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AGREDA (D’) — AGRICOLA

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grande dans les visions qu’il renferme, et qu’il n’offre point par conséquent toutes les garanties qu’on a le droit d’attendre en ces sortes de matières. Et cependant Marie d’Agreda s’était préparée de son mieux à cette œuvre, elle lui avait donné une clarté, une pureté intérieure et une hauteur qui n’a peut-être pas été surpassée depuis et qui a toujours été mise hors de doute dans les discussions engagées à son occasion. C’est là une preuve frappante de la nécessité de prendre toutes les précautions qu’exigent ces matières délicates afin d’éviter l’erreur et l’illusion qui s’y rencontrent si facilement. C’est en même temps la meilleure justification de la sagesse de l’Eglise, qui, après avoir examiné sous le rapport théo- logique ces sortes de visions, les livre à l’élude de la science et, sans rien définir sur leur mérite intrinsèque, les laisse pour ce qu’elles sont et permet aux fidèles d’y chercher l’édification, la lumière et les enseignements qu’elles renferment. »

La correspondance de Marie d’Agreda avec le roi d’Espagne Philippe IV, comprenant 614 lettres, a été publiée en deux volumes par le ministre espagnol Fran- çois Silvela, sous ce titre : Cartas de la ven. madré sor Maria de Agreda y del senor Rey Felipe IV, Madrid, 1890. Dès 1855, A. Germond de Lavigne avait attiré l’attention sur cet important échange de lettres dans son ouvrage : La sœur Marie d’Agreda et Philippe IV, roi d’Espagne, Paris, 1855. Toutefois, il n’y a mis en œuvre que la copie des quarante-deux lettres qui se trouve à la bibliothèque nationale de Paris.

Ouvrages à consulter, outre ceux qui sont cités au cours de cet article : Sacra Rituum Congregatio. Examen responsionis ad censurant olim editam super libris mislicse civitatis Dei, Rome, 1730 ; S. Rit. Cotigregatio. Synopsis observationum et responsionum... super libris ven. abbatissse Marise a Jesu de Agreda, Rome, 1737 ; S. Rit. Cpngregatio. Super examine operis a Maria a Jesu de Agreda. conscripli, Rome, 1747 ; Dom Guéranger, La mystique Cité de Dieu, dans le journal l’Univers, 1858-1859 ; Preuss, Die rômische Lehre von der unbefleckten Empfàngnis, Berlin, 1865, p. 102 sq. ; Ant. Maria de Vicenza, Vita délia ven. s. Maria d’Agreda, Bologne, 1870 ; Id., Délia mistica cilla di Dio... Allagazione storico- apologetica, Bologne, 1873 ; Reusch, Der Index der verbo- tenen Bûcher, t. n, Bonn, 1885, p. 253 sq. ; Ign. Jeiler, O. S. F., Maria von Agreda, dans le Kirchenlexikon, t. vm, Fribourg, 1893, col. 740-751.

J. Van den Gheyn.

1. AGRICOLA François, controversiste catholique, né à Lohn dans le duché de Juliers. Son véritable nom de famille, latinisé selon l’usage du temps, est resté inconnu. Nous ne connaissons de sa vie que peu de détails. Après avoir fait ses études à Cologne et Louvain, il fut nommé en 1570 curé de Rôdingen, vers 1582, curé et chanoine à Sitlard, et en 1599, doyen rural du cha- pitre de Sùsteren. Il mourut à un Age fort avancé, à Sittard, le 4 décembre 1624. Il a laissé de nombreux écrits.

Voici ceux qui intéressent plus spécialement la théo- logie : Biblische Instruction von der cal holisclier Mess, Cologne, 1580, in-8° de 807 p. ; De cultu et veneralione divorum (sanctorum), Cologne, 1580, in-8° de 144 p. ; De conjugio et cœlibalu sacerdotum, Cologne, 1581, in-8" de 285 p. ; De Sanclorum reliquiis, Cologne, 1581, in-8° de 281 p. ; Ketzerbrunn, Cologne, 1583, in-8" de 836 p. ; Catholischcr Bericht von dem Christlichem Gebett, Cologne, 1585, in-8° de 244 p. ; Ob Zaubcrey die argste und grïmdlichste sïmd sey, Cologne, 1597, in -8° de 261 p. ; De Verbo Dei scriplo et non scripto, Liège, 1597, in-8° de 150 p. ; Traclalus de Primatu S. Pétri Apostoli et Successorum ejus Romanorum Ponti/icum, Cologne, 1599, in-8° de 516 p. ; Demonstrationum evangelicaruni libri IV, quibus demonslralur Cliristum secundum animam rêvera ad infema descendisse et piorum animas inde c limbo libérasse, Cologne, 1578, in-8° ; De selerno et vero Deo,necnon indubilalo Christo et Messia chrislianorum libri III adversus calvinistas,

Cologne, 1583, in-8" de 242 p., et 1605 ; De periculoso cl abominabili statu concubinariorum impsenilentium, Cologne, 1604 ; Attestatio SS. Patrum..., quod S. Apo- stolus Petrus Romse fuerit, ...ibiquc usque ad mortem episcopalum gesserit, Cologne, 1605, in-12 de 84 p. ; De privilegiis et signis verse Chrisli in terris ccclesise, Cologne, 1616 ; Ehrenrettung Mariée, derMutter Gotles, Cologne, 1616.

Foppens, Biblioth. Belgica, t. i, p. 280 ; Hartzlieim, Biblioth. Colon., p. 79 ; Wetzer u. Weltes, Kirchenlexikon, 2" édit., t. i, col. 354 sq., article Agricola Fr., par Floss ; Hurter, Nomencla- tor, 2’ édit., t. I, p. 304.

E. MULLER.

2. AGRICOLA Jean (de son vrai nom Schnitler, ou moissonneur) naquit à Eisleben (en 1492 ?), d’où le nom d’Islebius, sous lequel il est plus généralement désigné par ses contemporains ; il étudia et enseigna à Wit- temberg où il se lia d’étroite amitié avec Luther qu’il ac- compagna à Leipzig en 1519. En 1525, il fut prédicateur à Francfort-sur-le-Main ; et, de 1526 à 1536, à Eisleben ; en 1527, il inaugura contre Mélanchthon la première controverse antinomiste ; en 1530, il se trouva à la diète d’Augsbourg auprès de Mélanchthon ; en 1536, il devint professeur de théologie à Wittemberg et renouvela la querelle antinomiste ; en 1537, il parut aux Etats de la ligue de Smalkalde. Poursuivi par la haine de Luther, en 1540, il se rendit à Berlin, comme prédicateur, à la cour de l’électeur Joachim II ; à partir de ce moment et jusqu’à sa mort, il devait jouer dans l’électorat de Bran- debourg un rôle très actif et très important ; en 1548, il préparait avec Pflug et Helding l’intérim d’Augsbourg ; la même année, il reprenait encore une fois la controverse antinomiste, à propos des œuvres, et s’acharnait dans la lutte contre Mélanchthon ; il mourut à Berlin en 1566.

Agricola fut un prédicant célèbre, un professeur goûté pour la distinction de son langage, un écrivain fécond. Son recueil de proverbes allemands (avec gloses) publié à Magdebourg en bas allemand (1528), puis en haut allemand (1529), lui assure une place dans l’histoire de la littérature allemande.

Mais, s’il s’est fait un nom parmi les réformateurs, c’est pour ses opinions particulières sur la loi et les œuvres, d’une part, et d’un autre côté par le zèle avec lequel il servit la politique religieuse de l’électeur de Brandebourg. Nous allons traiter ces deux points.

I. Controverse antinomiste. — L’antagonisme entre la Loi et l’Evangile, tel que l’avaient com-u Luther et Mélanchthon, était une des colonnes du système pro- testant ; mais on pouvait l’entendre avec plus ou moins de rigueur ; on pouvait également sous le nom de loi entendre uniquement la loi mosaïque ou bien aussi la loi morale ; on désigna sous le nom à’antinomistes ou d’anome’ens les plus déterminés adversaires de la loi mosaïque, puis, comme ils prirent parti sans restriction contre les œuvres, on les accusa de mépriser aussi la loi morale. Il était inévitable qu’une telle controverse s’élevât au sein du protestantisme, puisqu’elle naissait du fond même de la doctrine luthérienne de la justifi- cation. Ou bien on exposait celte doctrine dans toute sa rigueur, on refusait aux vertus et à leurs actes tout rapport avec le salut, et on s’exposait au reproche do ne pas tenir compte de la loi morale ; ou bien, effrayé des suites de la doctrine en vertu de laquelle l’homme est justifié et sauvé par la seule imputation des mérites du Sauveur, on regardait la conversion entendue au sens précis du mot, le renouvellement intérieur, comme une condition de l’accomplissement des promesses évangé- liques, et on était accusé d’enlever à l’Évangile son ca- ractère de bonne nouvelle et d’en gâter aux hommes la douceur en y mêlant des préceptes et des menaces, en en faisant une sorte de loi.

En 1527, quand Mélanchthon, dans ses articles sur la visite des églises de Saxe, dit qu’il ne fallait pas prêcher