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ARIANISME CHEZ LES PEUPLES GERMANIQUES


monde, du Saint-Esprit inférieur et subordonné au Fils non moins qu’au Père, du Logos tenant lieu dans le Christ de l'âme raisonnable. Wilkins, Concilia magnée. Britannise et Hibernise, Londres, 1737, t. iv, p. 616-651. Winston fut censuré et privé de sa chaire par l’université de Cambridge. L’année suivante, Clarke entrait en scène, en publiant son livre : Tlte scriplure doctrine of the trinity, Londres, 1712, déféré, comme celui de Winston, aux autorités ecclésiastiques en 1714. A son tour, il insistait sur la génération ou la production du Fils par la volonté du Père et sur la subordination de la seconde et de la troisième personne à la première ; en particulier, il rejetait comme contradictoire dans les termes mêmes la doctrine des trois personnes dans l’unité numérique de nature, et niait l’existence de trois personnes éternelles, incréées ou toutes-puissantes. La Chambre haute se contenta d’une vague déclaration, où Clarke reconnaissait « que le Fils de Dieu a été éternellement engendré par l'éternelle et incompréhensible puissance du Père, et que pareillement le Saint-Esprit a procédé éternellement de l'éternelle et incompréhensible puissance et volonté du Père » . Wilkins, op. cit., p. 657659. Mais la lutte, provoquée par ces livres, continua quelque temps, et produisit un vrai trouble dans l'Église anglicane. Plus tard, la tendance soçinienne et unitaire s’est principalement manifestée.

IX. Caractère de l’arianisme dans les temps modernes. — C’est surtout dans le genre d’attaques dont ils se sont servis à l'égard du dogme catholique et dans une tendance rationaliste de plus en plus saillante qu’il faut chercher la caractéristique des ariens modernes ; caractéristique facilement explicable par l’influence qu’exerçaient sur eux le principe du libre examen et le développement du criticisme. A ces esprits il ne suffisait plus que l'Église présentât son dogme traditionnel ; ils voulurent le contrôlera la pure lumière de la raison et, sur le terrain des faits, lui contester ses titres. De là un double genre d’attaques. Du premier, quelques mots suffiront ici ; ce sont les objections généralesde la raison humaine contre le mystère d’un Dieu unique en trois personnes consubstantielles : contradiction patente et criante ; incompatibilité de l’aséité avec la génération du Fils ou la procession du Saint-Esprit, et autres objections assez connues, dont l’examen se rapporte à l’explication et à la défense du dogme trinitaire. Remarquons seulement que ces objections eurent sur beaucoup d’esprits philosophiques du protestantisme, surtout en Allemagne, une influence aussi dangereuse pour le il _ mi : que l’arianisme lui-même ; elles les amenèrent à des tentatives d’explication rationnelle de la trinité chrétienne qui en détruisaient réellement la vraie notion. Ainsi en fut-il, par exemple, dans l'école deWolf, et chez Kant, De Wette, Schelling, Hegel, Feuerbach. Même parmi les catholiques, certains n’ont pas échappé à cette influence ; il suffit de citer Gùnther qui, dans sa théorie de la trinité-, censurée par l’Eglise romaine, formait un mélange des erreurs sabellienncs, ariennes et

istes. L’autre genre d’attaques vint d’esprits plus positifs ; on

ila, sur le terrain scripturaire ou traditionnel, la doctrine proclamée à Nicée. Les sociniens avancèrent hardiment qu’avant ce concile les chrétiens avaient des sentiments semblabl ira sur la personne du Fils

di Dieu ou sur la trinité en général. La thèse fut soutenue par Zuicker, Irenicon Irenicorum, Amsterdam,

. par Courcelles, Disserlationes, Amsterdam, 1659 ; uclcus historiée ecclesiasticte, Cosmopolis

terdam), 166 ! - avec appendices en 1676 et 1678 ;

Le Clerc, l sentiments de quelques théo H. lettre '>. Amsterdam, 1688

Avec les infiltrations sociniennes et ariennes, la I I i sa en Vngleten où elle eut, à diverses reprisi ohampions de marque tels, le Ir Bury, dans The naked

Gospel, Oxford, 1690 ; Locke, On the reasonableness of christianity, Londres, 1695 ; puis Whiston et Clarke avec leurs partisans ou leurs successeurs. Mais le dogme traditionnel trouva en Angleterre des défenseurs remarquables, dont les principaux furent G. Bull et Waterland. Le premierestsurtouteonnuparsa Defensio fidei niesense exscriptis catholicorum doctorum, qui intra triaprima Ecclesise christianse secula floruerunt, Londres, 1685 ; une assemblée du clergé de France lui fit présenter ses félicitations pour un autre ouvrage, publié en 1695 : Judicium Ecclesise calholiese trium primorum seculorum, de necessitate credendi quod Dominus noster Jésus C/iristus sit verusDeus. Waterland fut l’adversaire infatigable de Whitby et de Clarke dans sa triple Vindication of Christ’s divinity, 1719, 1723, 1724, et autres ouvrages de polémique. La question de la foi trinitaire et christologique de l'Église antique et des Pères anténicéens, soulevée ainsi, n’a pas cessé d’exister ; dans ce siècle et récemment encore, elle est revenue à l’ordre da jour. Voir Trinité chez les Pères anténicéens.

Une partie des considérations qui précèdent nous a déjà mis sur la voie de la tendance rationaliste dans l’arianisme moderne ; le libre examen, appliqué aux dogmes de la trinité et de l’incarnation sous la lumière de la pure raison, a eu pour effet de développer le rationalisme et le déisme latent, qui se trouvait à la base de l’hérésie arienne. La résultante a été ce qu’on s nommé de nos jours le « protestantisme libéral » ou encore « le christianisme ou théisme moderne » . Il suffira d’emprunter à M. A. Réville, Histoire du dogme de la divinité de Jésus-Christ, Paris, 1869, un passage où se reflète un ensemble d’idées venant de Lessing et de Schleiermacher : « Au Dieu de la Trinité doit se substituer le Dieu unique, supérieur et intérieur au monde, qui épanche dans l’immensité du temps et de l’espace les inépuisables richesses de sa puissance, dont le Verbe éternel est l’univers, révélation de sa pensée, expression de sa sagesse, gravitation perpétuelle de l’esprit créé vers l’Esprit créateur, dont il procède, qui l’aime puisqu’il l’attire, et vers lequel les créatures s'élèvent par une ascension mystérieuse. L’union du divin et de l’humain est en puissance dans toute âme humaine. Jésus est grand d’une grandeur suprême, parce que, parmi les fils de la terre, il a senti cette union en luimême si intense et si intime que, sans fermer un seul moment les yeux sur les misères de notre race, il n’a pu donner à Dieu d’autre nom que celui de Père. » Nous sommes, on le voit, loin de la foi de saint Athanaso, loin de l’arianisme adouci des eusébiens, loin même de l’arianisme d’Arius ; mais on peut reconnaître avec ces unitaires ou déistes modernes, que l’arianisme antique était gros des conséquences qu’ils ont tirées eux-mêmes. Reste à savoir pourquoi et comment ils se disent encore chrétiens.

La littérature relative à l’arianisme serait considérable, s’il fallait indiquer ouvrages et articles parus sur le sujet ; cilM trouve à peu prés complète dans u. Chevalier, Répertoire des sources historiques du moyen âge, Bio-bibliographie et Supplément, au mot Arius ; Topo-bibliographie, au mol Aria)iisme. Pour dégager les ouvrages d’ensemble, les études de détail citées déjà lie seront pas rappel

I. Sources anciennes, utilisées et Indiquées an cours de l’article. Du côté des orthodoxes, les œuvres historlco-dogmatiquea des Pères des iv et vsiècles, en pai ticulier des saints Mhanase, llilaire. Êplpbane, Basile, Grégoire de Nazianze et Grégoire do Nvsse ; puis les histoires ecclésiastiques de Rufln, Socrate, Soiie et Théodoret. Du trlens, lee fragments d’Arius si

do ses premiers partisans : puis, le résumé de l’histoire ecclésiastique de Pliil il' la littérature arienne et semiarienne en général, voir Bardenhswer, Patrologle, I ribourg-enBrisgau, 1894, S m. m. 1-2 ; gLXVin, - ret de I9, t. u. p. 9-20, 31 la littérature patristique antl-arienne des lu' Indices générales, seii- ix, /'. /… i. ccix, col. ' H5-736.

[I. Travaux postérieurs. — La partli Vs de Par »