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APOLOGISTES (LES PERES)


logique manque de précision ; les concepts d’hypostase ou de personne ne sont pas fixés ; la nature des relations entre les personnes divines n’est pas l’objet d’un examen approfondi ; c’est dire que le langage des apologistes est parfois obscur ; que leurs essais d’explication sont incomplets ou erronés. Ils ne parlent de la Trinité qu’en passant, sans la moindre prétention à donner la clef du mystère, mais d’après la formule baptismale et le symbole. Ils proclament l’existence de trois êtres divins, l'éternité du Verbe, sa génération avant le temps et son incarnation, la divinité du Saint-Esprit, l’inspirateur des prophètes : trois êtres, numériquement distincts et ne faisant qu’un Dieu, si étroitement unis qu’Athénagore a pu dire : « Le Fils est dans le Père et le Père dans le Fils par l’union et la vertu du Saint-Esprit. » Légat., 10, col. 909. Mais comme ils s’occupent beaucoup moins de la vie intime de Dieu que de sa manifestation extérieure, du Verbe dans ses relations avec le Père que dans ses rapports avec la création et dans son œuvre rédemptrice, et du Saint-Esprit que du Verbe incarné, ils emploient parfois des expressions qui ne cadrent pas actuellement avec la pure orthodoxie. C’est ainsi, par exemple, qu’après avoir affirmé la co-éternité du Verbe, ils ne le font sortir du sein du Père, par voie de prolation ou de génération, qu’au moment et dans le but de créer ; ce qui impliquerait une génération temporelle ; le Verbe semble ainsi avoir passé par un double état, celui de Èvîiaâe-ro ; et celui de irpoçopixd ;  ; ces expressions sont de Théophile, Ad Autol., ii, 10, 22, col. 1064, 1088 ; mais l’idée qu’elles expriment se trouve dans Justin, Apol., i, 5, 13 ; ii, 6 ; Dial., (il, col. 336, 348, 453, 613 ; Tatien, Orat., 5, col. 813-816 ; Athénagore, Légal., 6, 10, 12, 24, col. 901, 909, 913, 945. Enfin, tout en défendant l’unité divine sous le nom de monarchie et la distinction du Père, du Fils et du Saint-Esprit dans cette unité, ils accusent trop la subordination. Dès la fin du ue siècle et le commencement du m » , il y eut conflit entre l'école unitaire et l'école trinitaire, l’une exagérant la monarchie aux dépens de la trinité, l’autre appuyant trop sur la distinction des personnes et encourant le reproche de dithéisme. Ce n’est que peu à peu, grâce à un examen plus approfondi, que la thèse modaliste, sabellienne, fut écartée et que l’accord s'établit entre ces deux notions d’apparence contradictoire, l’unité' de Dieu et la trinité des personnes.

4. Création.

Dieu, d’après les apologistes, a tout créé de rien. Saint Justin, il est vrai, dit qu’il a créé le monde l ànôpepou CXtjc, Apol., i, 10, 59, 67, col. 340, 416, 4211 ; son langage pourrait faire croire qu’il admettait comme Platon une matière éternelle ; mais sa pensée nous est connue grâce à son disciple. Tatien, en effet, précise que le Verbe, pour créer le monde, s’est d’abord créé à lui-même la matière ; car celle-ci n’est pas à'vapyo ; comme Dieu. Orat., 5, col. 817. Athénagore compare bien Dieu au potier, Légat., 10, 15, 19, col. 909, 920, 929, mais après avoir affirmé que la matière a été créée, Légat., 4, eut. 897 ; que tout, to irfiv, a été créé par le Verbe. Ibid., col. 908. Théophile est catégorique : il remarque que la création l oùx 6'vtwv a été enseignée par les prophètes, Ad Autol., H, 9, 10, col. 1064 ; que la matière a été créée, Hmi., col. 1064, ex nihilo, ibid., H, 13, col. 1072 ; et que Dieu ne serait pas le créateur de tout si la matière était incréée, car sa puissance éclate précisément en ce qu’il crée ex nihilo, à la différence de l’artisan qui n’opère que sur une matière préexistante. Ail Autol., II, i, col. 1052. De même, Tertullien : Molem islam cum muni instrumenta elemenlorum, corporn iii, tpirituum, Verbo guo jussit, ratione qua disposuil,

ule qua poluit, de nihilo expressif. Apolog., 17, 1'. /.., 1. 1, col. 375. Son traité Adv. Hermogencm, P. L., t. ii, col. 193 sq., combat l'éternité de la matière.

5. Anges.

Au-dessous de Dieu, les anges. Créés par lien avant l’homme, Tatien, Orat., 7, col. 820, ce sont des être intelligents et libres, Justin, Apol., 1, 28 ;

Dial., 88, 128, col. 372, 685, 776 ; chargés de veiller sur les œuvres de Dieu, Athénagore, Légat., 24, col. 945, 948 ; reconnus par la théologie, Athénagore, Légat., 10, col. 909 ; et vénérés des chrétiens. Justin, Apol., i, 6, col. 336.

Mais, parmi les anges, il en est un, diable ou Satan, qui s’est rendu coupable de négligence et d’improbité, Athénagore, Légat., 24, col. 918 ; il en est d’autres qui ont abusé de leur nature et de leur ministère, se sont laissé séduire par les femmes et ont donné naissance à la race des géants ou des démons. Justin, Apol., il, 5, col. 452 ; Athénagore, 24, col. 948 ; Tertullien, Apolog., 22, P. L., t. i, col. 405. Sous l’influence de ces anges rebelles, l’homme est tombé, Tatien, Orat., 7, 8, col.^O, 821 ; il a rejeté la providence, Athénagore, Légat., 25, col. 949, et adopté le fatum, Tatien, Orat., 8, col. 821, la magie, les sacrifices, tout ce qui constitue l’idolâtrie. Justin, Apol., i, 14, 56, 58 ; ii, 5, col. 409, 413, 416, 452. Ces anges déchus et ces démons s’acharnent contre l’homme pour le perdre : d’où leur rôle dans la poésie, la philosophie, l’hérésie, la persécution. Voir plus haut. Ils sont libres de faire le mal jusqu'à la fin du monde et à l’apparition du juge. Mais ils sont destinés à souffrir éternellement. Tatien, Orat, , 12, col. 832.

0'. Homme- — L’homme a été créé par Dieu, Tertullien, Apolog., 48, P. L., t. i, col. 524 ; à l’image de Dieu, Tatien, Orat., 7, col. 820 ; libre et immortel. Justin, Apol., i, 63 ; Tatien, Orat., 7 ; Théophile, Ad Autol., ii,

27, col. 425, 820, 1096. Mais Eve, à l’instigation du serpent, a enfanté la désobéissance et la mort, Justin, Dial., 100, col. 712 ; elle a été trompée par le serpent et est devenue la source du péché, Théophile, Ad Autol., il,

28, col. 1097 : allusion assez claire au péché originel, terme que ne connaissent pas les apologistes. Ils connaissent la chose ; car leur langage, malgré son imprécision, implique l’idée de la chute et de sa transmission héréditaire. Adam, disent-ils, a péché, et depuis Adam, le genre humain est tombé dans la mort et la fraude du serpent, Justin, Dial., 88, col. 685 ; il est tout entier soumis à la malédiction, Dial., 95, col. 701, sans doute pour ses péchés actuels, mais aussi à cause du péché d’origine ; l’homme doit être régénéré par le baptême pour faire disparaître le vice de sa génération, Justin, Apol., i, 61, col. 421 ; seul Jésus-Christ est né sans péché, Justin. Dial., 23, col. 528 ; ce qui suppose que tous les hommes naissent avec le péché, qu’ils sont viciés dans leur génération.

Dans l'état actuel, l’homme n’est pas le jouet de la fatalité : il est libre, responsable, capable de faire le bien ou le mal, de se sauver ou de se perdre, sans excuse. Justin, Apol., i, 28, col. 372. D’après l’usage bon ou mauvais de sa liberté, il se prépare une éternité de bonheur ou de malheur. Justin, Apol., i, 8, 12, 43, 52 ; n, 7 ; Dial., 117, 141, col. 337, 341, 393, 105, 156, 748, 797 ; Tatien, Orat., 11, col. 829 ; Théophile, Ad Autol., ii, 37, col. 1116 ; Tertullien, Apolog., 47, /'. L., t. i, col. 520.

7. Eglise.

Ceux qui croient au Christ forment une seule âme, une synagogue, une église. Justin, Dial., <> : '.. col. 621. L'Ëglise est un corps organisé à l’image du corps humain : chaque chrétien en est membre. Justin, Dial., 42, 116, col. 565, 745. Théophile voit dans les ('-lises catholiques des îles où se réfugient ceux qui veulent assurer leur salut. Ad Autol., II, 14, col. I07(i.

8. Sacrements.

Plus explicite que la /" Clementis et la Didaché, saint Justin, au sujet de l’initiation chrétienne ou du baptême, nous indique les éléments constitutifs de ce sacrement, les dispositions requises pour le recevoir, sa nécessite, ses effets. Apol, , i, 61, col. 120. Il marque de même les parties essentielles ou intégrantes du sacrement de l’eucharistie, ablation, consécration, communion. C’est la messe, sauf le mot, avec les prières, les lectures, l’olfrande du pain et du viii, la