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ASIE (MISSIONS CATHOLIQUES DE L' ;


disposition du prince l’un de ses premiers disciples : François-Xavier s’embarqua, en 1541, pour les Indes.

Il est difficile de comprendre comment en moins de dix ans un homme peut donner une somme de travail comparable à celle que fournit le saint jésuite. Il établit à Goa le collège de Saint-Paul où les élèves ne tardèrent pas à arriver en foule ; de plus, parcourant le littoral, il établit solidement la foi sur la cote du Malabar, la côte de Travancore, la côte de la Pêcherie et dans les royaumes ceylanais de.lafnapatam et de Kandy ; en 1515, il visite Malacca, en 1546, les Moluques, de 1549 à 1551, il annonce la bonne nouvelle au Japon et vient enfin mourir dans l'île de Sancian, au moment de pénétrer en Chine ; il avait été rejoint par un certain nombre de compagnons dont l’un, le P. Antoine Criminal, fut le premier martyr de la Compagnie, en 1549. L’intluence du saint se fit sentir partout où il passa ; d’innombrables infidèles demandèrent le baptême et même un grand nombre d’Européens, touchés par ses exhortations, conformèrent leur conduite aux devoirs que leur imposait leur caractère de chrétiens et vécurent, non comme des conquérants, mais comme des civilisateurs.

Les progrès accomplis à cette époque par les missionnaires dominicains et franciscains montrent que le temps d’arrêt qui s'était produit avant l’arrivée de saint François-Xavier n’avait pas été de longue durée. Le saintsiège jugea donc le moment venu d’instituer une juridiction régulière dans les pays de l’Inde qui avaient relevé jusque-là de l'évêque de Funchal. En 1534, avait été créé l'évêché de Goa, dont le premier titulaire fut un franciscain, Jean d’Alhuquerque. En 1557, deux nouveaux diocèses furent établis à Cochin et à Malacca. Goa, avec le titre d'église métropolitaine et primatiale, étendait son autorité sur le littoral de la mer des Indes jusqu'à Sofala et Mozambique ; de Cochin relevaient le Malabar, Ceylan, le Bengale et le royaume de Pegou (c’est-à-dire la Birmanie) ; Malacca étendait sa juridiction dans tout l’extrême-est (Chine, Corée, Japon) jusqu’au jour où un évêque fut nommé à Macao. Les titulaires des nouveaux évèchés furent deux dominicains : à Malacca, George de Sainte-Lucie, à Cochin, Georges Themudo qui devint, en 1568, archevêque de Goa et dont le successeur à Cochin, Henri de Tavora, passa à son tour, e.i 1578. sur le même siège archiépiscopal.

Les dominicains chargés de Malacca et de l’archipel des Moluques, instituèrent, en 1545, une branche spéciale de leur ordre, la congrégation orientale des Indes qui, dès 1518, envoya de nombreux missionnaires dont le plus connu est le P. Bermudez. Le franciscain Bonfer pénétra dans le Pegou sur lequel il a laissé de nombreux renseignements. Enfin, les jésuites, continuant l'œuvre de saint I rançois-Xavier au Japon, y obtinrent des succès extraordinaires ; une ambassade japonaise se présenta en 1585 aux pieds de Grégoire XIII, qui la reçut peu de jours avant sa mort, et de Sixte-Quint, au couronnement duquel ils assistèrent. Mais, pendant ce temps, d<' graves événements s'étaient produitsau Japon et une révolution politique amena un revirement complet dans l’attitude que les gouvernants avaient eue jusque-là à l'égard du christianisme. Il faut ajouter aussi qu’en 1580, la dynastie régnante en Portugal s'étant teinte, le roi d’Espagne Philippe II s'était fait reconnaître roi et que, pour soixante ans, la couronne de Portugal se trouvait réunie à celle d’Espagne ; ce changement n’avait pas été sans léser de grands intérêts dan : I I ilréme-Orient, et des jalousies de toute sorte avaient amené les Espagnols et les Portugais à se reni dis accusations dont l'écho était venu diminuer parmi 1rs Japonai : le sentiment de respect que leur avaient inspiré jusque la les étrangers ; enfin les Espagnols, nouveaux venus 1 1 peu au courant îles usages du pays, avaient commis certaines maladresses et blessé des susceptibilités, parfois très légitimes. Be ces divi sions et de ces imprudences sortit une persécution qui devait faire couler des flots de sang, et amener pour deux siècles la disparition complète, au moins le cruton, du christianisme japonais. Le 15 février 1597, vingt-six croix furent dressées sur une colline voisine de Nagasaki et on y attacha vingt-six confesseurs de la ioi, dont trois jésuites, six franciscains ; les autres, parmi lesquels étaient des femmes et des enfants, appartenaient au tiersordre de Saint-François ; ces martyrs ont été béatifiés par Urbain VIII, en 1627, et canonisés par Pie IX, en 1862. Pie IX a canonisé, en 1867, 205 autres martyrs exécutés de 1617 à 1632 ; des milliers d’autres sur lesquels il n’a pas été possible de recueillir des inlormations juridiques assez précises ont péri dans la même période par le fer, le feu, la croix et d’autres tourments que l’imagination des bourreaux avait poussés à de savants raffinements.

Ce qui contrista le plus les martyrs, après de nombreuses apostasies de leurs néophytes, ce fut de voir, du côté de leurs persécuteurs, des chrétiens d’Europe, Anglais et Hollandais protestants. La guerre était déchaînée en Europe, la guerre de Trente ans, que les passions religieuses rendaient plus impitoyable que toutes celles qui avaient précédé.

L’Angleterre et les Pays-Bas avaient attaqué sur mer les Hottes espagnoles, et avec un tel succès qu’une grande partie des possessions de l’Espagne en Afrique et en Asie changèrent de maîtres : de nouvelles puissances coloniales paraissaient dans l’Extrême-Orient et, pour se faire bien venir des infidèles, se donnaient comme les ennemis des Espagnols catholiques ; les Portugais et les Espagnols avaient soutenu les missionnaires et avaient cherché à profiter politiquement et commercialement de leurs succès ; les Anglais et les Hollandais vont exploiter cette association et ruiner du même coup et l’influence catholique et celle des Espagnols. Peu importe à ces marchands avides de renier leur ioi, si tant est qu’ils en aient une, si leur apostasie leur ouvre l’accès du marché d’où sont bannis les catholiques. C’est de là que date, au Japon, l’usage odieux qui s’est perpétué pendant deux siècles, de placer à terre dans les ports de débarquement une croix que les arrivants devaient fouler aux pieds ; on avait trouvé le moyen le plus sûr d’empêcher les catholiques de s’introduire dans le pays.

L’entrée de la Chine n'était guère moins bien gardée que celle du Japon. Les Portugais s'étaient fait céder par l’empereur Kouang-hi un petit territoire, l'île de Macao, où les marchands étaient comme parques sous la surveillance des officiers du vice-roi de Canton. En 1557, y fut établi un évêché dont la circonscription comprenait tout le pays situé au delà du détroit de Malacca. Les premières tentatives faites pour pénétrer dans l’empire chinois remontent à cette époque : les franciscains et les jésuites de Macao s’instruisaient de la langue et des usages afin de se lancer à la recherche des anus. Ce fut cependant un augustin des Philippines, Martin de llerrada, qui fil les premiers essais, avec l’aide de quelques Chinois convertis à Manille ; les dominicains se mirent aussi à la recherche du moyen de forcer la ligne interdite, mais ce furent les jésuites qui réussirent les premiers. En 1679 le père Ruggieri s'établit à Canton et peu après à Tchaoking, ville située un peu à I ouest sur le Si-Kiang. Grâce à la bienveillance des mandarins qui admiraient la pureté de sa doctrine, il

eut la permission de faire Venir quelques confrères et d’OUVrir une chapelle. Parmi les nouveaux mission paires se trouvait le P..Mathieu Ricci qui, (Haut devenu très versé dans la langue et les lois de la

chine, put établir di’s résidences à Nan-tchang-fou, dans le Kouang-Si, en 1588, à.Nankin, en 1595 et enfin, après plusieurs voyages, i Pékin, en 1696, 1598 et 1601, finit par être reçu en audience par l’empereur Ching-lsing ;