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AILLY (D’)

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chidiacre de l’église de Cambrai, sans être obligé d’abandonner ses premières fonctions.

Malgré l’insuccès de ses démarches, il ne cessa pas de s’occuper de l’union de l’Église, d’accord avec ses anciens élèves Gerson et Clémangis. Il entretenait une correspondance suivie à ce sujet avec Bernard Alamant et Henri de Langenstein. Cf. Denitle, Cliartul., p. 560, 637.

Quand Pierre de Lune monta sur le trône pontifical d’Avignon sous le nom de Benoît XIII, d’Ailly fut chargé par Charles VI d’aller le féliciter. Le pape, désireux d’attacher définitivement à son parti un homme de cette valeur et de cette inlluence, le nomma évêque du Puy, le 2 avril 1395. Le prélat, chargé à Paris des affaires les plus importantes, n’eut pas le loisir de se rendre dans son lointain diocèse. Le siège de Cambrai vint à vaquer par la mort d’André de Luxembourg ; il y fut appelé par Benoît et il reçut ses bulles en mai 1397.

Malgré les obstacles suscités par le duc de Bourgogne, Philippe le Hardi, Pierre d’Ailly prit aussitôt possession de miii sic-e. Le 2 juin, il prêta serinent à Ivoy entre les mains de Wenceslas, roi des Romains. Le schisme avait divisé son diocèse en deux parties ; la population qui parlait le flamand appartenait en général à l’obédience de Borne et reconnaissait Boniface IX ; la partie française seule était du côté d’Avignon : elle obéissait à Benoit el à d’Ailly nommé par lui. Cette situation fut pour l’évêque de Cambrai la source d’incessantes difficultés et un obstacle permanent aux réformes nécessaires, auxquelles le prélat avait dès l’abord mis la main. En effet, il avait publié, en 1398, son courageux mandement contre les prêtres prévaricateurs. De notoriis focaristis. Il les avait frappés de graves censures que renouvelèrent ses successeurs. Actes synodaux de Robert de Croy (1550), de Jacques de Bryas (1686) et de Charles de Saint-Albin (1735), évêques de Cambrai. Vers cette époque, le prélat fut chargé d’une ambassade auprès des pontifes rivaux : elle n’eut point de succès.

Lassé de toutes ces inutiles démarches, le roi pronom a alors la soustraction d’obédience (28 juillet 1398). Pendant cinq ans, la France fut acéphale au point de vue religieux. D’Ailly, qui avait d’abord approuvé cette mesure radicale, fut ensuite d’avis de restituer cette obédience in essentialibus et necessario annexis dignvtati papatus et de la refuser in accidentalibus et advenliliis, qux sunt magis de facto quam de jure. C’est ain^i qu’il s’exprime dans l’ouvrage resté inédit qu’il écrivit en li<>3 et qui est intitulé : De materia Concilii generalis. Bibl. nat., Ms. latins, 4480, 1511 et3124. Cette distinction finit par être adoptée au concile de Paris de 1103 et ce fut d’Ailly lui-même qui fut chargé d’annoncer solennellement cette solution dans l’église Notre-Dame. Chronic. Karoli sexti, 1. XXIV, 6.

Les négociations entamées alors entre Benoît XIII et le nouveau pontife de Rome Innocent VII n’arrivèrent à aucun résultat, malgré les efforts de l’évêque de Cambrai. Signalons le grand sermon théologique qu’il prononça à Gênes devant le pape d’Avignon, au jour de la fètede la Sainte-Trinité de l’année 1405. R’Ailh demanda à Benoit du haut de la chaire la célébration annuelle de oette solennité dans son obédience, et le pontife publia à cette occasion une bulle qui reproduisit les termes mêmes employés par l’évêque de Cambrai. Mss. bibl. de CambTai, 514et531, Tractatuset scrmowe8, Strasbourg, 1490. Les essais d’arrangement entre Borne et Avignon se continuèrent sous Grégoire XII qui avait succédé à Innocent VII, mais sans plus de succès. Dans le grand synode de Paris en 1406, l’évêque de Cambrai préconisa la voie de cession pour arriver à l’union et la voie du concile général pour réaliser la réforme ecclésiastique. L’assemblée adopta le moyen terme qui avait déjà été soutenu en 1403 par d’Ailly, mais dont l’exécution avait été empêchée par les influences politiques. Elle rendit

à Benoît l’obédience quant au temporel, et la lui refusa sous le rapport spirituel.

Le prélat continua à faire les plus louables efforts pour triompher de l’obstination du pape d’Avignon, Martène et Durand, Thésaurus, t. ii p. 1329, et des résistances pusillanimes de Grégoire. Chronic. Karoli sexti, 1. XXVIII, c. xxiv. Il crut de son devoir d’avertir le pontife de Rome du scandale que causaient ses erreurs de conduite. Mss. Bibl. va tic, n° 4192, f"29 ; cf. Salembier, Petrus de Alliaco, Lille, 1886, p. 71.

Avant la réunion du concile de Pise, il accusa les deux prétendants d’aveugle ambition. Epistola cardinaiibus in civitate Pisana congregatis missa, dans Tschackert, Peter von Aî7/(, appendix, p. 29, Gotha, 1877. Il se rallia au parti des cardinaux dissidents et adressa d’Aix, de Tarascon et de Gênes les plus utiles conseils aux sacrés collèges réunis. Martène et Durand, Veter. scriptorum anipl. collectio, t. iiv p. 892 sq. Lui-même prit part au concile, mais il ne paraît pas qu’il y ait joué un rôle prépondérant. Avant l’élection d’Alexandre V, auquel succéda bientôt Jean XXIII, il abandonna pour toujours l’opiniâtre pontife d’Avignon, Chronic. Joannis Brandon, dans Kervyn de Lettenhove, La Belgique sous la domvhation des ducs de Bourgogne, textes latins, t. i, p. 138, malgré les objurgations de plusieurs partisans de Benoit. Pour expliquer sa conduite, il écrivit un petit traité qui a pour titre : Apologia concilii Pisani, et que le professeur Tschackert a publié pour la première fois. Ibid., p. 31. Presque en même temps, il condamnait à Cambrai une secte d’illuminés mystiques et corrompus qui s’appelaient eux-mêmes les hommes d’intelligence et qui reconnaissaient pour chef un certain Guillaume de Hildernissen. Baluze, Miscellanea, édit. 1679, t. ii p. 277 ; D’Argentré, Collect. judic., X. i, part. ii, p. 201 ; Paquot, Mém. littéraires, t. iivi p. 94.

Toutes ces occupations ne l’empêchaient pas de composer des ouvrages de géographie et d’astronomie lort estimés de son temps.

Le 12 août 1410, il mettait la dernière main à un volume intitulé : Imago mundi ; c’est dans le huitième chapitre de ce traité que Christophe Colomb trouva la confirmation de ses idées sur le moyen d’arriver aux Indes par la mer et par l’ouest. Le grand navigateur en fait l’aveu dans un compte rendu adressé aux rois catholiques après son troisième voyage. De plus, on peut voir à Séville, dans la fameuse bibliothèque Colombine, letexte de d’Ailly enrichi de notes curieuses écrites de la main même du révélateur du Nouveau Monde. Cf. Barrisse, Excerpta Colombiniana, 1887. C’est le 6 juin 1111 que d’Ailly termina son savant opuscule latin sur la Correction du Calendrier, dans Von der Ilardt, Berum Conc. Constant., t. iii, col. 87, Francfort, 1691 ; Salemhier, Petrus de Alliaco, p. 191. Il lut cet opuscule au concile de Constance, en mars 1117, et il prépara ainsi de loin la grande réforme de Grégoire XIII.

Enfin, c’est le 10 mai 1414, qu’il acheva son ouvrage intitulé’ : Concordia astronomiae cum historien veritate. Au soixantième chapitre de ce volume se trouve sa prophétie étonnante de la Révolution française qu’il if à la date précise de 1789, en s’appuyant sur de curieux calculs astrologiques. Voici d’ailleurs son texte, écrit 375 ans avant l’événement : His itaque prsesuppositis, si mundus usque ad illa tenipora duraverit, quod Drus solus novit, multse tune et magme et mirabiles alterationes mundi et mutationes futures sunt, maxime circa leges et sectas. Mss. Bibl. nat 3123, Cambrai, 924, . l)~>4, clc… Imprime à Augsbourg par Ratdolt en 1490 et à Venise en 1191. D’autres opuscules du même genre ont été composés par lui à cette époque : Epilogue mappa mundi, Tractdlus de legibus et sertis contra superstitiosos astronomos, Vigintiloquium de conconlia astron. ueritatis cum theologia, etc., Louvain, Jean de Westphalie, 1180. M les occupations les plus importantes, .