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ATTRITION


ment de bonne foi. Si le fidèle en question n’a aucun repentir de ses fautes, ni explicite, ni implicite, quand il reçoit le sacrement, celui-ci est nul, parce que, comme nous l’avons dit à propos du baptême, il n’y a pas de remission du péché sans contrition. Mais si ce fidèle a la contrition imparfaite, doil-on penser que ses péchés lui sont remis par la vertu du sacrement ? Les théologiens répondent généralement par l’affirmative, estimant que le sacrement des vivants agit, dans ce cas, comme un sacrement des morts. Le péché qui fait obstacle à l’infusion de la grâce dans l'âme est suffisamment écarté, pensent-ils, par l’attrition du fidèle de bonne foi. Saint Thomas adopte cette solution pour la confirmation, Sum. theol., III a, q. i.xxii, a. 7, ad 2um, et pour l’eucharistie, q. lxxiv, a. 3. Cf. Billot, De Ecdesiee sacramentis, Rome, 1897, t. il, p. 152 sq.

IV. Conditions.

Sous ce titre nous nous occuperons d’abord des qualités nécessaires à toute vraie contrition ; nous traiterons ensuite la question si controversée du commencement d’amour de Dieu dans l’attrition.

I. DES QUALITÉS DE LA CONTRITION.

Toute détes tation du péché, pour servir au salut, doit être intérieure, surnaturelle, souveraine et universelle. Ceci est une thèse que nous supposons établie et que nous n’avons ni à expliquer ni à démontrer ici. Voir Contrition. Nous ferons seulement à l’occasion de chacune de ces qualités, nécessaires dans la contrition imparfaite comme dans la parfaite, quelques observations qui intéressent particulièrement l’attrition.

i re qualité : intérieure. — L’attrition doit exister dans la volonté, puisque en vertu de la définition même qu’en donne le concile de Trente, sess. XIV, c. iv, elle exclut la volonté de pécher : si voluntatem peccandi excludat. — Cependant quelques théologiens, dont Melchior Cano, Relectio de psenitenlia, part. VI, q. xv, Cologne, 1605, et André Vega, De justificatione, l. XIII, c. xxxiv, Cologne, 4572, ont pensé qu’une attrition apparente ou supposée, sans existence réelle dans la volonté, pourrait suffire dans le sacrement de pénitence, si le pénitent était de bonne foi. L’hypothèse est celle-ci : î Un pécheur, qui n’a que des apparences d’attrition, croit pouvoir se présenter au saint tribunal. En réalité, sa haine pour le péché et son ferme propos ne sont que des velléités et non des actes formels de volonté ; que penser de l’absolution qu’il reçoit ? L’absolution est valide, disent les auteurs que nous venons de citer, en raison de la bonne foi du pénitent. ISallerini, parmi les modernes, accepte cette solution. Opus theol. mor., Prato, 1892, t. v, p. 29 sq. Nous estimons au contraire, avec Palmieri, noie sur le texte de Ballerini, n. 70, /oc. cit., p. 38, et Tract, de pœnitentia, Rome, 1889, p. 353 sq., que la réponse ainsi formulée est erronée. La contrition n’est pas simplement commandée, elle est un moyen nécessaire et matière essentielle dans le sacrement de pénitence. Dès lors qu’elle fait défaut, le sacrement est nul.

9* qualité : surnaturelle. — Innocent XI. par décret du 2 mars 1079, a condamné la proposition d’après laquelle un repentir naturel serait probablement suffisant dans le sacrement de pénitence, n. 57 : Probabile est suf/icere attritionem naturalem modo lionestam. benhiridion, n. 1074, p. 262.

Lattrition est surnaturelle en raison de son objet formel ou motif. Or. parmi les motifs que nous avons indiqués, il en est qui sont surnaturels absolument el en eux-mêmes, parce qu’ils n’ont de réalité que dans l’ordre surnaturel, par exemple la privation de la i I' perte du paradis, la crainte de l’enfer ou du purgatoire. D’autres sont surnaturels en raison du point île ue sous lequel i, .. conçoit et les considère une âme éclairée par la foi : ainsi les châtiments de Dieu en ce monde. Il est certain que les malheurs qui affligent

l’humanité pourraient être appréciés à un point de vue purement rationnel et philosophique, et qu’envisagés de cette sorte, ils ne sauraient être des motifs d’attrition surnaturelle. Mais ces mêmes événements peuvent être considérés, à la lumière de la foi, comme des manifestations de la justice de Dieu et des appels de sa miséricorde, ce qu’ils sont en effet. Sous cet aspect, la crainte des épreuves de cette vie est surnaturelle.

Cependant quelques auteurs cités par saint Liguori, Theol. mor., 1. VI, n. 413, Paris, 1883, t. iii, p. 311, estiment que la crainte des châtiments de Dieu est un sentiment purement naturel, puisque la raison humaine suffit à le concevoir. Ils concluent que l’attrition qui naît d’une telle crainte ne peut être surnaturelle. Cette manière de voir est communément rejetée. Suarez, disp. V, sect. il, n. 15, loc. cit., p. 107, fait remarquer très justement que les explications du concile de Trente sur l’attrition permettent de conclure que les peines temporelles sont un motif suffisant de repentir salutaire. Le concile affirme d’abord que la contrition imparfaite peut venir de la crainte de l’enfer et des peines : ex metu gehennse et pœnarum. Puis, il apporte un exemple qui nous explique de quelles peines il a voulu parler : hoc enim timoré utiliter concussi Ninivitse, ad Jonse prædicationem plénum terroribus, pœniientiam egerunt et misericordiam aDeo impetrarunt. Or la crainte des Ninivites était la crainte des malheurs temporels, particulièrement de la ruine de leur cité.

Saint Liguori, appréciant les deux opinions, loc. cit., rapporte que certains auteurs qualifient la thèse commune, de « moralement certaine » ; d’autres disent : « très probable ; » lui-même s’en tient à la note « plus probable » , et il ajoute : « Comme l’autre opinion ne manque pas d’une certaine probabilité au moins extrinsèque, j’estime qu’il est plus sûr de la suivre en pratique. » ISallerini est plus sévère pour l’opinion qui nie la valeur surnaturelle de la crainte des châtiments, et il ne lui reconnaît aucune probabilité. Note sur Gury, n. 26' » -, Comp. theol. mor., Prato, 1894, t. il, p. 215.

3* qualité.-universelle. — La contrition parfaite est, par essence même, universelle, parce que son motif, qui est la charité, exclut nécessairement tout péché. En est-il de même de l’attrition ? Il y a lieu de distinguer entre ses différentes formes, en raison des motifs d’où elle procède. La considération de la laideur générale qui se rencontre dans tout péché, la perte de la grâce sanctifiante, la crainte de l’enfer et des châtiments temporels réservés au péché, quel qu’il soit, sont des motifs qui valent également pour tous les péchés et produiront une contrition qui sera virtuellement universelle. Mais la laideur particulière d’une faute ou d’une catégorie de fautes donne naissance à un repentir qui est limité à cette faute ou à cette catégorie, et ne s'étend pas virtuellement à d’autres péchés. Que vaut, dans le sacrement de pénitence, cette attrition spéciale et restreinte ?

Elle suffit si le pénitent n’a pas d’autres péchés mortels que ceux dont il déteste la laideur spéciale, car, dans ce cas, le repentir est universel de fait et tous les péchés commis sont rétractés.

Elle ne suffit pas. an contraire, s’il y a d’autres péchés et que, de propos délibéré, le pénitent refuse d'étendre â ceux-ci son repentir. Dans ce second cas, il y aurait, non seulement sacrement nul, mais sacrilège.

Maison peut faire une troisième hypothèse, celle d’un pénitent de bonne loi qui déteste tous fis péchés dont il se souvient, pour un motif particulier, ei oublie involontairement d’autres péchés auxquels sa contrition ne S'étend pas virtuellement. Il réprouve, par exemple, un adultère qui le déshonore, sans se souvenir d’un vol qu’il a commis. Dans ce cas, il n ' a pas sarrilege ; mais

le sacrement i t il ou n’a t il pas un efli t ' Nous sommes en présence de trois solutii 1° Quelques moralistes, parmi lesquels Coninck, De