Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 1.2.djvu/369

Cette page n’a pas encore été corrigée
2229
2230
ATTRIBUTS DIVINS


nés à Dieu, par conséquent tous les attributs, ont la même signification et désignent également la plénitude de l'être divin.

II. l'école scotiste, en optant pour l’infinité radicale, c’est-à-dire pour ie droit de posséder toutes les perfections, se rapproche sensiblement du point en litige, sans parvenir à s’y fixer. Il reste encore, en effet, à préciser le nom de l’attribut qui fonde ce droit. On peut rattacher à cette opinion celle de plusieurs auteurs modernes qui donnent leur pi-éférence à l’infinité formelle, en d’autres termes, à l’absence de toute borne et de toute limite en Dieu. Les plus connus sont : Gratry Connaissance de Dieu, t. il, p. 103 ; Palmieri, Institutiones philosophiez, Rome, 1876, t. iii, p. 141 ; Ubaghs, Thcodicese elementa, Louvain, 1841, p. 240. Ici, l’attribut est nettement déterminé, mais il offre l’inconvénient d'être lui-même contenu dans celui d’aséité. Hurter, Theolog. dogmat. cçmpendium, Inspruck, 1877, t. ii, p. 17.

/II. l'école thomiste elle-même a émis, sur ce point, des sentiments divers : ils se résument dans trois principales opinions.

1° Inlelleclualité divine, soit virtuelle, Curiel, Arrubal, Philippe de la Sainte-Trinité, soit actuelle, Nazaricus, Gonzalez, Jean de Saint-Thomas, les Salmanticenses et surtout Gonet, Clypeus theolog. thom., Paris, 1875, t. I, p. 106, et Billuart, Summa S. Thomse, Paris, 1872, t. i, p. 40. Ces auteurs appuient leur choix sur deux raisons. La première est celle-ci : les essences, disent-ils, doivent se déterminer d’après les règles de la spécification, c’est-à-dire par le degré d'être le plus élevé en hiérarchie ; la plante, par la perfection de vie organique ; l’animal, par la sensibilité ; l’homme, par la raison ; et, Dieu, pour être conséquent jusqu’au bout, par cette transcendance d’intellectualité qui est la plus haute expression de son être et de sa vie. Seconde raison ; l’intelligence est, dans l’homme, le côté de sa nature qui le rapproche le plus de l’essence divine et lui vaut d’en être l’image. Or, dit l’angélique docteur, Suni. theol., l a, q, xcur, a. 2, l’image doit, autant que possible, prendre le trait spécifique de son modèle. Donc, c’est en s'élevant dans le sens de l’intellection qu’on arrive à l’idée exacte de l’essence métaphysique de Dieu. On a reproché à cette hypothèse, aujourd’hui en minorité dans les écoles, de présenter comme fondamental un attribut qui en présuppose un autre, celui de l’infinité. Car c’est par ce dernier caractère que l’intelligence divine se distingue des intelligences inférieures.

Aséité.

C’est vers elle qu’allait généralement,

jusqu a ces dernières années, la sympathie universelle. Inaugurée par une branche importante de la tradition thomiste, Capréolus, Cannez, Contenson, elle était entrée dans l’enseignement de la grande majorité des théologiens et des philosophes. C'était l’opinion classique des manuels les plus répandus. Sanseverino, Elementa philosophie, Naples, 1868, t. iii, p. 83 ; Liberatore, IruHt l'/nlos., Rome, 1864, t. ii, p. 898 ; Zigliara, Délia luce intellettut le, Home, I871-, t. ii, p. s.") ; Tongiorgi, Inslit. philos., Bruxelles, 1862, t. iii, p. 361 ; Cornoldi, Instit philos., Bologne, 1878. p. 694 ; Élie Blanc, Traité hilos. scolast., Lyon, 1893, t. iii, p. 33 ; Perrone, Prselect. theol., Paris, 1842, t. i, p. 350 ; Franzelin, l, - i. de Deo uno, Home, 1876, p. 255 ; Vallet, Pralect. }>lni„s., Paris, 1880, t. ii, p. 279 ; Theologia Wirceburgensis, Paris. 1852, t. ii, p. 38 ; Tournely, De Deo, Pa1765, t. i, p. 162 ; Lafosse, dans Cursus completu » theol. de Migne, Paris 1839, t. vu. roi. 80 ; Ginoulhiac, Histoire du dogme catholique, Paris, 1852, t. i, p. 54. tance, perséité, aséité radicule. - [„, renaissance thomiste qui fit écho à l’encyclique de Léon XIII, ni Patris, vint légèrement modifier l’opinion commune. Une analyse plus minutieuse découvrit deux formalités distinctes dans le concept d’aséité et leur attacha

deux dénominations nouvelles. La première, d’aspect négatif, retint simplement le nom d’aséité ; la seconde, à face positive, s’appela subsistance, perséité, aséité radicale. Voir leur sens spécial à l’article Aséité. Alors l’aséité, ainsi disséquée, ne parut plus réaliser les fonctions d’essence métaphysique. D’abord, sa forme négative l’empêchait d'être le fondement de perfections éminemment positives, puis, elle ne rendait pas compte par elle-même de l’autonomie divine. On lui substitua la subsistance, c’est-à-dire la plénitude de l'être, notion positive qui marquait à la fois la plus radicale distinction entre Dieu et la créature et la source première des perfections divines. Les anciens tenants de l’aséité ne revendiquaient, d’ailleurs, pour elle, le titre d’attribut primaire qu’en tant qu’elle désignait l’identité de l’essence et de l’existence. Leurs preuves l’attestent clairement. Franzelin, De Deo uno, p. 259. Elles sont exactement identiques à celles que proposent aujourd’hui les néo-thomistes eux-mêmes pour soutenir leur thèse : mêmes arguments d’Ecriture sainte, de patrologie, de métaphysique. C’est, en premier lieu, la définition quasiessentielle de la divinité qu’exprime le mot Jéhovah et qui suggère directement l’idée de pure existence. Voir Gesenius, Thésaurus philologicus, Leipzig, 1835, t. il, p. 575. En second lieu, viennent les commentaires que les saints Pères ont donnés de ce texte révélé et qui sont tous favorables à la plénitude d'être comme raison première des attributs divins. Voir dans Petau, Theol. dogm., De Deo, 1. I, c. vi, les citations de saint Grégoire de Nazianze, du pseudo-Denys, de saint Jean Damascène. Nous en détachons une plus courte et plus expressive, tirée de saint Bernard, De consideratione, P. L., t. clxxxii, col. 795 : Sibonum, si magnum, si beatum, si sapientem, vel quidquid taie de Deo dixerit, in hoc verbo instauratur, quod est, Est. « Les attributs de bonté, de grandeur, de béatitude, de sagesse et autres qualifications semblables, se résument toutes dans ce mot : ce qui est, est. » Deux mots du docteur angélique indiquent le fondement métaphysique de ces assertions patristiques. Par cela seul, dit-il, Suni. theol., l a, q. IV, a. 2, que Dieu est l'être subsistant, esse per se subsistens, il possède la plénitude de l'être, et par elle la plénitude de la perfection, l'être étant en toutes choses l'échelle d’où se prend le niveau de perfection. « En Dieu, conclut le saint docteur, ibid., ad 3 ii, ii, la dénomination, nous dirons l’attribut d'être subsistant, implique tous les autres, vie, sagesse, etc. » C’est dire en termes équivalents : toute proposition appliquée à Dieu se résout, en définitive, dans l’affirmation de son existence : il est. Billot, De Deo uno et trino, Rome, 1897, p. 81 ; Earges, L’idée de Dieu, Paris, 189t, p. 286.

VI. Distinction d’avec i, 'essence divine. — Multiplicité d’attributs et essence infiniment simple sont incompatibles sans le secours de quelque distinction. La simplicité, surtout à son degré maximum, répugne à toute idée de division et de multiplication. Il est donc nécessaire pour concilier en Dieu attributs et essence de placer entre elles quelque nuance distinctive. C’est le thème ardu qui a alimenté, au moyen âge, la grande bataille d’abstractions livrée autour des universaux. Nous ne rapporterons de celle lutte gigantesque que les résultats appropriés à notre thèse et nous aidant à préciser le genre de distinction à introduire entre l’essence divine et ses attributs. Quelques éclaircissements de termes ne seront pas superflus pour la mise au point du débat. La distinction est l’acte nient. il par lequel on ae représente un objet, c’est-à-dire ce qui peut être le terme d’une pensée, comme non identique a un second objet. Chaque idée possède, en effet, son tenue propre

et n’en possède qu’un seul. Or, en comparant un premier terme de pensée ; iec un second, il peut se faire

que leur différence existe antérieurement à tout acte mental et indépendamment de lui, ei il basée sur des