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AUGUSTIN (SAINT)

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chés mortels et des péchés véniels est due (’gaiement à l’évêque d’Hippone. Jusqu’à lui un grand vague règne chez les meilleurs auteurs : ils appellent souvent véniels des péchés en réalité fort graves, mais dont l’Église ne retardait point le pardon jusqu’à la mort. L’auteur du Liber (pseudo-august., voir col. 2309) de vera et falsa pœnit., c. xviii, n. 34, P. L., t. XL, col. 1128, dira encore plus tard : quædam peccata sunt morlalia et in pxiiitentia fiant venialia. Cf. S. Ambroise, De parad., c. xiv, n. 71, P. L., t. xiv, col. 310. Mais Augustin établit très nettement une démarcation absolue entre les péchés véniels et mortels, selon qu’ils méritent ou non l’enfer éternel. Ainsi dans le Spéculum, à propos des Actes des apôtres, P. L., t. xxxiv, col. 994, édit. Weihrich, Corpus de Vienne, t. xii, p. 199, il réfute l’erreur persistante encore qui limitait les péchés mortels aux trois crimes canoniques, et il ajoute : quasi non sint mortifera, qusecunque alia sunt prseler hsec tria, qvje a re-GNO dei séparant ; aut inaniter… dictant sit : neque fures, neque avari, neque ebriosi, neque maledici, neque rapaces regnum Dei possidebunt. Voilà, d’après Augustin, les péchés mortels (letalia, mortifera, crimina ) dans le sens et l’extension de la théologie moderne.

Les péchés véniels au contraire (il les appelle aussi levia, quotidiana) sont compatibles avec la grâce, la sainteté et le droit au ciel : ce sont ces fautes de chaque jour dont le pardon est obtenu par la prière, tandis que les mortels exigent la réconciliation par l’Église. Enchirid., c. i.xix-i.xxr, P. L., t. XL, col. 265 ; De symb. ail cal., c. vii, n. 15, ibid., col. 1136 : sunt venialia, sine quibus cita isla non est ; De fide et oper., c. xxvi, ibid., col. 228 ; De cicit., 1. XIX, c. xxvii, P. L., t. XLI, col. (i.")7 ; I. XXI, c. xxvi, n. 4, col. 718. Les péchés véviels sont représentés, I Cor., iii, 15, par le bois et la paille dans l’édifice bâti sur le fondement du Christ. !)< cicit., 1. XXI, c. xxvi-xxvii, P. L., t. xi.i, col. 743752. (’! sonl enfin ces fautes légères que les plus saints ne parviennent point à éviter : lorsque, en effet, Augustin soutient contre les pélagiens que tout homme pèche, il s’agil uniquement de péché véniel. Voir col. 2383 ; Enchirid., c. i.xxi, loc. cit. ; De civit., 1. XIX, c. xxvi, P. L., t. xli, col. 657.

Les exemples qu’il donne de ces défaillances légères montrent l’accord de sa pensée avec l’enseignement actuel do la théologie, De tint, et gr., n. 15, P. L., t. Xl.iv, col. 268-269 : Paulo immoderatius aliquando risit cet animi remissione jocatus est, etc. A cette théorie du péché véniel se rattache la doctrine du purgatoire spécialement développée par saint Augustin, Voir col. 2444.

C) Dans les justes, il y a donc une échelle de degrés

de perfection, comme il y a une hiérarchie d’iniquité

urs ; l.i formule célèbre de saint Augustin

tout. De nat. et grat., c. lxx, n. 84, /’. L.,

t. xi. iv, col. 290 : Charitas ergo inchoata, mehoatajuntitiæst ; charitas provecta, provecta institut est ; chantas magna, magna justifia ; charitas perfecta, perfecta justifia est.

d) Il en résulte dans le ciel une hiérarchie de gloire répondant a la hiérarchie des mérites, de même qu’en les châtiments sont proportionnés aux crimes. r., c. xi, /’. /, ., t. xi., col. 284 : in beatitudine isti uhus alia prsestabilius, m miseria vero Mi alius alio tolerabiliui Umit.

>. En partù ulier, /, / doctrine’le lu de parfaite et tut religieux, chez saint Augustin, est empreinte d’un ascétisme sage, modérée) pratique. Dans ses éloges « nthou la virginité, voircol. 2304, tout en exal tant la supériorité de la continence parfaite, il maintien !

toujours la ainteté d ariage : Non tanquam malo

ini, sed lanquam bono melius, virginitatem nuptiis tmtepo nd-il a Julien. Op. inip., I. IV.

n. 122, /’. L., t. xi.v, col. lils. Sa Règle (oir plus loin)

est éminemment pratique et le même caractère éclate dans sa théorie du travail des moitiés. De opère mon., P. L., t. xl, col. 519-592. Il se sépare nettement des idées orientales : le génie actif de l’Occident romain se montre heureusement ici pour modifier la conception de la vie monastique et prépare ces grands ordres de moines d’Occident dont l’influence sera si profonde sur tous les théâtres de l’activité intellectuelle et civilisatrice. On trouvera dans les œuvres d’Augustin, une apologie et une explication : « ) des veaux en général, Serm., CXLVIII, n. 2, P. L., t. xxxviii, col. 799 ; ccxxiv, n. 3, ibid., col. 1094 ; Epist., cxxvii, n. 6, P. L., t. xxxiii, col. 486, etc. ; — b) de l&profession religieuse en général, Epist., CL, ibid., col. 645 (lettre à Démétriade après sa vélation solennelle ) ; — c) de l’obéissance monastique, dans la lettre ccxi, ibid., col. 958-964 ; De moribus Eccl., 1. I, c. xxxi, n. 67, P. L., t. xxxii, col. 1338 (tableau ravissant des monastères d’Egypte) ; — d) de la pauvreté évangélique, De opère mon., c. xxv, n. 32, P. L., t. xl, col. 572 ; dans le sermon ccclvi, n. 8-10, P. L., t. xxxviii, col. 1577, il apparaît comme l’apotre de cette vertu dans son clergé. Mais ici encore, il se garde des excès du rigorisme pélagien proscrivant toute richesse terrestre ; le mal, pour un chrétien, n’est pas d’avoir des biens, mais d’en mal user. Cf. De mor. Eccl., c. xxxv, n. 78, P. L., t. xxxii, col. 1343 ; De serm. Dom. in monte, 1. II, c. xvii, n. 57, P. L., t. xxxiv, col. 1294 ; Serm., xxxix, n. 3-4, P. L., t. xxxviii, col. 242 : toile superbiam, divilise non nocebunt. Voir col. 2139.

3. Les trois phases de la vie spirituelle : théologie mystique d’Augustin. — Sans entrer dans aucun détail, nous ne pouvons omettre ce fait important : c’est Augustin qui, infusant une sève chrétienne dans les théories néoplatoniciennes sur la purification de l’âme, a introduit, avant le pseudo-Aréopagite, dans l’ascétisme occidental tout un ensemble d’images et de formules dont vit encore notre littérature ascétique. Ainsi la mystique lui doit de distinguer, dans l’ascension de notre âme vers Dieu, trois grandes étapes que l’on a appelées voies ou vies purgative, illuminative, unitive.

a) L’idée dominante est celle d’un progrès nécessaire dans l’effort de l’âme pour contempler Dieu et s’unir à lui. Comme Augustin lui-même, dans les Conf, , 1. XIII, c. IX, P. L., t. xxxii, col. 847, nous devons gravir les ascensions du cour et chanter le cantique des DEGRÉS. Ces degrés, on peut diversement les distinguer. Dans le De quanti tate an., c.xxxin, n. 70 si)., ibid., col. 10731079, Augustin, unissant la division aristotélicienne de nos facultés à la méthode de Platon pour élever l’âme à la contemplation du beau, distinguait sept activités de l’âme ou sept degrés qu’elle doit franchir.

Il les décrit avec un charme ravissant, et les résume en ces termes (n. 79, col. 1079) : a. la vie, b. le sentiment

(vie sensible), c. l’art ( c’est-à-dire la pensée ou vie intellectuelle), d. la vertu (ou effort moral purificateur), e. la tranquillité (calme des passions domptées), f. l’entrée [ingressio, ce mot obscur désigne le regard de l’âme purifiée lié sur Dieu et cherchant à pénétrer dans le sanctuaire de la divinité’), g. la contemplation (qui est déjà la demeure en lieu qusedam mansio, n. 76). Il exprime encore ces degrés sous cette autre tonne, ibid. : a. île corpore, b. per corpus, c. en-en corpus, <I. ml seipsani, e. m seiiisn, (.ml lieuiii. g.apud Deum.

b) Mais pins souvent il omet les premiers degrés pi us philosophiques et réduil l’ascension de lame aux trois opérations qui constituent aujourd’hui les trois oies de purification, d’illumination, d’union on contemplation, Voir /><’ordine, I. il, e. xx, n. 50, /’. /.., t. xxxii, col. 1019. — a, La purification, dans la pensée des platoniciens, consistait a séparer l’âme de tout ce qui esteorporel : le corps étant essentiellement la souillure et la prison de l’âme, devail cire exclu de la vie future. Voir col. 2331. Mais dans le sens plus chrétien d’Augustin,