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AUGUSTIN (SAINT)

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origine (imitation des idées éternelles) ; bons dans leur destinée, puisque tout être loue Dieu. Confess., 1. VII, c. xiit, n. 18, 19, P. L., t. xxxii, col. 743. — 6) La nature du mal lui fut expliquée par les platoniciens et ce fut le grand service rendu à son esprit troublé. Aussi, avec eux, il enseigna que le mal n’est point un être, mais une privation, une limite, Confess., 1. VIII, c. xiii ; 1. VII, c. xii ; cf. IIIe Ennéade de Plotin, 1. II, c. vu ; — que Je mal sert à l’ordre général du monde, qu’il est un facteur du progrés, De libero arb., 1. III, c. ix ; cf. IIIe Enn., 1. ii, 5 ; De online, 1. II, c. iv, cf. IIIe Enn., 1. II, 11 ; —que le mal moral a sa source dans la liberté humaine. De lib. arb., 1. III, c. i ; cf. IIIe Enn., 1. II, 7 ; Enchirid., c. xxiii, P. L., t. xl, col. 21’t.

D. En cosmologie, il emprunta aux néoplatoniciens leur théorie compliquée des rationes sentinelles, mais il la modifia si profondément qu’elle semble être une théorie personnelle. Voir plus loin.

E. La psychologie spiritualiste des platoniciens l’habitua à concevoir un être incorporel et le préserva de l’erreur où sont tombés d’autres Pères d’attribuer à l’âme même une subtile enveloppe corporelle. Confes., 1. VIII, c. xxvi.

F. Le fond et les formules de leur morale si noble passèrent dans les œuvres d’Augustin, par exemple : leur théorie de la béatitude dans la contemplation de Dieu, cf. De bcata vita, — leurs lois fondamentales de 1 ? perfection : — o) Le vrai sage est celui qui imite Dieu. le connaît et l’aime, De civil., 1. VIII, c. v, P. L., t. xi.i, col. 229 ; — b) Pour ressembler à Dieu, il faut se détacher de toutes les choses temporelles et passagères. Ibid., 1. X, c. xix, n. 2, col. 308.

3. Théories néoplatoniciennes toujours rejetées par saint Augustin. — A. Il a toujours reproché aux platoniciens d’ignorer ou de repousser trois grands dogtnes chrétiens : — a) L’Incarnation est absente de leur philosophie, Conf., 1. VII, c. ix, n. 13, P. L., t. xxxii, col. 740 ; elle est même déclarée impossible, non verum est, leur dit Augustin, De civil., 1. IX, c. xvi, P. L., t. xii, col. 269, guod idem Plalonicus (Apulée) <ni dixisse Platonem : nullus Deus miscetur homini. — h) La personne même du Christ, le mystère de la croix, les abaissements ineffables du Fils de Dieu et la grande leçon d’humilité’qui en émane, tout cela leur est également inconnu. Epis !., cxviii, n. 17, et passim, P. L., t. xxxiii, col. 440 sq. (toute cette lettre au païen Dioscore résume les impressions d’Augustin sur les diverses écoles de philosophie). — <) Ils ignorent aussi la grâce qui donne la vertu. Conf., 1. VII, c. xxi, n. 27, P. L., t. xxxii, col. 748. Ils donnent de sublimes préceptes de morale, aucun secours pour les réaliser.

lî. Dans leur cosmogonie « » histoire de la création il réfutait six graves erreurs. — o) Leurs dieux inférieurs espèces de démiurges placés entre Dieu et les créatures, et chargés de produire les animaux inférieurs. h civit., 1. XII, c. xxii, xxiv, xxvi ; 1. II, c. vil. — b) Le principe créateur n’était pour eux qu’une des trois hypostases dont ils composaient leur triade ; Augustin ni’que la créatiou est l’œuvre des trois personnes. h, - vera relig., c. xiv ; De Genesi ad lut.. I. IX, c. xxvi. — n Dieu produit le monde, par génération ou émanation, d après les platoniciens. Augustin a toujours défendu la vraie création ex nihilo. De vera relig., c. xxxv ; t’.nntra Secundin. manich., c. iv, /’./.., t. xi.ii, col. 580 ; De .uni Felice mon., I. II, c. xviii, ibid., col. 547 ; Acta iii, n. Fortun., n. 13, ibid., col. 117, — d) La création est nécessaire, d’après eux ; pour Augustin, elle est toujours un acte de la libre volonté de Dieu. AdOros. cont. / »/., ’i, n. 2 ; c. ix, /’. /, ., t. xi.ii, col. 070-671. — i création est éternelle, d’après les platoniciens ; en particulier, ils veulent que l’âme soit coéternelleâ Dieu ; tin rapporte et réfute leur argument : si pet ex atemitate seniper fuiuei > » pulvere, seniper ei suints set vestigium, etc. De civil., 1. X, c. xxxi, P. L., t. xli, col. 311. Il n’hésite pas à repousser même la possibilité de la création éternelle : le temps commence avec la créature, et le temps, étant mesuré, est essentiellement fini. De civit., 1. XI, c. iv-vi, ibid., col. 319322 : I. XII, c. xv-xx, col. 363-370, surtout c. xvi, col. 365, où se lit la formule si énergique : non tanicn dubito niiiil omnino créature Creatori esse coseter* num. Et il s’agit du droit autant que du fait. Au c. xv, n. 2, col. 364, il avait donné la preuve dans ces deux principes : l’un que les anges ont une durée successive, puisque les actes succèdent aux actes, l’autre que toute durée successive est finie : tempus, quoniatn mutabilitate Iranscurrit, seternitati immutabili non potest esse coseternum. — f) Ajoutons que dans la création néoplatonicienne semble être impliqué un panthéisme dynamique, comme l’a établi Zeller. Or, le système d’Augustin, tel que les textes déjà cités le présentent, protestent contre les accusations de Lœsche, De AugustitiL plotinizante, p. 55, et de Ritschljil repousse avec énergie toute espèce de panthéisme. Cf. Retract., 1. I, c. xv, P. L., t. xxxii, col. 608 ; c. xi, n. 4, col. 602 ; De civit., 1. VII, c. xxiii ; 1. IV, c. xii. Grandgeorge l’a reconnu, op. cit., p. 111.

C. En psychologie, Augustin rejetait deux doctrines platoniciennes : — o) La métempsycose qui lui faisait horreur, bien que la préexistence des âmes ne l’étonnàt point. Cf. De civit., 1. X, c. xxx, P. L., t. xli, col. 312.

— b) Les platoniciens attribuaient tous les vices de l’âme à l’inlluence du corps. Augustin croit que l’âme a ses imperfections propres. De civit., 1. XII, c. xxvi ; 1. XIV, c. v ; De anima et ejus orig., c. xii, xix. Au moyen âge, chose curieuse, la thèse platonicienne sera reprise par saint Thomas et ses disciples.

D. Enfin, dans la vie des platoniciens, Augustin stigmatisait l’idolâtrie et le polythéisme pratiques, dont ils faisaient profession avec le peuple, malgré leur doctrine tout opposée. De vera relig., c. I, P. L., t. xxxiv. col. 722 : scholas habebant dissentientes et templa communia. Cf. C. v ; De civil.. 1. X, c. I, n. 1. P. L., t. XI. I, col. 277 ; 1. VIII, c x-xii ; De consensu Evang., 1. I, c. VIII.

4. Théories néoplatoniciennes, d’abord adoptées, puis rétractées par Augustin. — Cette série nous est fournie par le 1. I des Rétractations, où sont corrigés les ouvrages écrits avant l’épiscopat : c’est en effet la période de ferveur néoplatonicienne.

A. En général, il blâme l’admiration excessive de la philosophie et des philosophes. Ainsi il rétracte : —a) Les éloges exagérés des platoniciens au LUI, Cont. acad., c. XVII, n. 37, P. L., t. xxxii, col. 954 ; voir Retract., 1. I, c. i, n. 4, ibiil., col. 587 : tautum extuli, quantum impios homines mm oportuit. Dans le I. II, De civit., c. xiv, n. 2, il avait déjà dit : N(js Platonem nec prophétie, nec apostolo… née cuiquam christiano comparamus. — h) Le rôle trop beau attribuée la philosophie, comme si elle pouvait donner le bonheur complet. Retract., 1. I, c. n. — c) L’affirmation du I. I, Soliloq., c. i, n. 2, que la science est toujours réservée à la vertu. Cf. Retract., 1. I, c. iv, n. 2.

I !. En particulier, la théorie néoplatonicienne du bonheur l’avait séduit : il avait cru lui aussi, quand il faisait son rêve de vie philosophique, que la science de Dieu donne le vrai bonheur, dès cette vie : illusion qui renverse l’ordre de nos destinées. Il rectifie dans les Retract., I. I, c. iv, n. 3, col. 5(10. et surtout c. xiv, n. 2, col. 606. Le bonheur : ci n’est qu’en Dieu connu et aimé, mais b) dans la vie future seulement, et c) une seule voie y conduit, le Christ.

C. La démonologie platonicienne lui avait inspiré’drs doutes, des hésitations, des erreurs même sur le rôle des anges, Par exemple, Retract., I. I. c. xi. n. V, col. 602, il corrige la terminologie néoplatonicienne,