Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 1.2.djvu/75

Cette page n’a pas encore été corrigée
1645
1646
APOSTOLIQUES (PÈRES) — APOTACTIQUES

patrie, se considèrent comme des étrangers ici-bas. Fidèles aux lois, époux modèles, pauvres mais généreux, aimant ceux qui les persécutent et rendant le bien pour le mal, ils sont toujours heureux et jouent dans le monde le rôle de l’âme dans le corps : 071sp cTiiv sv iT(ô[j.aT[’iuy_vï, tout’Etfflv âv xô<tu, w Xpioriavo : ’. Sans eux, le monde s’écroulerait. Epist. ad Diogn., VI.

G. La liturgie. — Les Pères apostoliques ne font allusion qu’à la liturgie eucharistique, et encore très discrètement. C’est le dimanche, la x’jptaxr, , un nom nouveau dans la langue chrétienne, Did., xiv, p. 42, qu’on se réunit pour participer au x), io-(j.a etau uoTr É piov, après s’être préalablement confessé et réconcilié avec ses ennemis. Barnabe appelle ce jour le huitième et donne la raison de ce choix : c’est le jour où NotreSeigneur est ressuscité. Barn., xv, p. 48. Ce fut le jour par excellence, qui coexista d’abord avec le sabbat et finit par le remplacer, dès le commencement du IIe siècle. Saint Ignace recommande, en effet, de ne plus observer le sabbat, mais le dimanche. Ad Magn., ix, p. 198.L’agape faitencore partie du service eucharistique.

La Didaché, qui signale comme prière quotidienne le IlâTep f^wv ô èv T(ô oûpocvô), viii, p. 24, nous offre de courts modèles de la manière de faire l’action de grâces, le dimanche, sur le pain et le vin eucharistiques, ix. Clément finit son Epitre par une longue et magnifique prière qui rappelle le ton de nos préfaces et qui, si elle n’est pas un écho officiel de la prière universelle des synaxes, reste en tout cas un beau spécimen de la prière publique et servira de moule aux futures litanies. 1 Cor., LIX-LXI. A remarquer la prière pour les pouvoirs constitués, bien que persécuteurs, dont parlent Clément, loc. cit., et Polycarpe. Ad l J hilip., xii, p. 280.

7. Polémique et apologétique.

Les Pères apostoliques ne sont rien moins que des polémistes. Cependant l’auteur de VÉpitre à Diognète, il, p. 310, s’en prend à la forme fétichiste du polythéisme, et reproche au judaïsme ses sacrifices, sa distinction des mets, sa pratique superstitieuse du sabbat, sa jactance au sujet de la circoncision, ses jeûnes, ses néoménies, qu’il qualifie de puérilités ou de folie, in. Barnabe, dur et sévère contre les Juifs, montre qu’ils s’en tiennent au sens littéral et charnel sans s’élever au sens spirituel et à la signification morale de leurs observances, vin-x. Hermas rejette hors de l’Eglise les gnostiques insensés, ïçpoveç, qui veulent tout savoir et ne connaissent rien à fond, OîV.ovtî ; ttï’/t » ytvtioxstv xoù oùSèv o)to ; YiyvajTxouat. Simil., ix, 22, p. 510. Mais ce ne sont là que des indications sommaires. Le polythéisme trouvera d’autres adversaires beaucoup plus puissants. Le judaïsme intransigeant, Imitant saint Paul d’apostat et se perdant dans la secte des ébionites, aura de vigoureux antagonistes. Quant au gnosticisme, le grand danger du christianisme au n< siècle, c’est [renée et Tertullien qui lui barreront le passage. Il n’en est pas moins vrai que l’erreur et l’hérésie cherchent à se glisser dans les communautés chrétiennes d’Asie. C’est le même mouvement d’idées, mais renforcé, plus habile et plus dangereux que du temps des apôtres. Le docétisme, d’une part, substitue un fantôme à l’humanité de Jésus-Christ : il nie son origine et sa naissance humaines ; il ne voit dans les événement de sa vie, baptême, souffrances, passion, mort et résurrection, que des irréalités, des apparences. Et, d’autre part, le judaïsme cherche à maintenir ses positions et à imposer ses pratiques. C’est en face de ce il mble courant que se trouve suint Ignace. I)ans ses Epitres aux Tral liens et ; mx Smyrniotes, il attaque plus particulièrement le premier, en affirmant la réalité sensible de la nai —une, de la vie, de la mort et de la ion du Christ, hausses Épitres ; mx Magnésiens et, nix Philadelphiens, il s’en prend plus spécialement au second, en dénonçant l’inutilité des observances, le danger des fables et des mythes aux interminables

généalogies d’anges, en recommandant de ne pas écouter quiconque prêche le judaïsme, Ad Pliilad., vi, et de repousser le mauvais ferment, vieilli et aigri. Ad Magn., x. Mais on voit qu’il ne vise pas le docétisme particulier de Simon, de Cérinthe ou de Saturnin, mais plutôt une espèce de docétisme à forme judaïsante, une seule et même erreur, propre à la province d’Asie, mâtinée de gnose docète et de judaïsme intransigeant, complètement étrangère au plan du Père, prônée par des docteurs hétérodoxes qui parlent autrement que le Christ, menacent l’unité et engendrent la mort.

Le seul des Pères apostoliques qui ait fait valoir un argument en faveur du christianisme est l’auteur de VÊpUreà Diognète. Si Dieu a tant lardé à paraître, c’est, dit-il, pour nous convaincre expérimentalement de notre indignité, de notre impuissance à conquérir le royaume de Dieu, et pour nous prouver son amour en nous appelant à la vie, et sa puissance en nous aidant à l’obtenir par la manifestation de son Verbe, par la foi en sa parole. Epist. ail Diogn., ix, p. 321. Et c’est là le début de la thèse sur la nécessité de la révélation. Après avoir écarté le polythéisme et le judaïsme, l’auteur de l’Épître montre le rôle du chrétien dans le monde, trace le tableau de la vie chrétienne, et conclut à la divinité du christianisme ; TaÛTa àv6poj7Tou o-j Soxet Ta epya" TaÛTa 8’jvau.tç ÊiTTi 0EOÛ. TaÛTa Tr ( ; 7ra ? o-j ? t’a ; autoû 3siyu, aTa, VII, p. 322. Et c’est ainsi que l’auteur de l’Épître à Diognète sert de passage des Pères apostoliques aux Pères apologistes.

I. Éditions.

Migne, P. G., 1. 1, ii, v ; Hefele, Opéra Patr. apostol., 4e édit., Tubingue, 1855 : Dressel, Patr. apostol. opéra, Leipzig, —1857 ; édition revue et augmentée par Gebhardt, Harnack et Zahn, Patr. apostol. opéra, Leipzig, 1877, 1894 ; Jacobson, Patr. apostol. quæ supersunt, 2 in-8°, 4e édit., Oxford, 1863 ; Funk, Opéra patr. apostol., Tubingue, 1881 ; Doctrina duodec. Apost., Tubingue, 1887 ; Patres apostolici, 1901.

II. Travaux.

Hilgenfeld, Die apostolischen Voter, Halle, 1853 ; Freppel, Les Pères apostoliques, Paris, 1859 ; Donaldson, dans Critical histortj… I. The apostolical fathers, Londres, 186’i ; Sprinzl, Die Théologie der apostolischen Voter, Vienne, 1880 ; Lesquoy, De régi mine Ecclesise juxta Patrum apostol. doctrinam, Louvain, 1881 ; Lightfoot, The aposlolic fathers, Londres, 1800 ; Smith et YVace, Dict.of christ, biography, article Apost. Fatliers.

G. Bareille. APOTACTIQUES. Hérétiques du iiie et du ive siècle, de la secte des encratites. Ils se donnèrent le nom d’apotacliques, c’est-à-dire de renonçants, parce qu’ils renonçaient au mariage et à la propriété, à l’exemple des apostoliques qui se disaient parfois apotactiques, comme d’autres se dirent cathares, c’est-à-dire purs par excellence. Épiphane, Hær., lxi, P. G., t. xli, col. 1040. Comme les apostoliques, ils professaient des principes d’orgueil, d’ascétisme outré, d’intolérance. Ils avaient les mêmes attaches gnostiques ; car saint Basile, en 375, signale leur horreur du mariage et ajoute que, à l’exemple de Marcion, ils regardaient la créature comme mauvaise et Dieu comme l’auteur du mal, Epist., cxcix, 47, P. G., t. xxxii, col, 732. Ils finirent par entrer dans le courant manichéen, bien qu’ils s’en défendissent pour échapper à la vindicte des lois ; car Théodose le Grand, en 381 et 383, ne se laissa pas prendre à leurs subterfuges et les engloba nominativement dans la condamnation du manichéisme. Nec se sub simulatione fallaciæ eorum scilicet nominum, quibus plerique, ut cognovimus, probatæ fidei et propositi castioris dici ac signari volunt, maligna fraude defendant ; cum præsertim nonnullos ex his Encralitas, Apotactitas, Hydroparastatas vel Saccophoras nominari se velint, et varietate nominum diversorum velul religiosæ professionis officia mentiantur : eos enim omnes convertit, non professione defendi nominum, sed notabiles atque execrandos haberi scelere sectarum. Codex Theodos., XVI, tit. v. leg. 7 et 11.

Dictionnaire d’archéologie chrétienne, t. i, col. 2615-2626.

G. Bareille.