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ABSTIN. CHEZ LES GRECS — ABSTIN. CHEZ LES RUSSES

a) les mercredis et vendredis qui se rencontrent entre Noël et le 4 janvier inclusivement, y compris le jour de la fête ; b) le jour de la fête de l'Épiphanie lorsque ce jour est un mercredi ou un vendredi ; c) les mercredis et vendredis qui précédent le dimanche de la Septuagésime, appelé chez les grecs dimanche de l’Enfant prodigue ; ce relâchement de l’abstinence à ces deux jours est motivé, disent les auteurs grecs, par cette raison assez singulière qu’on veut condamner par là le jeûne rigoureux pratiqué alors par les arméniens et auquel on a attribué faussement une origine ridicule, Nilles, Kalend., Inspruck, 1885, t. ii, p. 6-11 ; d) le mercredi et le vendredi de la semaine de Pâques ; e) le mercredi et le vendredi de la semaine de la Pentecôte. À noter encore ici une extension assez considérable de la dispense de l’abstinence apres le grand carême, en usage au moins chez certains grecs, en particulier chez les melchites unis : ils l’étendent à tous les mercredis et à tous les vendredis depuis Pâques jusqu'à l’Ascension. Ils peuvent s’autoriser en cela de l’exemple de l'Église de Jérusalem qui, au ive siècle, paraît n’avoir pas pratiqué l’abstinence depuis Pâques jusqu'à la Pentecôte. S. Sylviæ peregrinatio, Bibliot. dell’Accad. stor. giur., Rome, 1887, t. iv, p. 88.

L’abstinence est mitigée dans les jours de fêtes ci-après énumérées, lorsqu’elles arrivent un mercredi ou un vendredi en dehors des quatre carêmes, ou un autre jour pendant la durée de ces mêmes carêmes ; la viande seule reste rigoureusement prohibée, mais il y a permission d’user des autres aliments qui, sans cette dispense, tomberaient sous la loi. Ces fêtes sont : 8 septembre, Nativité de la sainte Vierge ; 14 novembre, fête de saint Philippe, apôtre ; 21 novembre, Présentation de la sainte Vierge ; 7 janvier. Commémoration de saint Jean-Baptiste ; 2 février, Présentation de Notre-Seigneur au Temple ; 25 mars, Annonciation de la sainte Vierge ; 24 juin, Nativité de saint Jean-Baptiste ; 29 juin, fêtes des saints apôtres Pierre et Paul ; 6 août, Transfiguration de Notre-Seigneur ; 15 août, Assomption de la sainte Vierge, et le dimanche des Rameaux. Il va de soi qu’il n’y a aucune abstinence lorsque ces fêtes (ce qui est possible pour plusieurs d’entre elles) arrivent un jour où l’abstinence n’est pas prescrite.

III. Abstinence monastique. — Il ne sera pas hors de propos de dire un mot de l’abstinence monastique dans cette même Église dont tous les religieux suivent la règle de saint Basile. Pour eux l’abstinence ou xérophagie est la régle générale ; les jours où il leur est permis de se relâcher en partie seulement de sa rigoureuse observation ne sont que l’exception. Toutefois, la permission d’user d’aliments interdits par la loi monastique de la xérophagie, ne s'étend jamais à la viande, qui reste toujours prohibée, sans exception possible. Lors donc que les rubriques indiquent qu’il y a solution complète de l’abstinence où permission d’user de tous aliments, cela signifie, pour les religieux, qu’ils peuvent se nourrir, ces jours-là, de poissons, d'œufs, de laitage, d’huile et de vin, mais jamais de viande. Ces jours de solution totale sont : du 25 décembre au 4 janvier ; la fête de l'Épiphanie ; la semaine qui précéde la Septuagésime ; la semaine de Pâques et celle de la Pentecôte. Il y a en outre un certain nombre de jours de fêtes qui tiennent le second rang après celles qui viennent d'être indiquées, et dans lesquelles il est permis aux moines d’user d'œufs, de laitage, de poisson, d’huile et de viii, si elles tombent un jour ordinaire, de poisson, d’huile et de vin seulement, si elles se rencontrent en un jour d’abstinence pour tous. Enfin il y a encore d’autres fêtes d’un moindre degré, dans lesquelles l’usage de l’huile et du vin est permis aux religieux : il y en a un plus grand nombre de cette dernière catégorie que des premières. Typica varia, dans Pitra, Spicilegium Solesmense, Paris, 1858, t. iv, p. 415 sq.


IV. Histoire des temps d’abstinence dans l’Église grecque. — Disons maintenant un mot, pour terminer, de l’origine des diverses abstinences prescrites et encore conservées dans l'Église grecque. La plus ancienne de toutes incontestablement est celle qui est attachée aux mercredi et vendredi de chaque semaine. La Didaché en parle, viii, 1, Funk, Doctrina duodecim apostolorum, Tubingue, 1887, p. 23 ; ce qui permet de rattacher cette observance à la tradition apostolique : il est vrai que ce document, ainsi que le Pasteur d’Hermas, Sim., V, 1. P.G., t.ii, col. 958, et Funk, Opera Patrum apostolicorum, Tubingue, 1887, p. 450, qui ne fixe pas les jours, mentionnent le jeûne et non expressément l’abstinence, mais celle-ci était inséparable de celui-là, au point que l’usage s’est conservé en Orient de se servir encore aujourd’hui du non de jeûne pour désigner la simple abstinence, même quand elle n’impose pas la monophagie.

Quant à l’abstinence du grand carême, il est également certain que sa pratique remonte à la plus haute antiquité, bien que la Didachè n’en fasse pas mention. Il en est déjà question au iie siècle, au moment de la querelle sur la célébration de Pâques. Mais il y a eu à l’origine des divergences pratiques assez notables relativement au nombre des jours du carême. Au ive siècle, la mention de la sainte quarantaine est déjà très fréquente, et sainte Sylvie nous apprend qu'à la fin de ce même siècle on observait à Jérusalem un jeûne de quarante jours (comme chez nous, remarque-t-elle), répartis en huit semaines, car on ne jeûnait en Orient ni le samedi ni le dimanche, excepté le samedi saint. Voir Peregrinatio, ibid., p.85. Saint Cyrille de Jérusalem, Procathec., n. 4, et Cat., iv, n. 3, 'P. G., t. xxxiii, col. 341, 457 ; Eusèbe, De solemnitate paschali, n. 4, 'P. G., t. xxxiv, col. 697 ; les Canons apostoliques (can.68e), Mansi, Concil. ampliss. coll., Florence, 1759, t.i, col. 44, et les Constitutions apostoliques, I. V, c. xiii, 'P. G., t. i, col. 860, parlent également d’un jeûne de quarante jours ; ce jeûne était plus rigoureux la semaine sainte, pendant laquelle seulement les Constitutions apostoliques paraissent imposer la stricte xérophagie. L. V, c. xv, xviii, 'P. G., t.i, col. 880-889. L’abstinence du carême dit des saints apôtres et de ceux qui précèdent les fêtes de l’Assomption et de Noël n’est devenue obligatoire qu'à une époque beaucoup postérieure. On n’en trouve pas de trace dans les canons des conciles antérieurs au viiie siècle ; tout porte à croire qu’elle a été introduite par la coutume et qu’elle a passé des monastères dans la pratique des fidèles. Saint Nicéphore, patriarche de Constantinople au commencement du ixe siècle, en fait cependant mention dans son Typicon, comme d’une loi déjà existante et obligatoire pour tous. Pitra, Juris Eccl. Græc. hist., Rome, 1868, t. ii, p. 327.

Quoi qu’il en soit de cette origine, il est bon de constater en terminant que, malgré les réductions pratiquées dans le nombre des jours d’abstinence, il en reste encore assez aujourd’hui pour atteindre le chiffre minimum de 180, ce qui fait un jour d’abstinence sur deux pour l’année entière. Aussi ne manque-t-il pas d’auteurs orientaux qui réclament une diminution nouvelle en rapport, disent-ils, avec l’état actuel des populations pour lesquelles il y aurait là une charge trop lourde. Ces doléances se produisent aussi bien chez les grecs unis que chez les grecs non unis, et, tout récemment, une brochure arabe sur les réformes à introduire dans l'Église melchite unie, n’hésitait pas à dire que ces abstinences trop nombreuses ne sont plus bien observées par les fidèles et ne peuvent plus l'être.

P. Michel.

III. ABSTINENCE chez les russes et permission d’user de divers aliments (Vozderzanie i Razréchénie). Il y a dans la pratique de l'Église russe neuf degrés d’abstinence, avec prohibition ou permission d’user de divers aliments. Les voici : — 1. Abstinence complète ou grand jeûne (Post), le vendredi saint. — 2. Nourriture