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ATTENTION


très défectueuse. Cette dernière suffit évidemment pour qu’il y ait une certaine responsabilité, puisque le caractère moral de l’acte n’est pas ignoré absolument ; mais cette responsabilité est atténuée et ne peut jamais aller jusqu’à la faute grave. On verra pourquoi tout à l’heure.

Si l’on remarque, au moment où l’on agit, le caractère moral de l’acte qu’on accomplit, l’attention est actuelle. En ce cas, l’acte est imputable en lui-même. Mais un acte quelconque peut avoir des conséquences bonnes ou mauvaises qui viendront en leur temps ; ces conséquences, on peut les prévoir et remarquer leur caractère moral ; elles sont dès lors virtuellement connues. Ainsi prévues et acceptées, elles sont imputables, au moins in causa, à l’agent qui a mis en jeu leur cause eflicace. Voir Volontaire indirect.

S’il est indispensable que la moralité de l’acte soit réellement connue, il n’est pas nécessaire qu’elle le soit complètement, sans obscurité et avec une entière certitude. Il n’est pas besoin que l’on sache pourquoi l’acte n’est pas bon, ni même que l’on soit certain de sa malice ; il suffit de savoir, ou même, en certains cas t de soupçonner qu’il est mauvais. Agir, en tous ces cas, serait accomplir, de propos délibéré, un acte certainement ou probablement interdit par Dieu, c’est-à-dire pécher puisque l’homme n’a le droit de faire que ce qui lui parait certainement permis par Dieu.

De là découle une double conséquence : 1° L’ignorance complète et involontaire de la malice d’un acte excuse de tout péché ; c’est l’ignorance invincible. 2° Mais dès qu’il y a doute, dès qu’on soupçonne un acte de malice. en d’autres termes si l’ignorance n’est que vincible, il faut s’abstenir de l’acte suspect ou s’assurer, avant d’agir, que le doute n’est pas fondé. Voir Conscience douteuse et Probabilisme. L’ignorance est vincible dès qu’on remarque qu’il faut examiner de plus près la moralité de l’acte qu’on veut accomplir.

2. Si la matière est grave, quelle est l’attention requise pour qu’il y ait faute mortelle ? Il faut avoir remarqué la gravité de cette matière ; sinon, on n’en est pas responsable. Celui-là, en etlèt, qui accomplit un acte quelconque interdit sub gravi, sans connaître la défense portée, en réalité’ne veut pas offenser Dieu gravement, puisqu’il n’y pense même pas, et Dieu ne lui imputera pas ce qu’il n’a pas voulu.

Par suite, si l’intelligence ne peut se rendre compte de la gravité d’une faute, il ne peut y avoir de péché mortel. Or c’est toujours ce qui arrive dans le cas d’advertance imparfaite : l’intelligence peut bien alors Vaguement connaître la malice d’un acte ; elle est incap ; ilile d’en comprendre la gravité. L’adverlance parfaite est donc nécessaire pour qu’il y ait péché- mortel. La connaissance qui en résulte peut être certaine ou simplement probable : ou bien on voit clairement que la faute est grave, ou bien on ne fait que le soupçonner. A^ir, si l’on est sur qu’il y a matière grave, est évidemment commettre un péché mortel ; mais il n’est pas -saire que l’on ait cette certitude : c’est assez d’un simple soupçon. Soupçonner, en effet, c’est savoir que l’acte peut être interdit sub gravi ; et l’accomplir malgré cela, c’est consentir à ce que, par son fait, Dieu suit gravement offensé ; c’est accepter le péché mortel. De là l’obligation de prendre le parti le plus sur en s’abinl de Parte douteux, ou de s’assurer avant d’agir que les soupi oiis ne sont point fondés. Voir CONSCIENCE ël Probabii

On peut se placer à un double point de vue pour apprécier un acte mauvais : l’examiner par rapport è Dieu et le considérer comme une désobéissance aux lois divines, ou bien, s ; ms remarquer formellement ce qu’il iix yeux de Dieu, le concevoir comme un désordre, comme un mal que la conscience déclan interdit et qu’elle reproche s’il ri commis. La gravité d’une faute ige de même : l’acte apparaît soit comme la viola tion d’une loi divine importante, soit comme une chose gravement répréhensible, profondément inconvenante, très contraire à la raison. Il suffit de percevoir de cette seconde manière la malice du péché et sa gravité, car, selon la remarque, fréquemment rappelée, de saint Liguori, Theol. nior., 1. V, n. Il : Ille qui operatur contra rectam ratioriem, etiamsi non repulat Isedere se Deum, reipsa jam lœdit ; offendendo enim naturam rationalem, offendit simul ipsius naturm auctorem.

Il n’y a donc pas lieu de distinguer entre péché théologique et péché philosophique. Voir Alexandre VIII, col. 749, 750, le sens, l’histoire et la condamnation de cette distinction.

2° Que devient la responsabilité morale quand cette attention fait défaut ? — L’inattention de l’agent peut être involontaire ou volontaire. Involontairement inattentif, l’agent n’est pas responsable de l’acte accompli, puisqu’il ne pense pas à sa moralité et que, d’autre part, cette inadvertance n’est pas voulue, donc pas imputable. De ce côté, aucune difficulté ; mais la question devient plus délicate si le manque d’attention est volontaire. L’inattention peut être volontaire en elle-même ou dans sa cause. Elle est volontaire in se en celui qui, incertain de la moralité d’un acte, voit qu’il faudrait l’examiner de plus près et ne veut pas le faire. Il sait du moins que son acte peut être mauvais ; s’il agit, il est responsable d’avoir sciemment voulu un acte qui est peut-être illicite. La faute est grave, s’il craint que l’acte soit interdit sub gravi, légère dans le cas contraire. Certains théologiens, cités par saint Liguori, Theol. nior., 1. V, n. 4, soutiennent qu’en pareil cas, l’ignorance étant volontaire, l’agent est responsable de tout ce qu’il y a de répréhensible dans son acte, qu’il ait pu le connaître ou non. Cette opinion est insoutenable, remarque justement saint Liguori, car si l’on répond du mal que l’on soupçonne, parce qu’on le connaît en quelque manière, on ne répond pas de celui qu’on ignore absolument. Or, dans l’acte ainsi accompli, il peut y avoir des circonstances qui échappent totalement aux soupçons. De celles-là, on ne peut être responsable.

L’inattention est volontaire in causa, lorsque sciemment on met en jeu des causes qui empêcheront de remarquer, au moment voulu, le caractère moral de l’acte à accomplir. C’est le cas de celui qui, tenu de posséder une science quelconque, ne l’a pas et qui, sachant à quelles dangereuses erreurs l’entraîne son ignorance, ne veut pas prendre la peine de s’instruire ; de celui qui, voyant à quels excès le mènent ses mauvaises passions ou ses habitudes dépravées, ne veut rien faire pour les combattre. L’ignorance, la passion ou l’habitude l’empêchent souvent de voir clairement ou même parfois de soupçonner confusément les fautes dans lesquelles il tombe. Mais cette inadvertance, alors involontaire, est la conséquence connue et acceptée d’une cause librement posée. Quelle est, en ce cas, la responsabilité morale de l’agent ? C’est toujours d’après le degré de connaissance qu’elle se mesure. Or l’agent sait que Celle ignorance, ces passions, ces habitudes, entretenues ou conservées volontairement, l’amènent à commettre des actes contraires aux lois divines. En acceptant cette ignorance, ces passions, ces habitudes, il consent à ce que Dieu soit ainsi ollensé ; et ce consentement évidemment est coupable. Dans quelle mesure’.' Il y a lieu d’appliquer ici les règles du volontaire indirect. Voir Volontaire INDIRECT. Il es ! à noter que, pinson se lusse aller à ces

négligences, à ces passions, à ces habitudes mauvaises, mieux on s.iil par expérience à quelles butes elles conduisent ; la culpabilité augmente dans I : Sme proportion.

s. Thomas, Sum, theol., I" II", q. i. a, 8, 8 ; q, îx, a. 1 ; q. ni, a. : i. 5, 6 ; lescommi ntateui de s. Thomas ; Suaret, Tract. devotuntario et tnvoluntario m génère deque actibus > tani in spedali, disp. IV, sect. tu ; S. Liguori, Tlicologia mu) a-