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711 ALEXANDRE II — ALEXANDRE III CANONISTE ET THEOLOGIEN 712

Le rôle politique d’Alexandre II au dehors contraste avec sa faiblesse réelle à Rome. A l’étranger, il réclame « le tribut à Svvein, roi de Danemark, ita tamen ut non v sicut oblatio super altare ponatur, sed tam sibi quam successonbus suis priesentialiter offeratur. Jalfé, n. 4195. % A Philippe I er, roi de France, il écrit de considérer les décrets des papes à l’égal des canons. Jane, n. 4525. A Guillaume de Normandie il envoie un étendard bénit pour sa campagne de conquête en Angleterre. Il encourage de la même manière le comte Roger dans sa lutte contre les Sarrasins de Sicile. En Espagne, le comte d’Urgel et le comte Rocejo, pour se garantir contre des voisins, firent hommage de leurs terres à Alexandre II à qui ils payèrent tribut. Mais dans sa propre ville épiscopale et dans son petit État, le pape soutient des combats continuels contre les familles nobles du voisinage, et il est contraint de s’appuyer sur le marquis de Toscane, Godefroi, et sur sa femme Réatrice.

En 1073, Alexandre excommunia les conseillers simoniaques du jeune roi Henri IV, auxquels il reprochait la vente des dignités ecclésiastiques et l’installation sur le siège de Milan d’un archevêque imposé par le roi. Le pape mourut peu après laissant à Grégoire VII le soin de poursuivre la lutte.

Jaffé, Regesta pont. Rom., 2’édit., t. I, Leipzig, 1888, p. 566 ; Watterich, Pontificum Romanorum vitx, t. i, Leipzig, 1862, p. 235 ; Liber pontificalis, édit. Duchesne, t. II, Paris, 1892, p. 281 ; Mansi, Concil. collectio, t. xix, col. 939. — Outre les histoires générales de l’Église, voir : Will, Benzos Panegyricus auf Heinrich IV mit besonderer Rùcksicht auf den Kirchenstreit Alexander’s II und Honorius II, Marbourg, 1863 ; Martens, Die Besetzung des pàpstlichen Stuhles unter den Kaisern Heinrich III und Heinrich IV, Fribourg-en-Brisgau, 1886, p. 118 ; Jungmann, Dissertationes selectx in historium ecclesiasticam, t. IV, Ratisbonne, 1884 ; Fetzer, Voruntersuchungen zu einer Geschichte Alexanders II, Strasbourg, 1887 ; Hefele, Histoire des conciles, trad. Delarc, t. vi, Paris, 1871, p. 407 ; 2’édit. ail., t. IV, p. 850.

H. Hemmer.

3. ALEXANDRE III. Roland Randinelli.ou des Randinelli, n’est pas seulement un des plus grands papes du moyen âge, digne, par sa fermeté, d’être placé à côté de Grégoire VII et d’Innocent III ; illustre professeur de la science sacrée à Rologne, il représente avec Gratien l’influence de cette université sur les hautes études Ihéologiques et canoniques. Deux articles étudieront : 1° Alexandre III canoniste et théologien avant son pontificat ; 2° Alexandre III pape de 1159 à 1181. Un troisième sera consacré aux principaux décrets d’Alexandre III.

I. ALEXANDRE III canoniste et théologien.

I. Sa

vie. II. Le Stroma Rolandi. III. Les Sententiæ.

I. Sa vie.

Roland, né à Sienne, appartenait à la famille des Bandinelli ; on lui a souvent donné le nom de son père, Rainucci. On a peu de détails sur sa vie avant son pontificat et la date même de sa naissance est inconnue. Mais ses contemporains vantent ses rares talents et ses éminentes vertus. Suivant son biographe, le cardinal d’Aragon, P. L., t. ce, col. 11, au don d’une rare éloquence il joignait une profonde connaissance des Écritures et des lettres humaines. La chronique de Robert du Mont, Monumenta Germanise, Scriptores, t. vi, p. 53, dit de lui : Fuit in divina pagina præceptor maximus, et in decretis et canonibus et in Romanis legïbus præcipuus, Nam multas quæsticmes difficillimas et graves in decretis et legibus absolvit et enucleavit. C’esl à Bologne qu’il expliqua les saintes lettres, à une époque où les diverses branches de la théologie n’étaient poinl encore distinctes. Le lecteur d’Écriture sainte était professeur de théologie et à ce titre enseignait à la fois le dogme, la morale et les décrets ou lois ecclésiastiques. Gratien lui-même ainsi que trois de

contemporains et abréviateurs, Ognibene, évoque de

Vérone en 1157, Gandolphe et notre Roland étaient tous professeurs de théologie à Rologne. Cf. Maassen, Paucapalea, p. 453 ; Denifle, Archiv (cité infra), t. I, p. 621.. Les deux sommes qui nous restent de Roland, l’une de droit canon, l’autre de théologie, justifient la renommée de son enseignement et l’éclat des hautes dignités qui lui furent conférées. D’après le Liber pontificalis, édit. Duchesne, t. ii p. 397, il fut d’abord honoré d’un canonicat à Pise. Eugène III le nomma successivement chanoine de Latran, cardinal-diacre du titre des SaintsCôme et Damien (1150), cardinal — prêtre du titre deSaint-Marc (1151) et enfin chancelier du siège apostolique (1153) : il remplissait ces hautes fonctions quand il fut élevé au pontificat (1159).

II. Le Stroma Rolaxdi.

Sous ce titre, imité des Slromata de Clément d’Alexandrie, plusieurs manuscrits du moyen âge — Grenoble en possède un, mais incomplet — nous ont conservé un abrégé du décret de Gratien. Découvert par Maassen, il a été publié par Thaner en 1874, mais avec un malheureux changement de titre : Summa magistri Rolandi nachmals Papst Alexander III, Inspruck. L’identification de l’auteur du Stroma avec Roland Randinelli, après les études de Maassen et de Thaner, est indiscutée. La date de la composition ne parait pas pouvoir être reculée au delà de 1148. Cf. Thaner, op. cit., Introduction, p. 31 ; Schulte, Die Summa der Paucapalea, Introduction, p. 10. S’il en est ainsi, le décret de Gratien serait bien antérieur à 1150, date que lui assigne Laurin, Introductio in corpus juris canonici, Fribourg-en-Rrisgau, 1889, p. 25. En tout cas Roland est un des plus anciens commentateurs du décret, probablement le second, Pocapaglia l’ayant seul précédé. Après lui seulement viennent Ognibene, Rufin, Jean de Fænza, Sicard de Crémone.

Le but de Roland est celui de tous ces abréviateurs, fournir aux étudiants un texte abrégé des leçons sur le décret de Gratien ou, comme dit Sicard, « resserrer la vaste et puissante mer de sa doctrine, en un petit ruisseau où chacun puisse venir se désaltérer. » Cf. Philips, Droit ecclésiastique dans ses sources, trad. Crouzet, 1852, p. 116.

Le résumé de Roland, remarquable par l’ordre et la clarté, n’embrasse point tout le décret, mais seulement la deuxième partie. Aujourd’hui encore, il offre un intérêt historique. Freisen l’a utilisé dans ses recherches sur le droit matrimonial de l’Église. Freisen, Geschichte des canonischen Eherechts bis zum Verfall der Glossenliteratur, Tubingue, 1888 ; 2° édit., Paderhorn, 1893. Le P. Gietl, cf. infra, a complété certaines observations de Freisen en comparant le traité du mariage dans les deux ouvrages de Roland, le Stroma et les Sententiæ. Roland est jusqu’ici le premier auteur connu qui signale les deux empêchements du vinculum ou ligalio, et de l’âge canonique. Gietl, op. cit., p. 274, 280. Sur ce dernier point, il formule déjà comme théologien dans les Sententiæ une décision qu’il devait comme pape introduire dans le Corpus juris canonici, édit. Friedberg, Leipzig, . 1882, t. ii, p. 46. Il en est de même d’une explication de l’empêchement d’impotentia. Cf. Gietl, p. 28.

III. Les Sententijs de Roland.

On a indiqué ailleurs, III.AbÉlard (École théologique d’), col. 49-55, le grand mérite de cette somme de théologie ; sa dépendance intime de l’école d’Âbélard, dépendance qui se trahit dès le début par cette division malheureuse en trois parties (foi, sacrements, charité), son influence sur d’autres auteurs abélardiens et même sur l’école de Saint-Victor. Nous ajouterons seulement quelques renseignements : 1° sur L’authenticité ; 2° la date ; 3° l’importance historique de cet ouvrage.

1° Authenticité, — Le P. Denifle, (>. P., a découvert dans la bibliothèque de Nuremberg un manuscrit avant pour titre : Sentent i ; r llodltnidi Jlononiensis magistri auctoritatibus raliouibus fortes. Son confrère,