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ARIANISME, RÉACTION ANTI-NICEENNE


salion, comme le pense Théodoret ; jugea-t-il qu’il arriverait ainsi plus facilement à rétablir la paix dans l'Église, comme l’estiment, non sans vraisemblance, Socrate et Sozomène ; ou voulut-il seulement arracher le saint à ses ennemis, comme l’insinuent Constantin le jeune dans une lettre aux alexandrins et Athanase lui-même, Apol. contr. arian., 87, 88, P. G., t. xxv, col. 406, 407? Toujours est-il que Constantin ne permit pas aux eusébiens de remplacer saint Athanase sur le siège patriarcal d’Alexandrie.

Les eusébiens enregistrèrent un autre succès dans les premiers mois de 336. La procédure contre Marcel d Ancyre fut reprise dans un synode de Constantinople. Cet ardent nicéen avait composé contre Astérius un livre de combat où il malmenait, en même temps que ce sophiste, les principaux personnages du parti, les deux Eusèbe et Paulin de Tyr. On ne connaît ce livre que par la réfutalion qu’en a faite et les extraits qu’en a donnés Eusèbe de Césarée dans ses deux ouvrages, l’un polémique, Contra Marcellum, l’autre apologétique, De ecclesiastica theotogia, P. G., t. xxiv, col. 707 sq. A en juger par ces documents, voici quelle aurait été la doctrine de Marcel : le Logos est de soi la raison inhérente à Dieu qui n’a pu être engendré, mais il a quitté le sein de la divinité en vertu d’une énergie active, SpaarixT) ÈvépyEta, pour accomplir l'œuvre de la création et de la rédemption ; c’est en se faisant homme qu’il est devenu « fils » ; après l’accomplissement de son œuvre, il retournera dans le Père, pour s’y reposer comme dans le principe, et alors cessera le règne du Christ. I Cor., xv, 28. Ainsi, le Logos ne serait « fils » et ne subsisterait comme personne distincte, que d’une manière transitoire. Voir de Montfaucon, Diatriba de causa Marcelli Ancyrani, P. G., t. XVIH, col. 1278 sq. ; Th. Zahn, Marcellus vonvncijra, Gotha, 1867. La procédure aboutit à la proscription du livre et à la déposition de l'évêque, mais la manière superficielle dont l’examen fut mené et les protestations de Marcel contre l’interprétation donnée à sa doctrine feront de cette affaire un long sujet de discorde entre l’Orient et l’Occident. Quoi qu’il en soit de la question de droit, l’issue de cette affaire était en fait un succès pour les eusébiens, car ils ne manquèrent pas de voir et d’affirmer une étroite connexion entre l'ô|Aooij<no ; nicéen que soutenait Marcel et son sabellianisme, réel ou supposé.

Eusèbe de Nicomédie n’avait plus qu’un pas à faire g pour couronner cette série de triomphes, réintégrer solennellement Arius dans la communion ecclésiastique. Après le synode de Jérusalem, l’hérésiarque était allé à Alexandrie ; peut-être ses amis nourrissaient-ils le secret espoir de le faire monter sur le siège patriarcal. Mais les alexandrins, attachés à saint Athanase et vivement irrités de sa déposition, ne cachèrent pas leurs sentiments hostiles à l'égard de l’hérétique et commencèrent à se soulever. Arius fut alors mandé à Constantinople, soit que l’empereur eût à lui demander compte de son retour en Egypte, soil qu’Eusèbe de Nicomédie voulût profiter de la circonstance pour consommer la réhabilitation solennelle de son protégea Constantinople même, sous les yeux de Constantin. Interrogé de nouveau par celui-ci, Arius affirma par serment qu’il tenait la foi catholique, et ce serait alors que l’empereur aurait prononcé ces paroles : Si ta foi est véritablement orthodoxe, tu as eu raison de prêter serment ; si elle est impie, Dieu te juge pour Ion serment. » Les eusébiens mirent en mesure d exécuter leur projet ; mais ils trouvèrent un advei aire décidé dans le vieil évéque de

la ville impériale. Co te ils lui exprimaient leur ferme

résolution d’accomplir leur dessein de force le lendemain dimanche, sainf Alexandre eut recours à Dieu el lui demanda, ou de le retirer de ce monde, ou de ne pas permettre m 1 " on héritage tut touillé par la préiie « le i hérétique, Le soir de ce même samedi, Arius

traversait la ville escorté d’une suite nombreuse, quand, près du forum de Constantin, un besoin subit le contraignit à chercher un endroit écarté ; bientôt on l’y trouvait mort dans des circonstances qui ont permis aux anciens historiens de lui appliquer les paroles de la sainte Écriture relatives au traître Judas : Diffusa sunt viscera ejus. Act., i, 18. Tel est, en substance, le récit que nous a laissé saint Athanase, d’abord d’une façon succincte dans la lettre Ad episcopos sEgypti et Libyse, écrite en 356, puis en détail dans la lettre à Sérapion, De morte Arii, composée en 358 sur les renseignements du prêtre Macaire, présent à Constantinople à l'époque des événements. P. G., t. xxv, col. 580, 581, 685-690.

Ce récit se retrouve, avec certaines divergences dedétail, chez Rufin et Socrate ; Sozomène et Théodoret ont cité saint Athanase. Sans sortir du IVe siècle, lesallusions à la mort terrible de l’hérésiarque apparaissent plusieurs fois. S. Épiphane, Hær., lxviii, 6, P. G., t. xlii, col. 194 ; Faustin et Marcellin, Libellus precum, 3, P. L., t. xiii, col. 85 ; S. Ambroise, De flde, 1. 1, c. xix, P. L., t. xvi, col. 557 ; S. Grégoire de Nazianze, Orat., xxv, 8, P. G., t. xxxv, col. 1210. Pour les discussions ou travaux de détail auquel le récit de saint Athanase a donné lieu, voir Chr. W. F. Walch, Entwurf einer vollstàndigen Historié der Kctzereien…, IIe part., p. 500-510 ; U. Chevalier, Répertoire des sources historiques du moyen âge, Bio-bibliographie, an mot Arianisme. A remarquer, parmi les travaux que cite ce dernier auteur, la Dissertatio du bollandiste Janning De anno quo Arius hæresiarcha, quo S. Alexander, ep. Constant., S. Pauli decessor, obierint, § I— I il, Acta sanctorum, t. vi junii, Anvers, 1715, p. 71-75 ; on y verra que saint Alexandre vivait encore, comme Arius lui-même, en 336, contrairement à l’opinion soutenue par Henri Valois, dans ses notes sur Socrate, 1. II, c. I, ii, . P. G., t. lxviii, col. 1643 sq., et reprise dernièrement par Seeck, Unlersucliungen, p. 29-31.

La mort d’Arius ne passa pas inaperçue, mais on l’interpréta de diverses façons. Sozomène, ii, 29, P. G., t. lxvii, col. 1020. Saint Athanase nous apprend que beaucoup d’ariens ouvrirent les yeux, et que Constantin fut sérieusement impressionné. De morte Arii, 4 ; Hist. arian., 51, P. G., t. xxv, col. 690, 754. Néanmoins, l’empereur ne changea pas sa politique ecclésiastique. Les suppliques que lui adressèrent les alexandrins, et même saint Antoine, le célèbre patriarche de la vie monastique, n’obtinrent pas le retour d’Athanase ; seulement l'évêque mélétien Jean Arcaph, qui par ses vues ambitieuses demeurait un brandon de discorde, fut banni à son tour. Sozomène, il, 31, P. G., t. lxvii, col. 1025. Le parti nicéen fit une nouvelle perte à la mort de saint Alexandre de Constantinople, survenue vers la fin d’août 336, en l’absence de l’empereur. Il y ead compétition entre les orthodoxes et les ariens ; ces derniers voulaient nommer le prêtre Macédonius, homme adroit et intrigant, qui bientôt se rendra tristement célèbre, mais les orthodoxes, encore en majorité, choisirent Paul, prêtre pieux et savant, qui fut sacré dans l'église d’Irène. Quand Constantin revint, ' Eusèbe de Nicomédie réussit à le prévenir contre le nouvel élu, qui fut exilé dans le l’ont vers la fin de l’année. S. Athanase, Hist. arian., 7, P. G., t. xxv, col. 701.

Ainsi la coalition euséhienne avait, dans cette première phase de la lutte, réalisé un double but ; elle avait réhabilité les ariens au concile de Tyr, et renversé successivement les principaux chefs du parti nicéen, saint Eustathe, saint Athanase, Marcel d’Ancyre et Paul de Constantinople.

ni. Mort de Constantin ; Constance protecteur des

    1. ANTI-NICÉENS##


ANTI-NICÉENS. — Le 22 mai 337, l’empereur Constantin mourut à Nicomédie, après avoir reçu le baptême des mains d’Eusèbe, évéque de cette ville. Ce fait et sa conduite pendant les huit dernières années de son i