Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 1.djvu/251

Cette page n’a pas encore été corrigée

IG1 ADULTÈRE (L’) ET LE LIEN DU MARIAGE D’AP. L’ÉCRIT. SAINTE 468

l’ancienne loi. La seule différence c’est qu’ici il revêt un caractère spirituel et peut être évité par le repentir, au lieu que sous le Lévitique la mort corporelle en était toujours la rançon. D’après les enseignements évangéliques, celui qui l’ayant commis mourra dans l’impénitence, sera pour toujours exclu du royaume céleste. Saint Paul le dit en propres termes : Neque adulteri regintm Dei possidebunt. I Cor., vi, 9.

Discipline ecclésiastique.

C’est sur ce texte que l’Église primitive régla sa conduite. Convaincue, d’une part, qu’elle représentait sur la terre le royaume céleste et, de l’autre, voulant à tout prix réagir contre les scandales païens et offrir au monde le spectacle d’une société sainte et immaculée dans ses membres eux-mêmes, elle bannit tout d’abord, de son sein, les malheureux qui avaient failli à la foi conjugale, de peur de paraître leur indulgente complice, devant un public qui ignorait ses doctrines et ne la jugeait que par les faits extérieurs. L’excommunication portée contre les coupables était perpétuelle, mais ils n’étaient pas pour autant contraints de mourir dans leur crime, ils pouvaient l’expier aux yeux de Dieu par des pénitences secrètes et dans ce cas la flétrissure ecclésiastique était purement externe, elle prenait le caractère d’un châtiment social. Plus tard, les motifs qui avaient fait établir cette discipline disparaissant, on jugea à propos de l’adoucir, et à partir du pape Callixte (217-222) on consentit à absoudre l’adultère à condition qu’il accomplit la pénitence publique imposée par l’évêque. Cette modification n’alla pas sans quelques tiraillements. Nonobstant, l’Église, maîtresse de sa discipline et pensant, non sans raison, que la rigueur exagérée engendre le désespoir, maintint sa seconde manière d’agir et la modifia encore plus tard, suivant qu’elle le crut utile au bien des âmes. Au début de cette nouvelle phase disciplinaire, elle ne fixait pas la durée de la pénitence pour se préparer à la réconciliation, mais il est certain qu’elle laissait gémir longtemps le coupable avant de lui rouvrir les portes de la basilique. Quand le temps et la paix lui eurent permis de s’organiser, elle créa la pénitence tarifée, sous le régime de laquelle l’adultère était puni de la déposition et de dix ans d’expiation publique, s’il s’agissait d’un clerc, et de l’excommunication de sept ans, quand le coupable n’était que laïc. Cf. dist. LXXVIII, c. 4 : Prsesbyter ; caus. XXVII, q. i, c. 27 : Devotam ; caus. XXVU, q. i, c. 6 : Si quis episcopus. D’autre part elle mettait à profit l’influence qu’elle prenait dans le monde pour adoucir l’esprit des législations civiles. Elle laissa.lustinien maintenir la rigueur de la loi Julia contre l’homme, mais pour la femme on lui fît grâce de la vie. Il fut décidé qu’on l’enfermerait dans un monastère après l’avoir battue de verges. La durée de son emprisonnement dépendait en partie de la volonté de son mari ; il pouvait la reprendre au bout de deux ans. S’il refusait de la faire bénéficier de cette disposition du droit, les portes du cloître se refermait sur elle pour jamais. Peu à peu l’Église en vint même à s’inscrire en faux contre la peine de mort infligée à l’homme. Cꝟ. 1. V., tit. xxxix, c 3 : Si vero. Llle stipula que, en tous car, ni le père ni le mari outragés ne pouvaient l’appliquer eux-mêmes au malheureux surpris en flagrant délit, car il n’y a pas parité, disait-elle, entre l’adultère et la mort. Aujourd’hui, par suite de l’affaiblissement du sens chrétien, les peines canoniques sont tombées en désuétude, mais au for (le la conscience, l’adultère demeure ce qu’il lui toujours, un crime odieux.

IV. Obligations qu’impose l’adultère.

Nous avons dit qu’il viole le sixième ci le septième commandemenl de Dieu. Nous n’avons pas à le redire, mais du chef qu’il enfreint le septième précepte du décalogue, il faut, pour le réparer, non seulement se repentir, mais encore faire les restitutions qu’il comporte. C’est l’avis de toutes les législations religieuses et de tous les théologiens interprètes du droit naturel. Quelle sera la mesure de cette restitution’.' Nous ne pouvons entrer ici dans des détails. Donnons quelques principes généraux. De Lugo, De justit. et jur., disp. XIII, résumant et complétant ses devanciers, enseigne que les deux complices sont tenus, si leur crime est connu ou soupçonné, d’effacer la tache d’infamie qui rejaillit sur l’offensé, soit en l’honorant dans le commerce ordinaire de la vie, soit en l’élevant, si possible, à une condition supérieure. Us doivent, en second lieu, le défrayer des dépenses qu’il a pu faire pour nourrir et élever l’enfant adultérin, ainsi que des dommages que la grossesse de la mère a entraînés pour la famille. Les deux complices sont solidaires l’un de l’autre. Dans le cas cependant où la faute n’a pas été égale de part et d’autre, où il y a eu, par exemple, séduction, ruse, ou surtout violence, l’obligation de restituer retombe tout entière à la charge du tentateur. Quoi qu’il en soit, il faut porter, dans la réparation, beaucoup de prudence et de sagacité. Le crime a été fait dans l’ombre et le mystère ; qu’on ne l’en sorte pas sous prétexte d’en effacer le dommage ; le bien qui en résulterait ne compenserait pas le mal qu’une divulgation maladroite ferait à la société conjugale et à l’honneur du foyer. Une femme a eu le malheur de mettre un enfant adultérin dans le sein de la famille, qu’elle redouble d’activité afin de subvenir discrètement à ses dépenses, mais que dans sa manière de procéder elle s’arrête en deçà des limites où le plus léger soupçon pourrait l’entacher. Il y a plus : qu’elle ne fasse rien d’insolite si la situation est telle qu’un changement dans sa vie journalière puisse devenir un indice quelconque pour son mari en défiance : elle n’est pas tenue à restituer, quand elle ne le peut faire sans dévoiler sa faute. Cf. De Lugo, De justit. et jur., disp. XIII ; Marc, lnstil utiones morales, tr. VII, c. ii, a. 3 ; Berardi. Praxis confess., Fænza, 1884, p. 306, n. 467 sq. Du reste, il peut arriver qu’elle ne soit pas sûre de l’illégitimité de son enfant. Le cas échéant, elle n’a pas à sepréoccuper de l’injustice possible, car la présomption juridique est en faveur de la paternité du mari.

Quand se produit un roman de cette nature, le malheureux enfant, fruit de l’adultère, est parfois porté à l’hospice. L’instinct de la nature veut qu’on ne l’abandonne pas, entre des mains étrangères, sans fournir les moyens de l’élever et de l’entretenir, d’autant que l’hospice ne trahira pas les secrets qui lui sont confiés. On ne saurait donc trop engager les parents coupables, à s’occuper de l’innocente créature qu’ils ont mise au monde. Cependant s’ils refusent de le faire, on ne saurait les y contraindre au nom de la justice, d’après l’opinion la plus probable des théologiens. Cf. De Lugo, op. cit., disp. XIII, sect. i ; Lessius, De justitia, l. II, . c.X, dub.v ; Marc, 1ns tit utiones morales A Ipfions., part. II, sect. ii, tr. VII, D ? 7° Decalogi præcept., c. ii, a. 2, §3.

R. Parayre.



II. ADULTÈRE (L’) et le lien du mariage, d’après l’Écriture sainte.

L’adultère entraîne- 1- ii, d’après la sainte Écriture, le droit de dissoudre le mariage ? La question ne peut être résolue qu’après un examen sérieux des témoignages de l’Ancien et du Nouveau Testament. Nous suivrons l’ordre des temps, et nous examinerons :
1° si le mariage pouvait être dissous pour cause d’adultère dans la religion primitive ;
2° s’il pouvait l’être dans la loi mosaïque" ; et
3° s’il peut l’être dans la religion chrétienne.

I. Dans la religion primitive.

Le livre de la Genèse, ii, 18-25, donne brièvement le récit de l’institution du mariage. Dieu voulait que l’union la plus étroite régnât entre Adam et Eve. Aussi forma-t-il la femme de la côte’du premier homme. Il importe peu ici de savoir comment il faut interpréter les paroles du ). 22 : « Avec la côte d’Adam Dieu forma une femme, » Ce qui est sûr, c’est qu’elles contiennent un enseigne-