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ASIE (MISSIONS CATHOLIQUES DE L’)


Clément XI et Innocent XIII moururent avant d’avoir prononcé ; ce fut Henoit XIII qui, le 12 décembre 1727, confirma les condamnations ; cependant l’affaire revint encore devant le Saint-Office, sous Clément XII qui adopta les décisions de ses prédécesseurs, le 24 août 1734. Ibid., t. ii, p. 448-453. Comme, tout en se soumettant et en prêtant le serment imposé par une constitution publiée le 13 mai 1739, ibid., t. ii, p. 501-504, plusieurs missionnaires renouvelaient leurs instances, Benoit XIV trancha une dernière fois la question par la bulle Omnium soU’tcitudinum, du 12 septembre 1744. Ibid., 1890. t. iii, p. 166-182.

L’effet de ces malheureuses discussions fut certainement de décourager certains convertis qui, à la suite de concessions que l’Église a jugées imprudentes, avaient mal compris la portée des engagements qu’on leur demandait avant de les admettre au baptême, et qui, esclaves d’un attachement coupable à des usages superstitieux, préférèrent retournera l’infidélité ; il y eut donc des défections, moins cependant que certains auteurs ne l’ont dit dans l’intention plus ou moins consciente de discréditer les bulles pontificales. Ce qui fut plus grave encore, ce fut de découvrir aux indigènes les faiblesses de ceux qui avaient à leur enseigner la perfection ; dans ces interminables discussions, il fut dit des paroles acrimonieuses, mis en avant, trop à la légère, des accusations passionnées qui discréditèrent les deux partis et influèrent désastreusement sur le développement des missions. Enfin, dans cet amas de médisances, les ennemis de la Compagnie de Jésus devaient trouver des arguments qu’ils devaient exploiter avec ceux qu’ils tireraient de la querelle des rites chinois.

Les missions de Chine passèrent en effet par une crise identique dans son principe si elle fut différente dans son développement.

On ne rendra jamais un hommage suffisant au zèle apostolique des missionnaires jésuites ; ils ont bravé la mort, ils ont marché au martyre avec une constance admirable ; leur formation religieuse et scientifique en faisait d’incomparables ouvriers et l’obéissance mettait tous ces hommes de vertu et de talent dans la main de supérieurs expérimentés qui savaient les uliliser, chacun selon ses aptitudes, et encourager au besoin l’esprit d’initiative dans les limites d’une action commune.

Les jésuites, apôtres avant tout, voulaient la conversion des infidèles ; ces infidèles ils les trouvaient dans un état de civilisation tout différent de celui des peuples d’Occident. C’étaient les mêmes âmes, mais il semblait que les cerveaux fussent autrement organisés et il fallait, pour arriver à leurs intelligences, que les idées européennes fussent habillées à la chinoise : c’est à ce prix qu’était le succès de leur apostolat. Ils furent donc amenés à adopter cette règle, que pour faire accepter les principes fondamentaux et essentiels du christianisme, il faut faire le sacrifice des formes accessoires et tolérer, quand ils n’étaient pas directement opposés au christianisme, les images immémoriaux du pays ; ils allèrent plus loin et crurent pouvoir conserver certains usages superstitieux en ayant soin de les dépouiller de ce qui était contraire à la foi ; c’est ainsi que le culte des ancêtres pouvait se transformer en prières pour les morts. Mais où étail la limite entre les concessions légitimes et celles qui ne pouvaient être tolérées ?


C’était un point qui ne pouvait être laissé à l’appréciation individuelle, ni même au sentiment commun d’un groupe de religieux. C’est pourtant ainsi que commença la dispute el 1rs discussions d’homme à homme et de société a société n’ont généralement pour résultat que d’amener de part et d’autre des exagérations et dei violences ; cette confusion ne fil qu’augmenter, quand les ieux d’Europe saisirent de la question nu public incompétent, alors que la seule autorité qualifiée pour

juger en dernier ressort, attendait que des informations prises à la source lui permissent de se prononcer.

Il n’en est pas moins vrai que, grâce à l’interprétation qu’ils croyaient pouvoir donner à des rites qui depuis ont été déclarés superstitieux, les jésuites s’étendirent rapidement en Chine ; les pères Rho et Schall, admis à la cour, furent chargés de travailler à la rédaction du calendrier impérial, et après la révolution qui renversa, en 1644, la famille des Ming, ils restèrent au service de la nouvelle dynastie qui leur montra la plus grande bienveillance ; l’empereur Chung-hi, s’intéressant aux sciences exactes et naturelles, recherchait les missionnaires dont les connaissances en botanique, en astronomie et en mathématiques étaient appréciées à leur juste valeur ; le P. Schall était président du « tribunal des mathématiques » et honoré de la dignité de mandarin. Il avait ainsi gagné pour lui et ses confrères la liberté de prêcher l’Évangile ; en quatorze ans (1650-1664), plus de cent mille Chinois reçurent le baptême.

Pendant la minorité de Kang-hi, une courte mais cruelle persécution s’était déchaînée contre les chrétiens ; le P. Schall fut arrêté, torturé et condamné à mort ; cependant, il ne fut pas exécuté et fut même remis en liberté, mais épuisé par les tourments il s’éteignit en 1666, à l’âge de 75 ans. Le P. Verbiest lui succéda dans ses fonctions scientifiques et dans la confiance du nouvel empereur qui se montra tout d’abord très favorable au christianisme.

A cette époque la querelle des rites était commencée depuis longtemps : c’étaient les dominicains et les franciscains espagnols établis au Fo-Kien, mais venus des Philippines, qui, les premiers, avaient été choqués par les concessions faites aux idées chinoises : la question portée à Rome, sous la forme de cas particuliers, avait été tranchée de la même façon ; en 1645 Innocent X avait condamné les pratiques signalées par le dominicain Morales, mais en 1656 Alexandre VII avait donné raison au jésuite Martini ; une réplique de Morales avait amené un décret de Clément IX, en 1669, où il était dit que les réformes précédentes visaient des cas différents et devaient être entendues de la manière dont les faits étaient présentés. Rome se tenait sur la réserve, suspendant son jugement définitif ; le jour où les faits seraient établis avec certitude, il serait possible de donner une règle générale et d’en imposer l’observation. Plus que jamais le besoin se faisait sentir d’avoir dans l’Extrême-Orient des évêques représentant directement l’autorité du saintsiège, mais il fallait compter avec, les répugnances exprimées par les ordres religieux et surtout l’opposition du Portugal ; puis il fallut trouver des prêtres séculiers capables d’aller exercer dans les missions lointaines, la charge de l’épiscopat toujours redoutable, mais particulièrement difficile dans les circonstances qui se présentaient alors. Ces hommes se rencontrèrent dans la personne des premiers prêtres de la Société des missions étrangères de Paris. En 1658, Ms’Pallu fut nommé évoque du Tonkin, avec juridiction sur les provinces de Vun-nan, Kouei-tcheou, Su-tchuen et Ivouang-si ; Mo^de ha Molhe Lambert fut nommé évéque de Béryte, vicaire apostolique de la Cochinchine.duTché-Kiang, du Ko-Kien, du Kiang-si et du Kouang-tong ; Mar Cotolendi, évêque de Nankin, devait administrer le Petchili, le Chan-tong, le Chan-si et la Corée, mais mourut avant d’arriver. Juris ponii/icii de Propaganda fuir, t. i, p. 313-314. Les autres évêques arrêtés par le mauvais vouloir des Portugais se fixèrent dans le royaume de Siam où le christianisme jouissait d’une complète liberté. En 1670, Mu* Pallu retourna à Rome pour chéri’her des ouvriers évangéliques et y recevoir de nom elles instructions ; en retournant en Chine, il prit mille précautions, car il (allait éviter la rencontre des Hollandais qui pendaient les prêtres, des Portugais, qui les envoyaient à ( ! oa, dans les prisons de l’Inquisition ; capturé par les Espagnols,