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AUGUSTIN (SAINT]

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t. xuv, col. 240. Et plus haut, il en avait donné la raison, c. xxxvii, n. 58 : Vult autem Deus omnes honiines salvos fieri… non sic tamen ut eis adimat liberum arbitrium quo vel bene vol maie utentes justissime judicentur. Il le répète constamment, par exemple en 415, dans le De nat. et grat., n. 78, P. L., t. xuv, col. 286 : lu recte faciendo million est vinculum necessilalis. Vers la fin, en 426, dans la revision de ses ouvrages, loin de rétracter ce qu’il avait enseigné dans la proposition 61e de YExpos. quar. proposit. de E/iist. ad Rom., /’. /.., t. xxxv, col. 2072, sur la liberté de la foi et de la benne volonté, il le confirme, Retract., 1. I, c. xxiii, n. 2, 3, P. L., t. xxxii, col. 621 : Vtrumque ergo nostrum est propter arbitrium voluntatis et utrumque tamen datum est per spiriium fidei et charitatis. L’acte bon, même surnaturel, est l’œuvre de l’homme et de Dieu.

Troisième panneipe : La théorie augustinienne sur l’action divine concilie la grâce et la liberté. — Y a-t-il contradiction entre les deux principes précédents ? Harnacli, Loofs et d’autres l’ont pensé, parce que, d’après eux, la grâce augustinienne est une impulsion irrésistible. Mais est-ce la conception du grand docteur ? Il a cru, au contraire, avoir concilié les deux dogmes et il s’étonnait que les moines d’Hadrumète n’eussent point compris. Cette solution a été indiquée, mais trop soinmai renient, par les anciens théologiens et de nos jours par Schuane, Dogmengeschichte, trad. Degert, t. il, §7, p. 129, par Hergenrbther, Kirchengeschichte, t. ii, n. 117, trad. franc., t. ri, p. 174, par le bénédictin Wolfsgruber, Augustinus, 1898, p. 825-830. L’exposer sera justifier le système du docteur d’Ilippone.

A. Exposition du mode d’action de la grâce. — La solution repose sur trois théories augustiniennes, et explique également l’influence divine sur les vertus naturelles et surnaturelles.

1™ théorie de psychologie de la volonté. — La volonté ne se décide jamais sans un motif, sans l’attrait d’un bien perçu dans l’objet : Voluntatem non alliât ad facieniliini quodlibct, nisi aliquod visum. Quid autan ijuisi/iic rcl sumat cet respuat, est in potestate, etc. De lib. arbit., 1. III, c. xxv, n. 74, P. L., i. xxxii, col. 1307. Or bien que la volonté soit libre en présence de tout motif, en fait elle prend souvent des résolutions différentes selon les divers motifs qui lui sont présentés. C’est là tout le secret de l’influence exercée par l’éloquence (l’orateur ne peut que présenter des motifs), par la méditation ou les bonnes lectures. Quelle puissance n’aurait pas sur la volonté celui qui pourrait à son gré lui présenter à toul moment tel ou tel motif Or tel est le privilège de Dieu, en vertu d’un autre principi

2e théorie de psychologie intellectuelle. — Saint Augustin a remarque cette vérité d’expérience universelle que Illumine n’est pas niuilre de ses premières

es : il peut influer sur le cours de ses réflexions, mais il ne peut déterminer lui-même les objets, les images, et par conséquent les motifs qui se présentent à son esprit. Nenw habcl m potestate quid ei veniat in tem, dil il, De spiritu. ei lit t., c. xxxiv, n. 60, /’. /.., t. xi iv. col. 240, sed consentira vel dissentire oluntatis est. Or le hasard n’étant qu’un mot, i I Dieu qui détermine à son t ; ré ces perceptions premières’les hommes, soil par l’action providentiellement préparée des causes extérieures, soif intérieurement par le ministère des anges ou même par une

Uluminali livine envoyée à l’àme. Cf. De Gênai ad

lilt., I. IX, c. xiv. n. 25, /’. /-., t. XXXIV, col. 103 (pasii actéristique).

L’influen sur la volonté apparaît déjà bien

poissante puisqu il dépend de Dieu d’attirer la volonté en lui présentant tous les motifs ou les attraits dont sa puissance. ! | Cependant son action serait encore

ini rtain n un troi ième élément.

3’théorie de la science divine. — Augustin ajoute que Dieu non seulement envoie à son gré les illuminations et les attraits qui inspirent à la volonté ses déterminations, mais qu’avant de choisir entre toutes ces illuminations de l’ordre naturel ou surnaturel il sait la réponse que fera très librement la volonté à chacune d’elles. Ainsi dans la science divine, pour toute volonté créée, il y a des séries indéfinies de motifs qui à tel moment seraient repoussés, et d’autres séries qui de fait (mais très librement) entraîneraient le consentement au bien. Dieu pourra donc, à son gré, obtenir le salut de Judas, s’il le veut, ou laisser Pierre se perdre : nulle liberté ne résistera à ses plans, bien qu’elle garde toujours le pouvoir de se perdre. Par conséquent c’est Dieu seul qui, dans sa pleine indépendance, détermine, par le choix de tel motif ou de telle inspiration (dont il connaît l’influence future), si la volonté se décidera pour le bien ou pour le mal. Dès lors, l’homme qui a bien agi doit remercier Dieu de ce qu’il lui a envoyé une inspiration prévue efficace, tandis que cette faveur a été refusée à tel autre. A plus forte raison tout élu doit-il à la seule bonté divine d’avoir reçu la série de grâces que Dieu voyait infailliblement quoique très librement liées avec la persévérance finale. Certes on peut rejeter cette théorie, l’Église ne l’a pas encore faite sienne ; on peut demander où et comment Dieu connaît le résultat de ces grâces (Augustin a toujours affirmé le fait, n’a jamais recherché le mode et c’est en cela que le molinisme se distingue de lui en essayant de répondre à cette question).

Mais le penseur qui a créé et soutenu jusqu’à son dernier jour ce système si logiquement enchaîné peut-il être accusé de fatalisme, de manichéisme ? Or, cette solution Augustin l’a toujours mise à la base de son système.

H. Preuves. — a) Dès 397, il la formule avec une grande clarté, dans le De div. qusest ad Simplic., 1. I, q. ii, n. 121, jP. L., t. xi, col. 111 : Simplicien a demandé comment il faut entendre le chapitre ix de l’Epitre aux Romains sur la prédestination de Jacob et d’Esaû. Augustin détermine d’abord la pensée de saint Paul, à savoir que tonte lionne volonté vient de la grâce, ut de operum meritis nenw glorietur, n. 2, loc. cit., col. 111, et d’une j^ràce si sûre dans ses résultats, que jamais la liberté humaine ne lui résistera. Puis il affirme que cette grâce efficace n’est pas nécessaire pour que nous puissions bien agir, mais parce que de fait, sans elle, nous ne voudrions pus agir, non ideo dictum putandum est. non volentis neque currentissed miserentis est Dei, quia nisiejus adjutorio non POSSUMUS adipisci quod volumus, sed ideo potius quia nisi ejus vocutione NON VOLUMUS, n. 12, col. 118. De là surgit la grande difficulté : comment le pouvoir de résister à la grâce, s’accorde-t-il avec la certitude absolue du résultat ? Et c’est ici qu’Augustin répond : il y a plusieurs manières d’inviter à la foi ; les âmes étant diversement disposées, I >i <-u sait quelle invitation sera agréée, quelle autre n’agréera peint. Ceux-là seuls sont les élus pour qui Dieu choisit l’invitation efficace, mais Dieu pouvait les convertir tous, ii, 13, cl. 118 : Si eellet etianx (liées) ipsorum misereri, posset ITA ooeare, QUOMODO illis ai’tim est ut et moverentur et intelligerent et seque reuliir. Yeiiim est ergo.mulli vocal i, pu net vero l’Ieeli ; illi euiiii eleeti qui conijrueuler voeuti : illi oiilem qui

non congruebant neque contempernbantur vocationi non eleeti quia non secuti, quamvis vocati… Cujus autem miseretur, su. 1 1 v vocat, qi omodo scii i.i con(, :  ; ’ère, "’vocantem non respuat.

Y a-t-il là trace d’une giutiu irresistibilis, oa de cette impulsion inéluctable dont on a tant parlé ? Et cependant, c’est l’explication à laquelle dans ses dernières années, Augustin renvoie -es adversaires : si on l’a comprise, il ne conçoit pas ces inquiétudes pour la

lé.