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505 ADULTÈRE (L’) CAUSE DE DIVORCE DANS LES ÉGL. ORIENTALES

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Les actes authentiques du Saint-Siège et de ses représentants nous montrent que, loin de le tolérer, ils l’ont interdit et ont travaillé à l’extirper. Dans la profession de foi imposée aux grecs par Grégoire XIII en 1576, il n’est pas fait mention, il est vrai, de l’indissolubilité du mariage. On y demande seulement une adhésion à toutes les affirmations, définitions et déclarations des conciles, en particulier de celui de Trente, § 6, 18. Chérubini, Bullarium Romanum, Luxembourg, 1742, t. ii, p. 429, 430. Mais vingt ans après, dans une instruction du 31 août 1595 sur les rites des grecs, Clément VIII ordonne aux évêques de ne permettre la rupture d’aucun mariage : Malrimonia inter conjuges græcos dirimi, seu divortia quoad vinculum fieri nullo modo permettant, aut patiantur, et si qua de facto processerunt, nulla et irrita déclarent, S 5. Ibid., t. iii, p. 53.

Une trentaine d’années plus tard, Urbain VIII promulgua pour las Orientaux une profession de foi qui a été en usage jusqu’à nos jours. A la différence de la profession de Grégoire XIII, celle d’Urbain VIII est aussi explicite que possible sur le point qui nous occupe. Elle porte : Item (profiteor) sacramenti matrimonii vinculum indissolubile esse, et quamvis propter adulterium, hseresim aut alias causas possit inter conjuges thori et cohabitationis separalio fieri, non tamen Mis aliud matrimonium contrahere fas esse. Juris pontificii de propaganda fide, part. I, in-4 », Rome, 1888, t. i, p. 227. Cette profession est reproduite par Benoit XIV, dans sa constitution LXXVIII Nuper ad nos du 14 mars 1743. Benedicti XIV bullarium, 4e édit., Venise, 1778, 1. 1, p. 116.

Le même pape reproduit encore textuellement le passage cité plus haut de l’instruction de Clément VIII, dans sa constitution LXII Etsipastoralis sur les dogmes et les rites des italo-grecs, § 8, n. % ibid., p. 80.

La S. C. du Concile, chargée par les souverains pontifes de l’interprétation du concile de Trente, s’est aussi prononcée sur la question. Interrogée au sujet d’un grec catholique qui s’était séparé de sa femme parce qu’elle était coupable de trois adultères évidents et avoués, et qui voulait contracter un nouveau mariage, la S. C. a répondu, le 15 janvier 1724, qu’il ne pouvait se remarier. Muhlbauer, Thésaurus resolutionum S. C. Concilii, Munich, 1872, t. I, p. 247. Cf. Benoit XIV, De synodo, 1. XIII, c. xxii, n. 4. Le Saint-Siège a donc manifesté très nettement sa pensée sur le sens du canon du concile de Trente.

Il faut reconnaître toutefois que certains grecs unis ont parfois gardé leur usage de se remarier du vivant d’un premier conjoint adultère. Ainsi les Valaques et les Ruthènes de Transylvanie, réunis à l’Église romaine en 1699, gardèrent cet usage pendant un siècle parce qu’ils prétendaient y avoir été autorisés par les souverains pontifes. Ils appuyaient cette prétention sur ce fait que leur usage n’avait pas été réprouvé expressément dans leur acte d’union avec l’Église romaine. Ils ne voulaient pas remarquer qu’on leur avait imposé dans cet acte, l’adhésion à tous les décrets du concile de Trente. Or dans la pensée du Saint-Siège, cette adhésion comprenait l’abandon de l’usage de se remarier, en cas d’adultère de leur conjoint. Aussi les évêques de Fogarasse travaillèrent-ils à l’extirper, et ils en étaient venus à bout au commencement du xix’siècle. Perrone, De matrimonio christiano, Liège, 1861, t. iii, p. 5°0-572.

Massarello, édité par Theiner, Acta concilii Tridentini, Agram, 1874, t. ii p. 232-466 ; Perrone, De matrimonio christiano, Liège, 1861, t. iii, p. 359-389.

A. Vacant. VI. ADULTÈRE (L’) cause de divorce dans les Églises orientales. — 1. Grecs. II. Syriens et nestoriens. III. Arméniens. IV. Abyssins.

I. Grecs.

Quoique les chrétiens des premiers siècles aient réprouvé la liberté du divorce dont les juifs et les

païensabusaient, Justin, Dial.cum Tryph., A41 ; Apolog., I, 15, P. G., t. vi, col. 779, 350 ; et que les canons des apôtres aient prohibé sans distinction un nouveau mariage de l’un ou l’autre desdeux époux après la séparation. Can. apost., 48, Pitra, Juris ecclesiaslici Grœcorum hisloria. et monumenta, Rome, 1861, t. i, p. 21 ; que la sanction contre l’adultère n’ait été que la pénitence canonique, Concil. Ancyr., can. 20, ibid., p. 447, et note 10, p. 450 ; on doit reconnaître que les facultés données par la loi mosaïque, et la pratique suivie dans l’empire romain influèrent sur la législation matrimoniale de l’Église grecque. Constantin avait permis le divorce par une loi, Cod. Theodos., 1. III, tit. xvi, leg. 1 (331), autorisant un second mariage pour le mari aussitôt après la séparation, et, pour la femme divorcée, au bout de cinq ans. La loi d’Honorius maintint cette anomalie. Ibid., leg. 2 (421). Théodose le Jeune imposa le célibat aux deux époux au cas où le divorce aurait été effectué sans de justes motifs, 1. VIII, § 4 ; puis Justinien réduisit les cas de divorce. Novell., 117, c. ix ; 134, c. xii. Le motif de l’adultère subsiste dans les lois de Justinien, mais les conditions du mari et de la femme y sont rendues plus égales. Voir Nomocanon, tit. xiii, c. iv, Pitra, Juris ecclesiastici Grœcorum historia et monumenta, Rome, 1868, t. ii p. 613-615. Néanmoins, la loi et l’usage faisaient au mari coupable une situation meilleure qu’à la femme infidèle. Non seulement la faute de celle-ci était tenue pour plus grave et plus odieuse, mais l’infidélité du premier n’était pas considérée comme un adultère proprement dit, ni dans les lois romaines, ni dans les édits de Constantin. Plusieurs des Pères anciens ont condamné ce principe. Voir Aslèred’Amasée, f/onî., xix, P. G., t. xl, col. 237-240 ; Lactance ; Divinaruin institutionum, 1. VI, c. xxiii, P. L., t. vi, col. 719 ; Chrysostome, Hom., v, inl Thess., iv, P. G., t. lxii, col. 425 ; mais la législation ecclésiastique des grecs ne se dégagea pas entièrement des principes du code civil, suivant en cela une pratique contraire à celle de l’Église d’occident. Leur principal argument repose sur le texte de l’Évangile, Matth., v, 32, où ils trouvent, en plus de la répudiation, la liberté donnée à l’époux trompé de contracter un nouveau mariage, l’adultère étant, comme la mort, la rupture du lien conjugal : fâ>.oz Oavàro) [aôvu nai (xotx êla 61ay.Ô7TT£Tai. Astère d’Amasée, Hom. cit., p. 228. Nous avons vu III. Adultère (L’) et le lien du mariage d’après les Pères de l’Église, que cette dissolution du mariage était entendue par les anciens auteurs comme ne donnant point droit à contracter la seconde union autorisée par les lois civiles.

La coutume établie au temps de saint Basile était qu’une femme qui abandonnait son mari était tenue pour adultère si elle vivait avec un autre homme, alors que le mari, abandonné, n’encourait pas cette note, s’il prenait une autre femme. La même inégalité s’attachait à l’infidélité des deux conjoints : aucun canon ne condamnait comme adultère le mari coupable, et il avait le droit de revenir à la maison de sa femme ; tandis que la femme souillée du même crime était punie comme adultère et devait être répudiée, d’après le texte des Proverbes, xviii, 2. Il est peu aisé de rendre raison de ces déterminations, dit saint Basile, mais la coutume a prévalu de la sorte. Can. 9 et 21. Pitra, t. i, p. 582, 583, 589. Ailleurs il émet l’opinion que la femme répudiée doit demeurer dans le célibat, can. 48, p. 594, et, dans le livre des Morales, il interdit franchement les secondes noces aux époux divorcés. Régula lxx.hi, P. G., t. xxxi, col. 352.

Nous avons cité plus haut, III. Adultère (L’) et le lien du mariage d’après les Pères, col. 481, les canons du concile d’Arles (314) et du second concile de Milève (416) relatifs à ce sujet. Le canon de Milève, reproduit par plusieurs conciles d’Afrique, enjoignait, d’après l’apôtre, I Cor., vil, 11, aux époux séparés, la réconciliation ou le