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ADAM

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contre, il n’y a pas lieu de s’arrêter à toutes ces légendes orientales, juives ou musulmanes, où l’on détaille les ouvrages qu’Adam aurait composés et les livres mystérieusement tombés du ciel qu’il aurait reçus pour sa direction morale et la connaissance de l’avenir.

Ce qui est plus digne d’attention, c’est la part incontestable qu’occupe au foyer d’Adam la pensée de Dieu et l’esprit de foi. Eve devenant mère pour la première fois attribue à Dieu le fruit de ses entrailles : Possedi hoviinem per Deum. Gen., iv, 1. Plus tard, quand Setb vient la consoler de la mort d’Abel, c’est encore vers Dieu que, dans un élan de reconnaissance, son cœur de mère se reporte : Posuit mihi Drus semen aliud pro Abel, quem occidit Caïn, IV, 25. Les sacrifices, offerts à la divinité, sont chose courante dans cette première génération des fils d’Adam, iv, 3-5.

Repentir d’Adam.

Il suffirait de ces indices pour conclure qu’après son expulsion du paradis terrestre, le premier homme ne fut ni un rebelle ni un désespéré, mais un croyant et un pénitent. Au reste, le livre inspiré de la Sagesse nous fournit, sur le repentir d’Adam et sa justification, un renseignement direct et formel. Nous lisons aux chapitres ix, 19, et x, 1-2 : « C’est par la sagesse, Seigneur, qu’ont été guéris tous ceux qui vous ont plu dès le commencement. C’est elle qui garda celui que Dieu créa seul, qu’il avait formé le premier pour être le père du monde ; c’est elle aussi qui le tira de son pèche’. »

Salut d’Adam.

De cette repentance et de cette rentrée en grâce auprès de Dieu peut-on conclure au salut éternel d’Adam ? Si le texte sacré n’est pas précis sur ce dernier point, c’est du moins le sens qui vient le plus naturellement à la pensée, comme le remarque saint Augustin dans une lettre à Évode. Epist., clxiv, n. 6, P. L., t. xxxiii, col. 711. La sagesse rend Adam l’objet de la complaisance divine, en le faisant sortir de son péché ; effet manqué, assurément, si Adam était ensuite retombé, puis mort dans l’impénitence. En tout cas, ajoutons avec l’évêque d’Hippone que la tradition complète la preuve : « A l’égard du premier homme, père du genre humain, presque toute l’Église s’accorde à reconnaître que Jésus-Christ le tira des limbes, et l’on ne doit pas présumer que cette croyance soit sans fondement. » Quod eam non inaniler credidisse credendurn sit, undecunitjue hoc traditum sit, eliamsi canonicarum Scripturarum hinc eœpressa non proferatur auctoritas. Aussi, quand vers la fin du IIe siècle, Tatien et les encratites ses sectateurs soutinrent qu’Adam était damné, ce sentiment fut vivement réprouvé et rangé dès lors dans le catalogue de leurs erreurs dogmatiques. S. Irénée, Cont. hær., l. I, c. xxviii, P. < ; ., t. vii, col. 690 ; S. Epiphane, Hser., xlvi, P. G., t. xli, col. 839 ; Tertullien, De præscript., c. LU, P. L., t. ii, col. 72 ; De pienit., c. xii, P. L., t. i, col. 1248 ; S. Philastre, De hæres., c. xi.viii, P. L., t. xii, col. 1164 ; S. Augustin, De hæres., n. 25, P. L., t. XLH, col. 30. A ces réprobations de l’erreur se joignent les autres témoignages qui montrent d’une façon positive la croyance des l’ères ou de leur époque au salut d’Adam. Origène, Comment, in Matt/t., n. 120, P. G., t. xiii, col. 1777 ; S. Grégoire de Nazianze, Orat., xxxvii, n. 7, P. G., t. xxxvi, col. 289, où il dit de nos premiers parents : Vlrumque Chris tus passione sua sainte donavit ; Pseudo-Jérôme, Breviar. in Ps. xcvni, P. L., t. xxvi, col. 1123 ; S. Augustin, De peccat. mer., 1. 11, c. xxxiv, P. L., t. xi.iv, col. 185, où il dit d’Adam et d’Eve : Postca juste vivendo…, merilo creduntur per Domini sanguinem ab exlremo supplicio liberati.

Après cet ensemble de témoignages, on s’étonne qu’au xiie siècle, Hupert († 1135), abbé du monastère de Saint-Héribert de Tuy, prés de Cologne, ait pu considérer le salut du premier homme comme douteux, In Gènes., I. III, c. xxxi, P. L., t. clxvii, cul. 318 : Salvatio ejus et a multis libère negatur, et a nullo satis firmiter défend dur. Apparemment il n’avait qu’une connaissance imparfaite de la tradition patristique ; de plus, il était influencé par une idée fausse, qui maintenant serait une hérésie formelle, il ne regardait pas le livre de la Sagesse comme Écriture canonique. Cinquante ans plus tard, Philippe de Harveng († 1183), abbé de Bonne-Espérance, dans le Hainaut, publia une Responsio de salute primi hominis, P. L., t. cciii, col. 593-622, où il montre des indices du salut d’Adam dans divers passages de la Genèse, mais s’appuie surtout sur le livre de la Sagesse, et finalement sur la tradition, c. xxv-xxvii. Les théologiens postérieurs se sont contentés de signaler l’opinion, particulière de Rupert en la réfutant brièvement ; l’antique croyance, restée commune, est considérée depuis longtemps comme une vérité acquise. Il est facile de comprendre les raisons de haute convenance qui la recommandent ; saint Irénée les a développées, l. III, c. xxiii, P. G., t. vii, col. 960, celle-ci entre autres : Jésus-Christ, le nouvel Adam, est venu pour réparer la défaite du vieil Adam et briser la tête du serpent infernal ; assurément la victoire du second Adam serait bien pâle, si le premier Adam, chef physique et moral de l’humanité, restait à tout jamais au pouvoir de l’ennemi.

Culte d’Adam.

Mais quelle a été l’attitude officielle de l’Église en cette question ? Il faut distinguer l’Orient de l’Occident. Les Églises orientales honorent Adam et Eve d’un culte public. Chez les Grecs, leur fête se célèbre le dimanche qui précède la Nativité de Notre-Seigneur ; de plus, le 25 mars, Feria v ; » in Parasceve, il y a mémoire d’Adam créé, déchu, mort et enseveli. Dans les codices syriaques manuscrits du Vatican, on trouve marquée au 6e jour du mois de nisan, la mort de notre Père Adam, puis à la 3e férié dans l’octave de Pâques, la commémoration d’Abraham, d’Isaac, de Jacob, d’Adam, d’Eve, de Seth et d’L’nos. L’Église arménienne célèbre la fête des saints patriarches Adam, Abel, Seth, etc., le samedi qui suit le premier dimanche après la Transfiguration, ou 7e dimanche après la Pentecôte. Dans l’année ecclésiastique des coptes, la commémoration d’Adam et d’Eve est placée au 6e jour du mois pharemuthi ou avril. Voir pour tous ces points Nilles, Kalendarium manuale idriusque Ecclesise Orieidalis et Occidentalis… auctius ali/ue emendatius, Inspruck, 1897, t. il, p. 253-251, 384, 541, 591, 717. Ajoutons enfin qu’Adam a sa chapelle sur le mont du Calvaire.

L’Église romaine n’a pas consacré publiquement le culte de nos premiers parents. Quelques martyrologes latins font cependant mémoire d’Adam, soit le 25 mars, soit le 21 avril, soit encore le 23 août. Voir Acta sanctorum, t. viii, p. 532, 511 ; t. xi, p. 260 ; Usuardi Martyrol. Auctaria…, au 25 mars et au 23 août, P. L., t. cxxiii, col. 873, 871 ; t. cxxiv, col. 394. V. Sépulture d’Adam. — Le premier homme mourut à l’âge de 930 ans : Et factum est omne tempus quod vixit Adam, anni nongenti triginta, et mortuus est. lien., v, 5. Où fut-il enterré ? La sainte Écriture ne le dit pas, et la tradition n’a rien de fixe sur ce point. La question est, du reste, complexe et liée à plusieurs problèmes dont les données nous échappent. Ainsi, où se trouvait le paradis terrestre ? Adam, après en avoir été chassé, resta-t-il dans les environs, ou s’en alla-t-il au loin ? Ses fils Penterrèrent-ils là où il mourut, et ses ossements restèrent-ils définitivement au lieu de sa sépulture primitive ? Les réponses à tous ces problèmes sont aussi divergentes qu’incertaines.

V. SENTIMENT QUI PLACE LA SÉPULTURE D’ADAM AUX ENVIRONS DU PARADIS TERRESTRE.

Les uns se contentent de dire que vraisemblablement Adam resta dans les environs du paradis terrestre, qu’il v passa sa vie et y mourut. Voir, entre autres, Joli. Nicolai, De sepulchri