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ARIANISME CHEZ LES PEUPLES GERMANIQUES


rain pontificat. L’avènement de Justin I er au trône impérial de Constantinople et ses édits contre l’hérésie, la sympathie dont les Romains firent preuve à l'égard de l’empereur orthodoxe, aigrirent peu à peu le puissant monarque arien et finirent par changer ses dispositions à l'égard des catholiques. Les soupçons et la défiance lui inspirèrent des mesures sanglantes : Boèce et son beaupère Symmaque furent mis à mort ; le pape Jean I", qui ne s'était pas acquitté d’une ambassade en Orient au gré du roi ostrogoth, fut jeté dans une prison où il mourut. Son successeur, Félix, fut en quelque sorte imposé au choix des Romains. La guerre ouverte était déclarée, quand Théodoric mourut, le 30 août 526.

Le prestige et la puissance de la monarchie gothique d’Italie cessèrent avec son fondateur. La fille du grand roi, Amalasonthe, d’abord régente sous la minorité de son fils Athalaric, puis reine après la mort de celui-ci, tenta de reprendre la politique de modération et de paix religieuse, mais elle périt par le crime de celui qu’elle avait pris pour époux et associé à sa royauté, le lâche et fourbe Théodat. Il s’ensuivit une guerre avec l’empereur Justinien, où toutes les sympathies des Romains furent pour le prince orthodoxe. En 536, Vitigès succéda à Théodat, assassiné par les siens ; vaincu et pris par Bélisaire, le nouveau roi est conduit, en 510, à Constantinople. La fortune des Ostrogoths fut un instant relevée par la vaillance du Visigoth Théodebald, et surtout par les exploits du farouche Totila (ôil-552) qui prit Rome deux fois, en 516 et en 519, et remit aux mains des barbares l’Italie presque entière. Ce fut un temps de deuil pour l'Église catholique, car ce monarque arien ne séparait point dans son esprit la guerre politique de la guerre religieuse, entraîné ou du moins encouragé dans cette voie par le fanatisme de ses Ostrogoths. La défaite de Totila par Narsès à Lentagio, sa mort, en 552, et celle de son successeur Théias, l’année suivante, mirent fin à la domination des rois ostrogoths en Italie. Ce fut le signal d’une réaction violente contre l’arianisme, si violente qu’elle emporta presque tous les monuments du règne de Théodoric.

VI. L’arianisme lombard. — La paix ne fut pas de longue durée pour les catholiques d’Italie. Destitué de son commandement à la mort de l’empereur Justinien, Narsès fit appel aux Lombards, peuplade germanique qui résidait alors en Pannonie. Sous la conduite d’Alboin, ceux-ci s’emparent, en 568, de la péninsule italienne, perdue à jamais pour les Byzantins, à l’exception de l’exarchat de Ravenne, du duché de Rome et de quelques autres territoires dans le sud. Demi-hérétiques et demi-païens, ces barbares se montrent surtout acharnés contre la race romaine, malgré les tendances plus humaines et plus politiques de leur chef. Le meurtre d’Alboin, en 573, et celui de son successeur Kleph, en 57"), furent suivis d’une période d’anarchie politique où, sous trente-cinq durs, pendant les dix ans de la minorité d’Autharis, l’Italie devint un champ de dévastation et de carnage ; les biens des églises et le sang i 1 prêtres ne furent pas plus épargnés que ceux de la noblee vaincui Paul Winfrid, De gratis Langobardorum, ii, 32, /'. L., t. xcv, col. 502. Peu à peu ice en partie à la division du royaume lombard i n duchés à peu près indépendants, grâce

aux prodiges dont I lieu glorifia ses martyrs, l'Église

catholique commença à reconquérir sa légitime in Is d’abord, les propres devinrent plus

raux, quand les alliances des rois lombards avec catholiques secondèrent les efforts du

è italien. Ce t ain i qu’en 589, le mariage du roi n pi incie catholique, Théodelinde, fille du due de Bavière, devint pour la partie arienne de la nation un moyen providentiel d’acheminement vers la vraie f, , j. Veuve dès l’année suivante, la reine Offrit sa main au duc Agilulfe de Turin qu’elle convertit

DICT. DE TIILOL. CATIIOL.

peu après ; celui-ci, à son tour, fit baptiser son fils Adelwald par un évoque orthodoxe et nomma en beaucoup d’endroits des ducs catholiques.

Saint Grégoire le Grand seconda de tout son pouvoir les efforts de Théodelinde et d’Agilulfe, comme on le voit par ses lettres à ces deux souverains. De là un mouvement important de conversions qui, après la mort du roi en 615 ou 616, se continua sous le gouvernement personnel de Théodelinde pendant la minorité de son fils. Mais à la mort de la reine, vers 623, Adelwald mal conseillé adopta à l'égard des principaux seigneurs lombards une attitude tyrannique qui aboutit à un soulèvement redoutable et lui fit perdre le trône. Il y eut une nouvelle succession de monarques ariens, qui se montrèrent d’ailleurs respectueux de l'Église catholique et n’entravèrent pas son influence toujours grandissante. Paul Winfrid, De gestis Langnbardorum, IV, 43-44, P. L., t. xcv, col. 579 sq. Rodoald, assassiné en 653, termina la série des rois ariens de Lombardie. La dynastie catholique de Bavière monta sur le trône avec Aribert I er, neveu de Théodelinde (653-663). L’usurpation de Grimoald, duc de Bénévent (663-673), ne changea rien aux affaires religieuses ; catholique lui-même, ce roi protégea les efforts que multipliaient les évêques pour convertir les ariens, et ce fut sous son règne que s’acheva cette grande œuvre dans la masse du peuple lombard. L’arianisme disparaissait ainsi de l’Occident.

VII. Caractère de l’arianisme germanique. — Un double aspect doit se distinguer ici, celui de la théologie et celui de l’histoire. Sous l’aspect dogmatique, l’arianisme germanique est à peu près sans importance. C’est surtout par le fait des circonstances, semble-t-il, que l'évêque Ulphilas, homme pratique et organisateur plutôt que théologien, se trouva pris dans l’engrenage de l’arianisme officiel de la cour impériale de Byzance. Les Germains encore barbares trouvèrent-ils dans le Logos et le Christ arien, sorte de Dieu inférieur au Père, quelque chose de plus immédiatement acceptable pour d’anciens adorateurs d’Odin ? Peut-être ; en tout cas, leur théologie resta stationnaire, tournant dans cett * série de textes scripturaires mal interprétés ou incomplets qu’ils avaient hérités des premiers ariens. Ain-i en est-il des monuments qui ont été déjà cités ; ainsi en est-il de ces sermons dont les fragments, édités par le cardinal Mai dans sa Nova colleclio scriptorum veterum, t. iii, ont été reproduits dans Migne, P. L., t. xiii, col. 593 sq. Malgré tout, l'œuvre apostolique d’Ulphilas ne fut pas complètement stérile ; bien qu’altéré et incomplet, le christianisme arien garda encore assez de vertu pour exercer sur les mœurs et les idées de ces peuplades barbares une profonde et salutaire inlluence. Du reste, l'Église catholique elle-même eut sa part dans cette action civilisatrice et moralisatrice. La supériorité de son clergé, dans l’unité et la fermeté de sa foi comme dans l'éclat de la sainteté et surtout dans son organisation hiérarchique, s’imposa partout ; les plus grands monarques des royaumes ariens se rendirent compte de cette force prépondérante, soit pour l’utiliser, comme Théodoric le Grand, soit pour la battre en brèche, comme Euric et les rois vandales. Le roc demeura ferme, et la présence persistante de l’arianisme en Occident eut pour effet de stimuler le zèle et l’action apostolique du clergé orthodoxe, afin de préserver les fidèles et de convertir les antres. De là, dans les écrits des docteurs et des évéques d’alors, tant de traités relatifs au mystère de la trinité, comme en signale Gennade dans son catalogue des auteurs ecclésiastiques ; ce sont des libelli en forme de brève exposition, des commonitoria ou avertissements, des lettres même. SUrtOUl des serinons et des

hymnes ; autant de signes des préoccupations où l’arianisme jetait l'épiscopat, du V au vile siècle, De lace

ces conciles réunis par les évéques, aussitôt qu’ils le pouvaient, pour organiser la discipline ecclésiastique

I. - 5'J