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àUGUSTINISME (DÉVELOPPEMENT HISTORIQUE DE L')

Toute détermination est enlevée < la créature peur être

il.. n il ci Dieu. Lui seul, il est l’auteui ii<- tons lechoix il. I. volonté, seul l’auteur de tous lea crimes, et la seule raison pour laquelle on ne doit pa dire qu’il pèche, c est qu’il est au-dessus de toute loi. Cette doctrine, exprimée parfois une brutalité et une impudeur que notre langue oe tolère pas (voir Zwingle, De providentia, c. vj cf. Môhler, Symbolik, trad. franc., 1852, t. i, p, '.iW>~, le fond même du protestantisme. I. indignation publique a forcé les chel er les formules trop sincèrei du

début, mais la doctrine restai ! la même. Toujours la volonté humaine est pour eux le coursier 3e Luther : celui qui le monte, le mène, malgré lui, où il veut. Ou encore pour Bèze, la volonté n’est qu’un instrument entre les mains de Dieu qui le remue à son gré ; dire que Dieu permet le péché, c’est un blasphème ; Dieu fait le péché par son instrument. Mélanchthon lui-même, malgré son tempérament modéré, a écrit les paroles justement anathématisées à Trente, sess. VI, Deju$tif., can.6 : Constat Deumomniafacere, non permissive, sed patenter i. e. utsil ejus proprium opus Judée proditio, sirut Pauli vocatio. Cf. Chemnitz, Loci Hieol., édit. Leyser, 1615, p. 173 ; Mohier, 07>. ci*., p. 30-39. Mélanchthon rougit plus tard ou eut peur de cette franchise, et fit disparaître ces mots, dit Môhler, des éditions postérieures a 1525 de son commentaire In Epist. ad Rom. Quant à Luther, il a consacré tout le De serra arbitrio à formuler, avec sa fougue ordinaire, ce déterminisme absolu imposé par Dieu à l’impie comme au juste : Deus… necessario movet etiam et agit in Satana et impio, vitium est in instrumentis. Voir les extraits réunis par Loofs, Dogmengesch., p. 377. Le degré le plus sublime de la foi, dit-il, c’est de croire à la justice de ce Dieu, qui sua voluntate nos necessario damnabiles facit. Telle est la doctrine que Calvin appelle « douce et savoureuse an fruit qui en revient » . Instit. chrest., 1. III. c. xxi, col. 155.

2. État primitif d’Adam.

D’après [les réformateurs, Adam, avant sa faute, avait avec la justice, un empire absolu sur les sens :.< même toutes les parties organiques étaient enclines et promptes à obéir chacune à tout bien. » Calvin, Instit. chrest., 1. I, c. xv, n. 8. col. 222. On peut signaler entre Luther et Calvin deux diergences : a) La justice originelle, d’après Luther, est un don purement naturel, ou même essentiel à l’homme, de essentia hominis, dit-il, In Gen., c. ni ; il ne veut point entendre parler d’un donum superadditum, c’està-dire de privilèges surnaturels. La distinction de deux ordres, naturel et surnaturel, lui semble absolument étrangère, et la justice n’est pour lui que le pouvoir de connaître et d’observer la loi naturelle. Calvin, au contraire, parle de dons naturels et d’autres donnés g outre sa nature » ou surnaturels, Instit. chrest., 1. ii, c. n. n. 16, col. 317, mais il est peu aise de savoir ce qu’il entend par là.

b) Une autre divergence concerne la liberté. Avant le péché, Adam était-il libre'.' Non. répond Luther, ni Adam, ni aucune créature n’est et ne peut être jamais libre. La liberté est essentiellement l’apanage i'^ « -l h-ii" de Dieu, doni la causalité s'étend absolument et irrésistiblement à tout être : omnia incommutabili et œterna infallibilique voluntate et providet, ri proponit et facit. Hoc fulmine sternituret conleritur penitus liberum arbitrium. De servo arb., Oper. lai., édit. léna, toi. 170. Calvin, au contraire, si on s’en tient a ses formules, proclame ouvertement la liberté d Adam t In ceste intégrité l’homme avait franc-arbitre, par lequel, s il eut voulu, il eusl obtenu vie éternelle. Instit. chrest., I. 1, c. xv, n. 8, col. 22'.'. ci. Confession de foi helvétique, c. i.. n. 1, Montpellier. 1825, p. 18. Mais i., diveif n’est qu’apparente : l’explication ajoutée par Calvin, loc. rii. montre bien que cette liberté n’existe plus, dés qu’on envisage la prédestination île Dieu, qui gou me Adam comme ton Cf. Instit. clirett.,

I. III, c. XXIII, n. 7.

3. L’hontme déchu i-t mutilait-, n <<r tu nature aine par la faute d’Adam. — Il nous. -t très diffii il., a nous catholiques, de saisir la conception pr tante da péché originel ; a paît l’existence et l’or. adamique d.- ce péché, elle n’a aucun rapport avec la théologie de saint Paul et de saint Augustin qu’elle prétend interpréter. Voici les principaux traits < ! qu’on peut appeler l’anthropologie de l’homme tombé d après les réformateurs. « La nature blessée et essentiellement mauvaise constitue le péché originel. — Ce péché, pour Luther et Calin. n’est point la dégradation morale, la tache imprimée à L'âme de tout fils d’Adam par un.- faute paternelle moralement imputable à chaque membre de la famille. Ce n’est pas le dépouillement de la grâce et des autres dons surnaturel-, privilèges de 1 état d innocence dont les lils d’un criminel sont légitimement dépouillés ; Luther nous a dit que la justice originelle était strictement due a l homme. Ce n’est pas même la concupiscence, entendue dans le sens ordinaire du mot, comme la lutte des instincts bas et égoïstes contre les tendances vertueuses de l'âme. Toutes ces idées sont incomprises chez eux. Mais le péché originel est un bouleversement profond et total dans l'économie humaine, c’est l’altération ph>sique de la substance même de notre ârne : nos facultés, intelligence et volonté, sont, sinon entièrement ; dues, du moins physiquement mutilées, impuissantes il radicalement enchaînées au mal. D’un coté, toutes les forces religieuses sont anéanties : l’homme a perdu cette justice qui lui était naturelle. De l’autre, une lorce secrète l’entraîne fatalement, toutes les lacult. sont en proie à un déchaînement de tous les instincts bas et grossiers. L’homme est donc devenu un être essentiellement mauvais en soi et dans ses actes.

b) Kn particulier, la liberté ne peut plus être qu’un mot sans valeur ; elle a complètement sombré dans le naufrage ; les professions de foi n’hésitent point à le proclamer. Cf. Concordia, part. II. Solida declar.. n. De libéra arb., p. Gôi sq. : Confession de foi de la Rochelle, n. 9, p. 5 : « La volonté est du tout captive sous péché ; en sorte qu’elle n’a nulle liberté à bien, que celle que Dieu lui donne. Mais il v a plus : Luther avait nié la liberté dans Adam innocent ; après la chute, ce n’est pas seulement la liberté qui est ruinée, c’est même toute activité de la volonté ; l’homme n’est plus conçu par lui que comme un tronc sans vie : telle est l’origim formules effrayantes par lesquelles il décrit l’impuissance absolue de la nature déchue.

c) Le résultat est que par la chute l’homme est constitué- à l'état de péché permanent et vivant. Les catholiques conçoivent le péché originel comme une faute passée, commise physiquement par Adam, et moralement transmises ses lils. avec une source de tentations dans notre nature. Mais pour les réformateurs, le péché originel n’est pas un péché, c’est le péché, et le pèche permanent, vivant en nous, et taisant jaillit notre nature radicalement corrompue et mauvaise une source a jet continu de nouveaux péchés. Car notre elle étant mauvais, tout acte de nous nent maux. n-. Aussi l cs protestants ne parlent-ils péchés de l’homme, mais seulement du péché qui nous constitue et souille tout. De la surgissent les |

les plus épouvantables de Luther, que même dans un acte de charité parfaite, l’homme pêche mortellem qu’il agit aue sa nature viciée. De la cet autr. radoxe que ce péché est indélébile, indestructibli demeure tout entier après la justification et 1< : bien qu’il ne soit pas imputé. El la raison en est dente au point de vue prolestant : tous les pi pendent essentiellement île ce qui est in nous c’est à-dire de cette nature entièrement viciée dans son