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1981
1985
ARNAULD


en 1665, les religieuses refusèrent obstinément de le f ; iire, à moins qu’on ne les laissât joindre à leur signature une réserve sur le fait de Jansénius. Arnauld, qui avait inspiré cette résistance, composa ou aida à composer une quantité de factions pour la justifier. L’affaire des « quatre évêques » et la paix de Clément IX, qui la termina (1668), l’occupèrent également ; et, dans les négociations qui amenèrent la conclusion de cette paix, sa sincérité ne brille pas plus que celle des évêques jansénistes. A ce moment, néanmoins, il était le maître de commencer une carrière nouvelle, où il aurait eu pour lui les sympathies et les éloges du monde catholique tout entier. Il parut d’abord le vouloir, en s’appliquant avec ardeur à écrire contre les protestants. En particulier, le grand ouvrage de la Perpétuité de la foi de l’Eglise touchant l’eucharistie (lequel, à la vérité, est surtout l'œuvre de Nicole) lui valut les félicitations des papes Clément IX et Innocent XI, et lit classer son nom parmi ceux des plus éminents défenseurs de la foi catholique.

Cependant, après dix ans de trêve, en 1679, Louis XIV, irrité de voir que Port-Royal demeurait toujours un centre de coterie, sinon d’opposition, lui lit sentir de nouvelles rigueurs. Arnauld, averti qu’on était aussi mécontent pour les « assemblées » qui se tenaient chez lui à Paris, et pour l’influence qu’on lui prêtait sur des évêques incommodes, crut devoir assurer sa liberté, en quittant volontairement la France. Il en sortit, en juin 1679, pour n’y plus rentrer jusqu'à sa mort. Durant les quinze années de retraite presque solitaire qu’il passa en divers lieux des Pays-Bas espagnols etde la Hollande, il déploya une activité île plume plus féconde que jamais. Ses écrits de cette période, anonymes pour la plupart, afin de forcer moins malaisément l’entrée de la France, touchent à toute sorte de sujets : défense de la traduction port-royaliste du Nouveau Testament, dite « de Mons » , et plaidoyer en faveur de la lecture de l'Écriture sainte en langue vulgaire ; réfutation de plusieurs pamphlets de ministres protestants français ; invective contre Guillaume d’Orange, « nouvel Absalon, nouvel Hérode, nouveau Cromwell ; » critique du système philosophique de Malehranche sur les idées et de héories sur la -race, etc. A ces publications, où l’on rencontrait bien des parties recommandables, s’en ajoutèrent malheureusement beaucoup d’autres, prouvant que l’exilé restait toujours chef de secte. Entre les d" ce dernier genre, celui dont il était lui-même le plus content et dont il espérait de grands résultats, fui le Phantôme du jansénisme (1686). Le but était, comme il le dit dans sa correspondance, de « justifier les prétendus jansénistes en montrant que le jansénisme n'était que fantôme, parce qu’il n’y a personne dans l'Église qui soutienne aucune des cinq propositions condamnées, el « pi il n’es ! point défendu de discuter si ces cinq propositîonsonl été enseignées par Jansénius » . Lettre du 20 septembre KiWi. Le dernier point était sur quoi il insistait le plus et, pour l'établir, il cherchait à faire croire que, lors des négociations pour la paix de Clément IX, < le Baint-siège avail reconnu que l'Église n'était pas infaillible.i l'égard du fail de Jansénius et qu’elle n’en pouvait exiger la créance par voie de commandement. » Rien de plus faux. La vérité est que, si le saintn, i jamais émis d’affirmation théorique sur ['infaillibi lité de I l -h < quant.m lad de Jansénius, s’il n’a pas inscrit la cro anci.i cette infaillibilité parmi les conditionde l.i h paix de Clément IX » , il a toujours affirmé, théoriquement et pratiquement, son droit d’exiger la ince du fail en question. Rien de plus net, dans ce restitutions d Innoci ni X et surtout d’Aindre VII et que le formulaire imposé par ce dernier. Quant a Clément IX. il a clairement déclaré, avant et après i ion de l’accommodement qui porte

son nom, qu’il iii.Miiien.nl pleinement les décisioE de

ses deux prédécesseurs, et qu’il n’accordait la « paix » aux quatre évêques et à Arnauld lui-même, que sur les assurances formelles, données en leur nom, de leur soumission sincère à ces décisions. Au surplus, Arnauld n’ignorait rien de tout cela ; mais il avait des ressources de dialectique particulières, qui lui permettaient de prouver mathématiquement que les papes ne voulaient pas dire ce qu’ils disaient, et de formuler mieux qu’euxmêmes leur vraie pensée. Sainte-Beuve constate aussi que « l’obstination à savoir mieux que les papes ce que ceux-ci pensent et définissent, est la thèse favorite des jansénistes à partir d’Arnauld » . Port-Royal, 1. III, c. vin. L’assemblée du clergé de France, en 1700, sur le rapport de Bossuet, condamna cette proposition : Le jansénisme est un fantôme, comme « fausse, téméraire, scandaleuse, injurieuse au clergé de France, aux souverains pontifes, à l’Eglise universelle » , enfin comme « schismalique et favorisant les erreurs condamnées » .

Mais ce qui a occupé Arnauld plus que tout, durant ses quinze dernières années, c’est la guerre contre les jésuites. Il n’est point de professeur obscur, dans un collège lointain, qui puisse laisser échapper une thèse critiquable, sans que l’exilé en soit averti et lance du fond des Pays-Ras une dénonciation retentissante, où, suivant la tactique des Provinciales, Tordre tout entier est rendu solidaire des opinions de chaque membre. Parallèlement à ces attaques de détail, il poursuivit avec une application extrême l’entreprise plus vaste de la Morale pratique des Jésuites représentée, en plusieurs histoires arrivées dans toutes les parties du monde. Un premier volume avait paru sous ce titre en 1069, et avait été suivi d’un second en 1683 ; l’auteur anonyme des deux était M. de Pontchàteau, l’un des plus fameux solitaires de Port-Royal. Les missionnaires jésuites y étant particulièrement attaqués, le P. Le Tellier, futur confesseur de Louis XIV. répliqua par la Défense des nouveaux chrétiens et des missionnaires de la Chine, du .In lion et des Indes (Hii-w). C’est alors qu’intervint Arnauld, d’abord pour « justifier » les deux premiers volumes de la Morale pratique, puis pour ajouter de nouvelles « histoires » à celles que Pontchàteau axait racontées. Il publia ainsi, d’année en année, de 1690 à 1093, cinq nouveaux volumes, et en tenait prêt, quand il mourut, un sixième auquel il donnait pour titre particulier : De la calomnie ; ce dernier volume parut en 1695. C’est surtout dans la correspondance d’Arnauld avec Louis du Vaucel, l’agent du jansénisme à Rome, qu’on peut remonter aux sources de la Morale pratique et suivre les voies secrètes par lesquelles le grand ennemi des jésuites recevait ses pièces. Il a su ires habilement exploiter les contestations que les jésuites ont pu avoir avec des prélats et d’autres prêtres ou religieux, principalement dans les pays de missions. Toul

le monde sait iment dequen Iles de ce genre, où

les deux partie--, souvent, obéissent à d’excellents mobiles et peut-être ont également raison a des points de

vue différents, peuvent influencer des esprits pieux, honnêtes, jusqu'à les rendre témoins peu sûrs et rapporteurs inconsciemment infidèles de ce qu’ils oui vu

ou entendu, ou cru voir et entendre. Cette observation

d’expérience suffit pour infirmer la valeur des autorités

les plus sérieuses qui appuient les accusations de la Mi, mie pratique ; inutile de parler des, mires. On ne veut pas dire par là que toutes les <. histoires s d eros pamphlet soient fausses ; mais pour savoir ce qu’elles contiennent de vrai, il raiidr.nl pratiquer, beaucoup plus que ne l’a fait Vrnauld, le principe : Audiatur ei altéra pars. La vie inquiète du vieux docteur jansés’acheva dancette âpre polémique. Il mourut à Bruxelb -, le o août Iti'.ii. âgé de plus de quatre-vingttrois ans. Son cœur lut rapporté a Port-Royal

Champ, el i ne moire lut célébrée par de nombreuse-