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AGRIPPA DE NETTESHEIM — AGUILAR

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dose d’esprit que renferme un corps pour changer sa substance ; or on peut extraire l’esprit d’un corps où il est plus abondant et le reverser sur un corps où il est moins abondant : c’est le principe de l’alchimie et c’est ainsi par exemple que l’on peut transformer le plomb en or. Par l’application de ce procédé, on arrivera quelque jour à des résultats merveilleux.

Le second grand ouvrage d’Agrippa, le De incertiludinc et vanilate scientiarum, paraît à première vue d’une inspiration toute contraire au précédent ; l’adepte fervent et enthousiaste de la science est devenu sceptique, découragé ; précurseur de Jean-Jacques Rousseau, il soutient que les sciences et les lettres sont tout ce qu’il y a de plus pernicieux pour l’humanité ; lui qui a tant cherché, tant étudié, il conclut que le mieux est de laisser là la science et de s’en rapporter tout simplement à la parole de Dieu.

Toutefois, si l’on y regarde de plus près, on doit reconnaître que la critique amère et désenchantée d’Agrippa porte beaucoup moins sur la science en général et sur les efforts légitimes de l’esprit humain que sur la science telle qu’elle se manifestait et sur les savants tels qu’ils se montraient au commencement du xvie siècle. Il s’en prend à la philosophie, mais ce qu’il attaque c’est une scolastique dégénérée, réduite à de vains et serviles commentaires d’Aristote et de saint Thomas ; et ainsi des autres sciences ; il avoue même que l’alchimie et la magie, dont il avait fait un étonnant éloge, manquent de bases sérieuses. Ce qui fait le grand intérêt, la puissance de cette œuvre, c’est une critique, parfois excessive, mais souvent originale et profonde, de tous les principes généralement admis, de ceux même de la morale. C’est aussi l’abondance des vues particulières et personnelles sur une multitude de sujets. On comprend le succès presque prodigieux qu’atteignit ce livre, provoquant chez les uns l’admiration et chez les autres le scandale.

Il est assez vraisemblable que, si la mort n’eût surpris Agrippa en 1535, il eût été bientôt confondu par le gouvernement de François I er et par l’autorité ecclésiastique avec les chefs et les instigateurs de la réforme en France, d’autant que le De incertiludine et vanitate scientiarum ne ménageait ni la théologie, ni le droit canon, ni les cérémonies liturgiques, ni les universités, ni les moines.

Cependant, malgré ces idées, malgré les accusations d’hérésie portées contre lui, maigri’ses sympathies pour plusieurs des réformateurs allemands, Agrippa vécut et mourut catholique, autant du moins que pouvait l’être un homme qui joignait à une si grande indépendance d’esprit la croyance aux talismans et aux charmes magiques. Censuré par la faculté de théologie de Louvain, Agrippa avait publié une Apologia adversus calumnias… sibi per aliquos Lovanienses theologislas intentatas, 1533.

Indépendamment de ses deux grands ouvrages, Agrippa en a publié plusieurs autres d’importance secondaire, qu’on trouvera dans ses Œuvres complètes éditées à Lyon, apud Beringos, s. d., in-8°, 3 vol.

La vie et les œuvres d’Agrippa ont donné lieu à d’importants travaux. Franck dans le Dictionnaire philosophique et Fonsegrive dans la Grande Encyclopédie ont fait un remarquable exposé de ses idées. Nous avons sur ce personnage trois bons ouvrages : Morley, Life of Cornélius Agrippa, Londres, 1856, 2 vol. ; Daguet, Cornélius Agrippa, Paris, 1850 ; Prost, Les sciences et les arts occultes au xvr siècle ; Cornélius Agrippa, sa vie et ses œuvres, Paris, 1881., , —,

A. Baidrillart.

AGRIPPIN, évêque de Carthage, fin du IIe siècle et commencement du IIIe. Saint Cyprien l’appelle vir bonse mémorise, ce qui, sous sa plume, n’est pas un éloge banal ou un terme consacré par l’usage, mais l’expression vraie du respect et de l’admiration. Sous son épiscopat, se posa, en Afrique, la question de savoir quelle attitude

on devait prendre vis-à-vis des convertis qui venaient du schisme ou de l’hérésie. S’ils avaient déjà été’catholiques avant de passer à l’erreur, la discipline ecclésiastique soumettait les apostats à la pénitence. Il s’agissait donc de ceux qui avaient reçu le baptême en dehors de l’Église. Ce baptême était-il valide ? Agrippin convoqua les évêques de Numidie et de l’Afrique proconsulaire, examina la question et crut devoir la résoudre par la négative. En conséquence, il résolut, non de rebaptiser les convertis au sens propre du mot, mais de leur conférer le baptême catholique, le seul valide à ses yeux ; car, pensait-il, rien de bon ne peut venir des hérétiques ; ils n’ont pas l’eau qui fait les vraies brebis ; ils n’ont pas la vraie foi ; et ils ne sauraient conférer la rémission des péchés : autant de raisons qui lui semblaient légitimer la décision prise. Tel n’était pas l’usage de Rome. La question n’avait pas encore été posée et résolue unanimement. Mais la divergence de vues n’empêcha pas Agrippin et ses collègues de rester dans l’unité de la foi, garantie de leur bonne foi et de leur correction. Saint Cyprien crut devoir s’y tenir un demi-siècle plus tard. Quand saint Augustin se trouva en face des donatistes, il défendit la mémoire d’Agrippin et de Cyprien en montrant que, s’ils avaient pu se tromper, ils n’avaient pas rompu l’unité. De bapt., iii, 13, 14, P. L., t. xliii, col. 134, 135. Vincent de Lérins, Common., I, 6, P. L., t. l, col. 645, tout en rendant hommage à Agrippin, regrette sa décision et y voit une « présomption malheureuse ». Mais Facundus, Pro def. trium Capit., x, 3, P. L., t. lxvii, col. 775, 776, remarque avec raison qu’Agrippin est resté l’objet de la vénération des catholiques, parce que rien n’avait encore été décidé sur cette question. — La plupart croient que le concile tenu par Agrippin date du premier quart du HP siècle. Il se pourrait qu’il eût été tenu plus tôt, fin du IIe siècle. Saint Cyprien dit : Jam multi anni sunt et longa selas, ex quo sub Agrippino, bonse mémorise viro, convenientes in unum episcopi plurimi hoc statuer in t. Epist., lxxiii, P. L., t. iii, col. 1112 ; t. iv, col. 44. Et Tertullien : Circa hærelicos quid custodiendum sit digne quis retractet ? Ad nos editum est. De bapt., xv, P. L., t. I, col. 1216. Est-ce une allusion à la décision prise par Agrippin ? Tertullien ne cite pas le nom de cet évêque.

Voir Rebaptisants.

G. Bareili.e.

AGUDI Louis Marie, né à Milan, entra vers 1640 dans l’ordre des carmes déchaussés. Il enseigna la philosophie, puis la théologie à Naples et à Bologne. Il se consacra plus tard au ministère de la parole et prêcha avec succès dans les principales villes d’Italie. En 1659, avec la permission du pape, il quitta son ordre pour embrasser la règle des frères prêcheurs. Il a laissé plusieurs volumes de sermons. On a encore de lui : 1° Carmelus sapiens, sive de scriploribus ulriusque carmeli excalceati tt mitigali ; 2° De justifia et jure, de restitutione, de contractibus ; 3° De sacramentis in génère et in specie ; 4° De censuris in communi et in parliculari ; 5° Fontes Salvatoris.

Quétif et Echard, Scriptores ordinis Prsedicatorum, t. H, Paris, 1721 ; Hurter, Nomenclator literarius, t. ii Inspruck, 18U3.

V. Oblet.

AGUERO Pierre Diaz, médecin espagnol et religieux de l’ordre de Saint-Jean de Jérusalem. On lui doit : 1° un traité De angelis, Madrid, 1672 ; 2° Demonstracion clarisima de la inmaculada y purisima concepeion de la Virgen Maria Nuestra Sehora, in-4°, Madrid, 1618.

Hurter, Nomençlator literarius, t. i, Inspruck, 1892.

V. Obi. et.

AGUILAR Joseph, jésuite péruvien, né à Lima le 7 août 1652, enseigna la philosophie et la théologie à Lima et à Cbarcas, fut recteur des collèges de ces deux villes ; il mourut à Panama, le 20 février 1708, en se rendant à Rome comme procureur de sa province. Vingt-