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AGGÉE, IL 7-4

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la Vulgate (voir ce mot). Cf. Tic l’authenticité de la Vulgate aux endroits dogmatiques dans les Etudes religieuses, avril 1898, p. 216.

4° Si maintenant nous jetons un regard d’ensemble sur Aggée, il, 7-10, comme aussi sur les interprétations dont il a été l’objet, nous remarquerons sans peine que ce passage se divise naturellement en trois parties :

a) Commotion universelle du ciel et de la terre (7).

b) Ébranlement de tous les peuples qui apportent leurs présents au nouveau temple (8, 9).

c) La suprême manifestation de la gloire promise à ce temple par la paix messianique (10).

Chacun de ces points pris en particulier a reçu de la part des Pères et des exégètes postérieurs les explications les plus diverses. Nous l’avons déjà montré pour le second point, qui est le principal ; il ne serait pas difficile de l’établir également pour le premier. Inutile de s’attarder à une tâche dont plusieurs commentateurs se sont fort bien acquittés. Qu’on consulte le P. Knabenbauer sur la nature de cette commotion dont l’univers entier sera le théâtre. Comment. inProph. min., t. ii, p. 199, et Estius, Comment. in epist. ad Hebr., xii, 26. Quant au dernier point concernant la gloire du second temple et la paix que Jéhovah doit répandre dans Jérusalem, il appelle quelques courtes réflexions.

Ceux qui se refusent à voir dans tout le passage un sens messianique quelconque, entendent le ꝟ. 10 de la supériorité que le temple de Zorobabel, restauré par Hérode, devait avoir en durée et en splendeur sur celui de Salomon. L’école d’Antioche elle-même ne semble pas avoir admis autre chose. Cf. plus haut, II, 2°, col. 568, et aussi Eusèbe, Theoph. frag., dans Mai, Nova Patrum biblioth., t. iv, p. 128. Il est bien vrai que le second temple futrebàti de l’an 20avant, Iésus-Christ à l’an 26 de notre ère sur un plan beaucoupplus vastequeceluidi : templesalomonien ; c’est là que Jéhovah reçut les prières et les offrandes des prosélytes venus de tous lespointsdu monde connu pour .’idoreraJerusalem.il Mach., iii, 2 ; Act., ii, 7-12 (cf.Ps.LXXi, 10) ; Josèphe, Ant. jud., xv, 11, 14, édit. Didot, t. i, p. 610 ; La question juive dans l’antiquité, dans Études religieuses, 15 septembre 1895, p. 5 sq. Et pourtant il n’est guère admissible qu’un oracle si solennel ait eu pour unique objet des embellissements que le temple devait recevoir un jour, grâce à la politique vaniteuse d’un Iduméen. Au reste, quelle qu’ail été la magnificence du temple d’IIérode, d’ailleurs de si courte durée, elle a si peu réussi à effacer l’éclat et la réputation de l’édifice de Salomon que celui-ci est resté proverbial et passe encore généralement pour avoir été une des merveilles de l’antiquité. Enfin comment se résoudre à reconnaître la paix extraordinaire, prédite cinq siècles à l’avance, dans le calme, plus apparent que réel, fait de découragement et de servitude, dont la Judée jouit au moment où Hérode reconstruisit le temple ? Une paix semblable s’est vue plus d’une fois entre Aggée et Hérode, et on ne voit pas bien pourquoi, dans cette hypothèse, on descend si bas pour trouver la réalisation de la prophétie.

D’autres, qui ont senti avec Ribera, p. 198, toute l’insuffisance de eeite exégèse, la complètent heureusement in faisant remarquer que la gloire promise au second temple consiste par-dessus tout en ce que le Messie en personne doit y pénétrer. Ils rapprochent le texte d’Aggée de celui de Malæhie, II, l’.Ecce ego niitto ange-Imn mriini ri prn’purulii i viam ante faciem meam. El statim veniet ad templum suum Dominalor, quem vos quærids, et angélus lestamenti, quem vos vultis. Ecce venit, dicil Dominus e.rerciluurn. A en croire Ga latin, Ribera et Sanctius, cette interprétation ne serait pas exclusivement chrétienne, elle aurait encore pour elle l’autorité de plusieurs rabbins du moyen âge el même du 1. mieux Rabbi Akiba ([ 135), le prétendu prophète du pseudo-messie Bar-Cochébas. Il importe de remarquer ici que, d’après le texte et les Septante, l’opposition marquée par le prophète n’est pas précisément entre le temple de Salomon et celui de Zorobabel, mais entre la gloire du temple au début, à ses origines, et celle dont il doit jouir plus tard, à la fin, avant de disparaître : major erit gloria donnes istius noriss’uua quam prima. Cf. Agg., ii, 4. Du coup tombe cette mauvaise chicane, que Rosenmùller n’a pas craint de reproduire, à savoir que le temple restauré par Hérode ne saurait être considéré comme ne faisant qu’un avec celui de Zorobabel. Il s’agirait donc du temple du vrai Dieu en général, sans distinguer entre l’édifice matériel du Xe siècle et celui d’après l’exil.

Le plus grand nombre des commentateurs latins ne voient dans le temple matériel de Jérusalem que le commencement, l’ébauche et le type prophétique de l’Eglise ; tel est le vrai temple dont la gloire doit surpasser tout ce qui a précédé. Cf. Apoc, xxi, 21-26. La paix messianique a commencé avec l’incarnation du Verbe de Dieu, mais elle ne recevra son couronnement que le jour de son second avènement. Saint Augustin, De civ. Dei, xviii, 48, 35, P. L., t. xli, col. 610, 593, et en général tous ceux dont les noms ont été cités plus haut, II, 1°, col. 567, auxquels il faut joindre saint Éphrem, Opéra omnia tsyriace, t. i, p. 467. Ce sentiment n’a rien que d’exact et de logique du moment qu’on suppose qu’au verset 8e il est directement question du Messie ; il est bien clair dans ce cas que la paix, dont il est parlé immédiatement après, est vaste et durable comme le royaume même du Christ.

III. Conclusion. —

1° Malgré les interprétations diverses dont chaque détail de cette prophétie a été l’objet, I il n’est pas difficile de constater l’accord parfait des commentateurs catholiques sur le sens général de tout le passage. Par des voies différentes ils en arrivent presque tous à conclure qu’il s’agit ici des temps messianiques, c’est-à-dire de l’époque où doit s’établir sur terre le royaume immuable de Dieu prédit par les prophètes. Tel est le sens que l’auteur de l’épître canonique aux Hébreux, xii, 26-29, donne à Aggée, ii, 7 ; et c’est là une autorité irréfragable. Iiien plus l’usage même qu’il fait de ce passage au I er siècle de l’ère chrétienne donne à penser que sa signification messianique était dès lors communément reçue.

2° Ce sentiment de la tradition chrétienne trouve un solide point d’appui dans le texte lui-même. Aggée y décrit les temps messianiques avec les mêmes traits qui souvent se rencontrent ailleurs dans les auteurs inspirés. Pour s’en convaincre il suffit de comparer les trots parties de sa prophétie avec les plus saillants de ces endroits parallèles.

a) C’est d’abord une grande commotion de tous les peuples et comme un renouvellement de la nature entière. Joël, ii, 30, 31 (cf. iii, 15) ; Is., xxiv, 1 ; LI, 16 ; i.xv, 17 ; lxvi, 22 (cf. I Reg., ii, 10) ; Act., ii, 17-20 (cf. Ephes., iii, 8-14 ; II Petr., iii, 10, 13). L’avènement du Messie doit être en effet précédé de luttes acharnées, au milieu desquelles seront humiliées et châtiées toutes les orgueilleuses nations de la terre. Is., il, Il sq. ; xix, 16-xx ; xxiv, 19-23 ; Miellée, v, 10-vi ; Dan., il, 41 ; vii, 14.

b) Le culte de Jéhovah prendra aux temps messianiques un caractère universel, catholique. Les peuples du monde entier viendront en foule à Jérusalem, c’est-à-dire se convertiront au vrai Dieu. Is., lx, tout entier ; il, 2-5 ; iv, 3 ; xiv, 1-3 ; xi.ix, 6 ; Mien., iv, 1 sq. ; Ps. Il, LXVI, xi.vi, cxvi, i.xxxvi, etc.

c) De tous les biens messianiques la paix est le principal ; le Messie doit être le souverain pacificateur. Ps. i.xxi ; Is., ix. li, 7 ; Midi., v, 5 ; Malach., ni, 12.

3° Il y a donc au sujet de celle prophétie d’Aggée un juste milieu à tenir entre *vu sentiments opposés et qui sont, semblc-t-il, également erronés. En partant du fait que le verset 8° est mal rendu dans la Vulgate, les