Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 1.djvu/244

Cette page n’a pas encore été corrigée

453

ADRIEN II

454

sévère que son prédécesseur. Il consentit à la recevoir et à l’entendre. Mais jugeant qu’une allaire de telle importance devait être réglée en synode, il ne crut pas <levoir se rendre aussitôt à sa prière et il la renvoya à son mari. En même temps, il notifiait à celui-ci la décision qu’il avait prise et l’avisait qu’il eût, en attendant la sentence synodale, à traiter Theutberge comme son épouse, ou à lui céder les abbayes qu’il lui avait promises. Jaffé- Wattenbach, Regesta ponti/icum Romanorum, t. I, Leipzig, 1885, n. 2892. Vers la même époque, il écrit à Adon, archevêque de Vienne, pour le féliciter des représentations qu’il avait faites à Lothaire. Jaffé, ibid., n. 2893. Néanmoins, il penche visiblement pour la miséricorde et la clémence. En février 867, il écrit à Waldrade que, sur la demande de l’empereur Louis, il la relève de l’anathème qu’elle a encouru, à la condition qu’elle se séparera de Lothaire. Jaffé, ibid., n. 2897. Il fait part de cette sentence de pardon aux archevêques et évêques du royaume de Louis le Germanique, de Charles le Chauve et de Lothaire, Jaffé, ibid., n. 28982900, et il invite ce dernier à se présenter devant lui, pour se justifier, s’il est innocent, pour se soumettre à une pénitence, s’il se reconnaît coupable. Jaffé, ibid., n. 2901. Sa bonté, cependant, n’était pas faiblesse ; s’il ne pouvait s’empêcher de trouver son prédécesseur sévère dans ses châtiments, il reconnaissait et proclamait bien haut la justice de ses sentences. A quelques jours de là, le 8 mars 868, il ordonnait que les décrets de Nicolas fussent observés et il accréditait en quelque sorte l’archevêque de Reims, Hincmar, comme son représentant officiel, pour les défendre et les faire exécuter. Jaffé, ibid., n. 2905. Une lettre qu’il adresse le 8 mai de la même année à Adon, archevêque de Vienne, marque bien quelle fut son attitude en toute cette affaire. Adon l’avait exhorté à respecter dans toute leur teneur les décisions de Nicolas. Adrien accepte l’avis, mais en ajoutant qu’il entend parfaire dans la douceur ce que lui, Nicolas, avait commencé dans la sévérité. Jaffé, ibid., n. 2907.

La démarche imposée par Lothaire à Theutberge auprès d’Adrien, en 867, n’ayant pas réussi, le roi n’avait plus d’autre ressource que de venir lui-même plaider sa cause, comme il y avait été invité. Une première rencontre, qui fut plutôt une entrevue intime, comme l’a démontré le P. Lapôtre (article cité plus bas), eut lieu le 1 er juillet 869 au mont Cassin. Le pape avait dû y venir, sur l’ordre de l’empereur Louis II. Lothaire, qui avait gagné celui-ci ainsi que l’impératrice Engelberge, voulait ainsi soustraire Adrien aux influences nicolaïtes qui l’entouraient à Rome et l’isoler, en quelque sorte, pour mieux triompher de ses résistances. En fait, dans cette rencontre du mont Cassin, Adrien l’admit à rentrer en grâce ainsi que ceux de ses partisans qui l’accompagnaient, entre autres Gùnther, l’archevêque déposé de Cologne. Il chanta la messe en sa présence et consentit à lui donner la communion, à la condition qu’il certifierait que, depuis l’excommunication de Waldrade, il n’avait habité ni eu le moindre commerce avec elle, ce qui fut fait. Hincmar, Annales, an. 869.

Mais en admettant ainsi Lothaire à une simple communion privée, Adrien n’avait pas entendu dirimer l’affaire. Après l’entrevue du morit Cassin il reprit le chemin de Rome où Lothaire le rejoignit quelques jours après, 9 juillet. C’est alors seulement qu’eut lieu l’assemblée synodale depuis longtemps annoncée. Tous les évêques de la province y avaient été convoqués. Elle dura du 15 au 31 juillet. Le pape, comme toujours, semblait incliner à la modération et à l’indulgence. Mais les évêques témoignèrent moins de condescendance. Rref aucune solution définitive ne fut prise. On décida seulement que les choses resteraient dans le stalu quo jusqu’à ce qu’un autre concile, un concile plus général, cette fois, eût solennellement prononcé. Ce

concile devait se tenir le 1° mars de l’année suivante. Jaffé, ibid., n. 2916. Mais quelques jours après éclatait un dénoùment inattendu. Lothaire avait quitté Rome au commencement d’août. Arrivé à Lucques, il fut pris d’une fièvre maligne et le 8 il expirait à Plaisance. La cause se trouvait ainsi terminée. Cette brusque solution tirait Adrien d’une situation difficile et l’arrachait « à cette dure alternative, que jusqu’ici il n’avait fait que reculer, ou de toucher aux décrets de son prédécesseur, ou de s’exposer aux colères de Lothaire et peut-être de Louis II ». Lapôtre, article cité plus bas, p. 430.

II. Le schisme de Photius.

Pendant ce temps, une affaire plus importante encore continuait à agiter l’Orient. Photius (voir ce mot), patriarche usurpateur de Constantinople, venait de se déclarer ouvertement contre Rome. Dans un écrit violent, il avait attaqué la discipline et la foi des latins et le pseudo-concile de 867, tenu à Constantinople sous sa présidence, avait prononcé la déposition du pape Nicolas. Il est vrai qu’un revirement politique avait bientôt changé la situation. L’empereur Michel III ayant été remplacé par Basile le Macédonien à la suite d’une révolution de palais, Photius avait été déposé, le 23 novembre 867, relégué dans un couvent, et Ignace, le patriarche légitime jadis dépossédé par lui, rétabli dans ses droits. Mais le parti photien n’avait pas désarmé et l’on pouvait toujours redouter de sa part de nouvelles intrigues. Il fallait, par une décision qui s’imposât à tous, prévenir le retour des troubles et, s’il en était encore temps, arrêter le schisme, qui devenait chaque jour plus imminent. A cette fin, Ignace avait demandé à l’empereur de permettre la réunion d’un grand concile auquel serait invité le Saint-Siège, et une ambassade impériale, dont le chef était le spathaire Basile, était venue informer le pape des événements d’Orient et le prier, au nom de l’empereur et d’Ignace, de terminer définitivement le conflit par un jugement solennel.

Adrien venait de succéder à Nicolas I" r. Ce fut lui qui reçut les envoyés de Byzance. Son attitude vis-à-vis de Photius fut la même que celle de son prédécesseur, et si l’on put craindre un instant, au début, de le voir subir l’influence de l’empereur Louis II, que des raisons politiques avaient amené à se montrer favorablement disposé pour le patriarche intrus, on fut vite rassuré. Dès le 12 février 868, il avait donné l’assurance qu’il respecterait les décisions de Nicolas I er. Vita Hadriani II, c. xix. Le l*r août suivant, il prend le même engagement vis-à-vis de l’empereur Basile et d’Ignace. Il félicite le premier d’avoir rendu son siège au patriarche légitime et l’exhorte à rappeler aussi ses partisans encore en exil. Jaffé, ibid., n. 2908. Il reproche au second, en termes affectueux, de ne lui avoir point fait part personnellement de sa restauration sur le siège de Constantinople et lui demande de lui rendre compte de la situation de son Église. Jaffé, ibid., n. 2909. Bientôt après, au commencement de juin 869, il réunit à Rome, dans la basilique de Saint-Pierre, en présence des envoyés byzantins, un synode de trente évêques. Dans cette assemblée, on ratifie les décrets du pape Nicolas et l’on renouvelle l’anathème contre Photius. On rejette en même temps le pseudo-concile de 867 et l’on en condamne les actes au feu. Mansi, Concil., t. xvi, col. 122-131. Puis, dans des lettres écrites aussitôt après, 10 juin, à Basile et à Ignace, Adrien propose la réunion à Constantinople d’un grand concile que présideraient ses légats, Donal, évêque d’Ostie, Etienne, évêque de Népi, et le diacre Marin, et où l’on confirmerait solennellement les décrets du synode romain. Jaffé, ibid., n. 2913, 2914.

Ce concile fut le VIIIe concile œcuménique, IVe de Constantinople. Voir Constantinople (Conciles de). Il s’ouvrit le 5 octobre 869 à Sainte-Sophie et compta dix sessions, dont la dernière se tint le 28 février 870. On y renouvela les condamnations précédemment portées