iv, Inspruck, 1899, col. 910.

Sources : Louis Pastor, Histoire des papes, depuis la fin du moyen âye, traduite de l’allemand, par Furcy Raynaud, Paris, Pion, 1888-1898, 6 vol. in-8° t. v et vi : on trouve dans cet ouvrage une abondante bibliographie du sujet ; Fr. Ehrlé et Enr. Stevenson, Gli affreschi del Pinturicchio nelV appartamento Doryia del palazzo apostolico Vaticano, Rome, 1897, in-fol.

J. Paquier. 7. ALEXANDRE VII. Après avoir étudié le pontificat d’Alexandre VII, nous consacrerons un article distinct aux propositions qu’il condamna le 24 septembre

1665 et le 18 mars 1066.

I. ALEXANDRE VII, son pontificat. — Fabio Chigi, pape, successeur d’Innocent X, élu le 7 avril 1055, mori le 22 mai 1667.

La famille Chigi était originaire de Sienne. Fabio Chigi, en qualité de nonce à Cologne (1639-1651), avait suivi 1rs négociations de la paix de Westphalie, tout en déclarant ne point s’associer aux délibérations d’hérétiques. Après l’échange des signatures il protesta contre les clauses qu’Innocent X refusa de reconnaître. Créé cardinal à son retour, jouissant d’une réputation de droiture et d’adresse, il devint secrétaire d’Etat. L’hosti lité de Mazarin faillit lui faire donner l’exclusive par la France dans le conclave de trois mois qui suivit la mort d’Innocent X. Ses électeurs l’avaient en partie choisi pour son aversion du népotisme ; mais il était difficile d’échapper à la tradition qui faisait des parents du pape des personnages influents à Rome. De l’avis du jésuite Oliva et du consentement des cardinaux, consultés dans le consistoire du 24 avril 1656, il appela de Sienne son frère Mario et ses neveux dont l’un, Flavio, devint cardinal, dont l’autre épousa une Borghèse, mais ils n’obtinrent pas de prépondérance politique. Comme il avait peu de goût pour les affaires, malgré sa carrière diplomatique, il en abandonna le soin pour la plus grande part aux congrégations, surtout au cardinal Rospigliosi, son futur successeur sous le nom de Clément IX.

Ami des lettres et de la philosophie, il leur consacrait volontiers son temps après midi, il se plaisait dans la société de savants comme le canoniste Corrado, et en matière de théologie, il subissait particulièrement l’influence de l’historien jésuite du concile de Trente, le cardinal Sforza Pallavicini ; poète à ses heures, il écrivit des vers qui parurent en recueil à Paris, sous le titre de Philometi labores juvéniles (1656) ; il aima les constructions magnifiques au détriment des finances de son État ; il distribua des charges lucratives à ses proches, accueillit à Rome la reine Christine, de Suède, et lui assigna des revenus pour lui permettre de tenir son rang après son abdication et sa conversion. Alexandre VII fut un protecteur zélé des jésuites et il obtint pour eux l’entrée sur le territoire de la république de Venise d’où ils étaient chassés depuis l’année 1606. Il attribua à la république, en vue de la guerre contre les Turcs, les biens que possédaient sur son territoire les chanoines réguliers du Saint-Esprit et l’ordre des Porte-Croix, qui avaient dégénéré et qui furent supprimés.

Comme secrétaire d’État, Chigi avait beaucoup contribué à faire condamner par Innocent X les cinq propositions de Jansénius (bulle Cum occasione du 31 mai 1653). Devenu le pape Alexandre VII, il poursuivit les jansénistes sans relâche ; il publia le 16 octobre 1656 la constitution Ad sanctam B. Pétri sedem et afin d’enlever tout subterfuge aux jansénistes, il y déclara condamner les propositions extraites de ÏAugustinus dans le sens même que Cornélius Jansénius leur avait donné. Sa bulle fut acceptée le 17 mars 1657 par l’assemblée du clergé de France qui la publia en y joignant un formulaire de soumission à signer. Le parlement dut l’enregistrer sous la pression du roi. La signature ayant provoqué toute sorte de difficultés, Alexandre VII publia à son tour, avec la constitution Regiminis apostolici du 15 février 1665 un formulaire qui a gardé son nom. Les quatre évêques d’Alet, d’Angers, de Béarnais et de Damiers refusèrent de signer sans réserve, et le dernier acte d’Alexandre VII fut d’interdire leurs mandements et de nommer une commission de neuf évêques, pour juger les récalcitrants en vertu de l’autorité apostolique.

L’entente du pape et du roi contre les jansénistes n’empêchait pas la mésintelligence sur d’autres points. Mazarin avait à se venger du cardinal de Retz que sa participation aux troubles de la Fronde avait également. rendu insupportable à Louis XIV ; mais le pape, malgré l’indignité du personnage, ne voulait pas abandonner un membre du Sacré-Collège que l’on eût traduit devant un tribunal civil sous l’accusation d’un crime de liante trahison. Plus tard, ce l’ut le duc de Créqui, ambassadeur du roi de France.i Home, qui brouilla SOD in. litre avec le pape. Les insolences de sa suite ayant irrité la garde corse au service du pape, il s’ensuivit une échauffourée dans laquelle furent tués quelques gens du duc (1662). L’ambassadeur lui-même fut insulté et menace’. Il voulut voir dans celle affaire une injure préméditée, refusa les satisfactions offertes par la curie et quitta Rome. Le roi, déjà mécontent de ce que le pape, malgré