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ALEXANDRE I er (SAINT) — ALEXANDRE II

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me’nts’contemporains. Un seul du IIe siècle, celui d’Irénée, Cont. Itxr., iii, 63, P. G., t. iiv col. 851, reproduit par Eusèbe, H. E., 1. V, c. vi, P. G., t. xx, col. 445, désigne Alexandre comme le successeur de saint Évariste et le cinquième évêqtie de Rome, après saint Pierre. Le Liber pontificalis, plus explicite, le dit romain de la région de Caput Tauri, martyr enseveli à la via Nomentana ; lui prête un règne de dix ans, sept mois, deux jours, sous Trajan, jusqu’au consulat de L. ^Elius Lamia et de .Elianus Velus (116) et lui attribue deux décisions liturgiques, l’une relative à l’insertion du Qui pridie au canon de la messe, l’autre à l’eau bénite.

Il n’est pas à croire qu’Alexandre ait été l’auteur de l’insertion du Qui pridie ; car ce récit commémoratif de l’institution eucharistique contient les paroles mêmes de Notre-Seigneur à la dernière cène et constitue le noyau central de la liturgie de la messe ; il a pu être l’objet de quelque prescription spéciale.

Quant au mélange du sel et de l’eau, à leur bénédiction et à leur emploi déterminé pour l’aspersion des maisons, rien n’empêche de les attribuer à Alexandre I er. En Orient, les Constitutions apostoliques, viii, 29, P. G., t. I, col. 1125, signalent la bénédiction de l’eau. En Occident, le Sacramentaire gélasien, iii, 75, P. L., t. lxxiv, col. 1225-1226, donne deux formules benedictionis aquæ. spargendæ in domo pour les habitacula hominum, mais l’addition du vin et de l’huile marque un stade postérieur, de sorte que le Liber pontificalis est le plus ancien témoignage de la bénédiction de l’eau, en dehors de l’administration du baptême.

On trouve au tome I er des Collections des conciles de Mansiet de Labbe, ainsi que dans P. G., t. v, col. 1057 sq., un décret et trois lettres sous le nom de ce pape, notoirement apocryphes. Ces décrétales, au triple point de vue canonique, liturgique et dogmatique, trahissent une date postérieure. Il y est question de sacerdotibus non vexandis…, de causis et gravaminibus sacerdotum…, ut vitentur detractiones et injustæ pulsaliones, ce qui suppose un nombre assez grand de prêtres et ce qui n’était pas encore le cas au commencement du IIe siècle. Il y est également question de la trinité et de l’unité en Dieu, avec preuves scripturaires à l’appui, alors que le mot de trinité n’était pas encore introduit dans la langue ecclésiastique et que les controverses trinitaires n’avaient pas encore paru. Il y est enfin question de la bénédiction de l’eau mêlée de sel et de l’aspersion de l’eau bénite, non plus sur les maisons mais sur les fidèles, ut ea cuncti aspersi sanctificentur et purificcntur, pour les mettre à l’abri des tentations du démon ; ce qui marque une addition au renseignement du Liber pontificalis et une extension postérieure de l’emploi de l’eau bénite. Jaffé-Wattenbach cite en outre trois autres décrets attribués aussi au pape saint Alexandre et qui sont également apocryphes.

Duchesne, Liber pontificalis, Paris, 1884, p. xci et 127 ; JafféWattenbach, Regesta pontifteum Romanorum, Leipzig, 188ô, n. 24-30, t. i, p. 5.

G. Bareille.

2. ALEXANDRE II, pape, successeur de Nicolas II, élu le 1 er octobre 1061, mort le 21 avril 1073.

Né à Baggio, près Milan, Anselme, le futur Alexandre II, appartenait à la noblesse milanaise. Il devint prêtre à Milan, y travailla activement à la réforme religieuse et fut l’un des soutiens sinon même des fondateurs de la Palaria. Ce nom ironique, qui signifie peuple de mendiants, servait à désigner l’association populaire qui combattait les mauvaises mœurs du clergé, la simonie et l’incontinence. Pour éloigner ce prédicateur et censeur infatigable, l’archevêque Gui lui confia une mission près de l’empereur Henri III et le fit nommer à l’évèché de Lucques (1057). Il revint d’ailleurs à Milan avec la qualité de légat pontifical, d’abord en 1057 avec Hildebrand, une seconde fois en 1059 avec Pierre

Damien. Ces deux personnages furent, avant et après son élévation sur le siège de Rome, ses conseillers intimes et ses auxiliaires. Anselme succéda au pape Nicolas II grâce à l’iniluence d’Hildebrand qui le lit introniser aussitôt élu, sans tenir compte du semblant de privilège ou droit de confirmation réservé à l’empereur par le décret de Nicolas II qui réglait le mode de l’élection pontificale. La cour allemande convoqua une assemblée de notables à Bàle, et Henri IV, agissant comme patrice des Romains, désigna comme pape l’évêque de Parme Cadaloùs, qui prit le nom d’Honorius II (28 oct. 1061). Le schisme dura jusqu’à la mort de l’antipape en 1072 ; mais dès l’année 1062 il avait perdu de sa gravité, l’archevêque Annon de Cologne s’étant emparé de la personne du jeune roi Henri IV et ayant ouvert des pourparlers favorables à Alexandre IL Un synode allemand et italien tenu à Mantoue en 1064 reconnut le pape légitime et excommunia Cadaloiis dont l’obédience se restreignit finalement à son diocèse de Parme.

Presque toute l’histoire du pontificat d’Alexandre tient dans l’énumération des mesures réformatrices décrétées par ce pontife : envoi de légats en Lombardie, en Espagne, en France et en Angleterre ; célébration de quatre synodes à Rome, et de synodes provinciaux par ses légats ; citation à Rome de prélats puissants comme Sigefroi de Mayenee, Hermann de Bamberg, même Annon de Cologne qui avait tant travaillé à l’extinction du schisme. Le pape renouvelle les décrets de ses prédécesseurs contre la simonie et le mariage des prêtres ; sa correspondance tout entière rend témoignage de son activité réformatrice : afin de forcer les métropolitains à prendre contact avec la cour romaine, il décide de ne plus conférer le pallium à un prélat absent, Jalfé, Regesta, n. 4507, 4529 ; il réclame la liberté des élections épiscopales, Jalfé, n. 4535 ; il ordonne que l’on n’entende pas la messe d’un prêtre qui a une concubine, Jaffé, n. 4501 ; il défend les mariages entre parents et condamne une manière trop ingénieuse de tourner la loi en comptant deux degrés de parenté par génération à partir de la souche commune, Jalfé, n. 4500, 4506 ; il déclare que ni prières, ni jeûnes, ni aumônes, ne peuvent faire qu’un mariage entre parents ne soit nul, Jaffé, n. 4523 ; enfin il défend sévèrement aux clercs de recevoir aucune église des mains d’un laïque, même sans simonie : Per laicos nullo modo quilïbet clericus vel presbyter obtineat ecclesiam, nec gratis, nec pretio. Gratien, Dccretum, caus. XVI, q. iiv can. 20. Tandis que les papes ses prédécesseurs n’avaient souvent fait que notifier leurs décrets et condamnations aux coupables, Alexandre II est devenu assez fort pour procéder, au moins fréquemment, à leur exécution : déposition de (odefroi, archevêque simoniaque de Milan ; destitution de clercs concubinaires à Crémone et à Plaisance ; expulsion de Hugues, é-vêque intrus de Chartres, etc. 11 a pour appuis dans la Lombardie l’association populaire de la Palaria, dans les différents pays des prélats zélés comme Lanfranc, archevêque de Cantorbéry en Angleterre, des légats adroits et fermes comme Pierre Damien. Ce dernier en 1009 obtint de Henri IV qu’il ne rompit pas son mariage avec Berthe de Savoie.

Certaines mesures d’Alexandre avaient moins d’importance. C’est lui qui défendit aux prêtres de célébrer la messe plms d’une fois par jour sauf le cas de nécessité, ou le jour de Noël ; il accorde deux fois le privilège encore assez rare de l’indulgence plénière (eu faveur de ceux qui se confessent au Mont-Cassin, 1065, et dans une église de Lucques, 1070) ; il approuve l’ordre des Camaldules ; il écrit à Harold, roi des Normands, de veiller à ce que les éVêques de son royaume soient consacrés par l’archevêque de Hambourg, vicaire du SaintSiège peur le nord, et non en France ou en Angleterre. Jaffé, n. 4471-4773.