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DE ALEATORIBUS — ALEMBERT (LE ROND D’)

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encore allusion au sacrifice de Jésus-Christ, v, au sacrifice du Seigneur, viii.

Hilgenfeld a soutenu que l’auteur du De aleatoribus était novatien, à cause du passage suivant, x : Nam quod delicti inDeum nulla fit excusalio nec indulgentia ulla et nemina venia datur ; in Evangelio Dominas dicit, si qui, inquit, dixerit blasphemiam in Filium hominis, dimittetur ei : qui autem peccaverit in Spiritum Sanctum, non dimittetur illi nec hic nec in futuro sseculo. Puis sont cités aussi d’autres textes analogues de la sainte Écriture. I Reg., ii 25 ; I Cor., ni, 1647 ; Matth., iiv 23 ; I Joa., iii, 8. Tous ces textes rapportés ont été en effet employés par les montanistes et les novatiens pour établir l’impossibilité absolue du p : irdon après le péché. Mais on peut et on doit, avec les Pores de l’Eglise, y voir seulement une grande difficulté pour le pécheur de revenir à Dieu. Et c’est bien dans ce sens que l’a entendu l’orateur, puisque tout son discours tend à exhorter le pécheur à la conversion ; il affirme positivement la possibilité de la rémission des péchés : ut peccata tua donentur tibi eleemosynis, XII, et les péchés, dont il est question ici, sont ceux du joueur de dés, lesquels ont été stigmatisés dans les pages précédentes et assimilées aux plus grands crimes. Nous trouvons même dans le De aleatoribus la preuve la plus ancienne que le pardon des péchés était précédé d’un examen rationnel : Accepta sinud potestate solvendi ac ligandi et cum ratione peccata dimittendi.

IV. Texte.

Le texte du De aleatoribus peut être constitué à l’aide de quatre manuscrits : le Codex Monacensis, IXe siècle, le Trecensis, viiie —ixe siècle ; le Reginensis, Xe siècle et le Parisiensis, ixe siècle. D’après Miodonski et Wôlflin, les trois premiers manuscrits sont les meilleurs et c’est d’après eux qu’ils ont établi leur édition du De aleatoribus. Pour la discussion de la valeur des manuscrits, voir Miodonski et Wôlflin, op. cit., p. 10. Hartel a préféré le Parisiensis et s’en est surtout servi dans son édition des œuvres de saint Cyprien. Le De aleatoribus se trouve aussi dans P. L., t. iv, col. 827836. D avait été imprimé pour la première fois à Paris, en 1564, parmi les œuvres de saint Cyprien, éditées par Morellius. Pamelius, 1568, Baluze et Maran, 1726, le placent à côté des écrits inauthentiques (spuria) de saint Cyprien.

Ad. Harnack, Der pseudo-cyprianisclie Traktat De aleatoribus, Die atteste lateinische cliristliche Schrift, Ein Werk des rômischen Bisclwfs Victor I (ssec, /W.dans Texte und Untersuchungen zui Gescliichte der altchrist. Literatur, t. v, fasc. 1°, Leipzig, 1888 ; Funk, Die Schrift De aleatoribus, dans Historisches.Tahrbuch, t. xi.p.1-22 ; Joh.Haussleiter, dans Theologisches LiteraturbUitt, 1889, n. 5. 6 ; P. v. Hœnsbrœch, Die Schrift De aleatoribus als Zeuanis fur den Primat der rômischen Biscliôfe, dans Zeitschrtft jùr kalh. Théologie, t. xiv, 1890, p. 1-26 ; A. Miodonski et E. Wôlflin, Anonymus adversus aleatores, Leipzig, 1889 ; A. Hilgenfeld, Libellum De aleatoribus, Fribourg, 1890 ; Étude critique sur l’opuscule De aleatoribus par les membres du séminaire d’histoire ecclésiastique établi à l’Université catholique de Louvain, Louvain, 1891.

E. Jacquier. ALEGAMBE Philippe, jésuite belge, né à Bruxelles le 22 janvier 1602, fut aumônier du duc d’Ossuna en Espagne et en Sicile, avant d’entrer au noviciat, le 7 septembre 1613, à Palerme. Il enseigna la philosophie et la théologie à Gratz, accompagna dans ses voyages le jeune prince d’Eggenberg, et passa les dernières années de sa vie à Rome, où il mourut, le 6 septembre 1652. Avec quelques biographies de jésuites, il a laissé un ouvrage qui peut trouver place dans ce dictionnaire, comme utile pour l’histoire de la théologie : Bibliotheca scriptorum societatis Jesu…, Anvers, 1643, in-fol. Le P. Alegambe reprit l’ouvrage du même genre publié en 1608 par le P. Pierre Ribadeneira. En 1676, le P. Southuell en donna une édition très augmentée, et, en ce siècle,

CICT. DE TIIÉOL. CATIIOL.

le travail fut repris et considérablement augmenté par les PP. De Backer et C. Sommervogel.

De Backer et Sommervogel, Bibl. de la C’de Jésus, t. I, col. 151-153 ; t. viii, col. 10U2.

C. Sommervogel.

ALEMBERT (Le Rond d’) Jean, l’un des mathématiciens les plus célèbres et l’un des philosophes les plus influents du xviiie siècle, né à Paris en 1717, mort dans la même ville en 1783. — I. Vie et rôle. II. Ouvrages et idées.

I. Vie et rôle.

Élève de 1729 à 1736 du collège Mazarin, dont les professeurs, presque tous prêtres jansénistes, le destinaient à devenir un brillant ennemi des jésuites, il trompa d’abord l’attente de ses maîtres et s’adonna aux mathématiques. Elles lui valurent une considération universelle : dès 1742, il entrait à l’académie des sciences et en 17 16 il était nommé membre de l’académie de Berlin. (Sur d’Alembert, mathématicien, voir J. Bertrand, D’Alembert, Paris, 1889.) Mais bientôt il figurait au premier rang parmi les philosophes, c’est-à-dire parmi les ennemis non des seuls jésuites mais de la doctrine et de l’action de l’Église. A ce point de vue, le rôle de d’Alembert est considérable. Il partage avec Diderot, de 1751 à 1761, la tâche immense de l’Encyclopédie. Non seulement il est chargé de la rédaction et de la revision des articles mathématiques et de quelques autres, mais il rédige les manifestes : le Discours préliminaire (1751), qui contribua si puissamment à la fortune du livre, et l’Avertissement du tome iii, réponse aux premières attaques, sont de lui. Son nom est une réclame et aussi une protection. La chose fut vraie surtout à partir de 1751, quand d’Alembert fut entré à l’Académie française, le titre d’académicien introduisant alors dans la classe des privilégiés. D’Alembert était devenu pour les encyclopédistes un chef égal à Diderot et à Voltaire quand, en 1761, il se retira de l’Encyclopédie, fatigué des luttes à soutenir, en désaccord avec Diderot qui voulait continuer, mais en adoucissant le ton. « Il vaut mieux, disait d’Alembert, que l’Encyclopédie n’existe pas que d’être un répertoire de capucinades. » Il n’en resta pas moins un des pontifes du parti et sa guerre contre « la superstition » ne fut pas moins active. Secrétaire perpétuel de l’Académie française, dans ses Éloges il loue la raison, et dans les élections il assure le succès du candidat philosophe. Enfin, appelé par plusieurs souverains, mais refusant de quitter Paris pour des motifs d’ordre inférieur, il tourne tout à la gloire de la philosophie : « aux persécutions » du gouvernement royal en France, il oppose les faveurs dont les plus grands souverains comblaient les philosophes.

IL Ouvrages et idées. — Tel fut le rôle : il dépasse de beaucoup les ouvrages et les idées. On ne peut attribuer en propre à d’Alembert aucune des grandes idées du xviiie siècle : il partage les idées courantes ; il est vrai qu’il les partage avec fanatisme. Sur l’âme, sur Dieu, il est d’un scepticisme complet. Comme Voltaire, il dit : « Écrasons l’infâme, » mais il est plus violent. On peut s’en convaincre en parcourant sa Correspondance avec Voltaire et Frédéric II, Œuvres littéraires, Paris, 1821, t. v ; toutefois, l’on ne peut bien s’en convaincre que là. D’Alembert a en effet un enseignement exotérique. Dans les ouvrages qu’il destine au public il n’attaque pas en face : il craint. Deux de ces ouvrages importent davantage ici : le Discours préliminaire et l’article Genève, dans l’Encyclopédie, et les Eléments de philosophie.

Le Discours préliminaire répondait au double but de l’ouvrage à la fois encyclopédie et dictionnaire raisonné. Il comprend deux parties. Dans la première, toute métaphysique, il expose comme il le conçoit l’origine dos connaissances humaines et l’ordre logique dans lequel l’homme les a acquises. Il n’y a pas d’idées innées : toutes nos connaissances nous viennent des sens ; mais

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