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APPÉTIT


petit, l’amour, capable de se proportionner au degré d'être : Nam velut amores corporum momenta sunt ponderum, sive deorsuni gravitate, sive sursum levilate nitantur. Ita enim corpus pondère sicut animus amore fertur quocumque fertur. S. Augustin, De civ. Dei., 1. XI, c. xxviii, P. L., t. xli, col. 312. Cet appétit échappe à l’empire de la raison humaine. S. Thomas, Sum. theol., Ia-IIæ, q. xvii, a. 8. — 2° L’appétit animal ou appétit des vivants comme tels, appelilus animalis. Le mot français équivalent serait sans doute le mot vital. Nous disons comme tels parce que, dans les vivants, se rencontre l’appétit naturel, l’appétit des puissances végétatives par exemple ou l’appétit des sens et des puissances intellectuelles mêmes pour leur objet. L’appétit animal proprement dit ne se rencontre que dans les êtres vivants doués de connaissance. Grâce à lui l'être vivant désire les choses étrangères à lui, qu’il saisit par la connaissance soit sensible soit intellectuelle, et non seulement les objets auxquels il est destiné de par sa forme naturelle. S. Thomas, Sum. theol., I a, q. lxxx, a. 1. Son objet n’est pas restreint, comme celui de l’appétit naturel, aux convenances d’une puissance particulière, mais s'étend à ce qui convient à l’animal tout entier : quo appetitur aliquid non ea ratione qua est conveniens ad actum hujus vel illius potentiæ ; utpote in visu ad videndum et auditu ad audiendum ; sed quia est conveniens simpliciter anhnali. Ibid., ad 3um. Cette sorte, d’appétit forme une puissance spéciale, ibid., in corp., parce qu’il regarde un bien déterminé auquel la nature qui lui sert de principe n’est pas destinée par sa propre constitution mais grâce à l’intermédiaire de la connaissance, S. Thomas, IV Sent., 1. III, dist. XXVII, q. i, a.2, sol., et donc par une action propre et autonome dont l’animal total a l’initiative, Ibid. ; Deverit., q. xxii, a. 3 ; Sum. theol., I a II 16, q. vi, a. 1. De là résulte cette conséquence que, tandis que l’appétit naturel est uniforme et nécessaire, dirigé par la connaissance supérieure d’un autre être, S. Thomas, Sum. theol., I a, q. vi, a. 1, ad 2um, l’appétit animal est diversifié, autonome (liberum, dit saint Thomas, en entendant ce mot dans le sens large), ne devant sa direction qu'à l'âme dont il est une puissance. S. Thomas, IV Sent., ibid. ; De verit., q. xiv, a. 3, in corp., ad 2um et ad 3um.

Toute activité émanant d’une puissance à laquelle elle se conforme en nature, les appétitions se distingueront à leur tour en appétitions naturelles et animales.

II. APPLICATIONS TBÉOLOGIQUES.

Dans la théologie naturelle la définition de l’appétit naturel (en tant que s’opposant à l’appétit animal) sert à la solution de la question : Utrum omnia ipsum Deum appelant. S. Thomas, De verit., q. xxii, a. 2. Rapporté aux trois principes constitutifs de la nature humaine, à savoir l'être, l’animalité et la rationalité, l’appétit naturel se divise en trois tendances générales qui servent à déterminer les principes premiers de la loi naturelle. S. Thomas, Sum. theol., Ia-IIæ, q. xciv, a. i. — Dans la théologie de l’incarnation la notion de l’appétit sert à déterminer quelques-unes des défectuosités indispensables de la nature humaine que le Christ a voulu prendre sur lui pour que son incarnation lïii totalement véritable. Sum. theol., Ill a, q. xiv, xv. — Dans la théologie de l'état des bienheureux, elle reçoil diverses limites, de la différence de destination des corps naturels et des corps glorieux. s. ï i um. theol., Suppl., q. i.xxxi, a. I ; q.

i.xxxii. — Noter pour la résurrection des corps le rôle de l appétit naturel de l'âme pour son corps : quidam corpus administrandi. Sum. theol., I" II", q. iv, a. ô.

il. Appétit sensith i/i appétit volontaire. — I. doctri su PBiLOSOPBioi i. - l » L’appétit animal se subdivise en deux genres de puissances : l’appétit sensitifel l’appétil volontaire. La raison analytique et formelle de cette diversité est la présence à l’origine de l’appétition de

deux genres de connaissance : la connaissance sensible et la connaissance intellectuelle. S. Thomas, Sum. theol., I a, q. lxxx, a. 2. Sa raison synthétique et finaliste est la hiérarchie des êtres et des appétitions correspondantes. De verit., q. xxii, a. 4.

2° L’appétit sensitif diffère de l’appétit volontaire au triple point de vue de la connaissance dont il procède, de l’autonomie qui lui est intrinsèque et de la matérialité de son sujet. — La connaissance qui provoque l’appétit sensitif est la connaissance sensible, principalement l’imagination et l’instinct. Cette connaissance est imparfaite en ce qu’elle représente simplement le bien qui est l’objet de l’appétit, sans réflexion sur sa qualité de fin de l’activité et sur le rapport de l’appétit à cette tin, S. Thomas, Sum. theol., Ia-IIæ , q. vi, a. 2. La connais sance intellectuelle et parfaite parce qu’elle connaît cette relation. Ibid., et IV Sent., 1. III, dïst. XXVII, q. i, a. 2, sol. — De cette première différence résulte la seconde. Aussi tôt qu’il connaît un bien sensible de l’animal, l’appétit sensitit entre en mouvement sans délibération. Il n’a donc de volontaire que dans un sens large, en tant que son acte procède non d’une impulsion extérieure comme l’appétit naturel, mais d’une forme interne vivante qui es ! la propriété de l’animal. La conséquence de cette restriction est que l’animal doit trouver tout préparé ce qui lui est nécessaire : et c’est précisément à cause de cela qu’il n’a qu’une ombre de liberté. IV Sent., loc. cit., §Sed inclinatio appelitus sensilivi parlim, et De verit., q. xxii, a. 4 ; q. xxiv, a. 2 ; q. xxv. (Pour la confirmation expérimentale de ces vues, voir Fabre, Souvenirs enlomologiques, 6 séries, Paris, 1879-1900.) L’appétit sensitif juxtaposé dans l’homme à l’appétit volontaire a les mêmes caractères, un peu modifiés cependant par l’influence de la raison sur l’instinct humain, appelé pour ce motif raison particulière. La liberté est au contraire parfaite dans l’appétit intellectuel, puisque le principe de la liberté, la connaissance délibérée, Sum. theol., I a, q. lxxxiii, a. 1, est son point de départ. L’homme se propose en toute vérité des fins et ordonne, dispose à son gré les moyens d’y parvenir. Son appétit rationnel est formellement libre et proprement volontaire. Sum. theol., I a, q. wi ; IV Sent., lue. cit. ; De verit., q. xxii et xxiv. — Ce pouvoir de l’appétit volontaire n’est possible que grâce à son immatérialité, qui, en l'éloignant de la nature des choses mobiles, le rapproche de la nature purement active des moteurs. La matière est en effet la cause propre du changement comme la forme est le principe propre de l’action. La nécessité de l’appétit sensitif, plutôt agi qu’agissant, selon sain ! Jean Damascène, vient de l’organe corporel, qui est la condition de son existence et de son acli ité. S.Thomas, De verit., q. xxii, a. i, § Animal enim. Voir Volonté.

3° Dans l’homme, l’appétit sensilif obéit à l’appétil volontaire. Mais cette sujétion n’est pas absolue ; le pouvoir de la volonté sur l’appétit sensilif est assimilé non pas au pouvoir despotique qui régit des esclaves, mais au pouvoir politique qui régit des citoyens. La raison de cette sorte de domination est la spontanéité de l’appétit sensitif qui, ayant son motif propre d’action, encore qu’il l’ait sans le raisonner, peu ! prévenir l’aclion de la volonté ou même s’y soustraire, en raison des dispositions de son organe, lesquelles échappent à l’empire de la volonté', s. Thomas, Sum. theol., l*, q. lxxxi,

a. 2 ; [' II", q. xvii, a. 7 ; Devrril.. q. xxv, a. 1. Les

iquencéi morales il' 1 ce1 empire de la volonté sur

l’appétil sensitif sont nombreuses. L’appétit sensitifpeuf

acquérir des habitudes rati telles, S. Thomas, Sum.

theol., I 1 II", q. i-, a. 3 ; vertus ou vices, ibid., q. i.vi. a. i : ([. i.xxiv, a. 3, A noter que l’appétit sensitif pai lui-même ne peut pécher mortel lerm ni il a cependant, à cause de sa connexion habituelle avec la raison dans la raison particulière, l’initiative de certains péi nés véniels. Le péché mortel de sensualité a donc poui