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ARIANISME, RÉACTION ANTI-NICÉENNE


par Eusèbe surtout par amour de la paix, veut dire que le Fils est en tout semblable au Père seul qui l’a engendré. Si Eusèbe a souscrit à l’anathéme portant sur les propositions i oùx ov-rtov, etc., c’est qu’elles ne sont pas scripturaires ; en particulier, il lui a paru juste de réprouver l’expression rcpiv YevvïjO^vai o-jxr|V, parce que, de l’avis de tous, le Fils de Dieu a existé « avant son incarnation » . En un mot, Eusèbe n’avait adhéré au symbole de Nicée qu’après avoir reconnu en toute sincérité que le sens revenait à ce qu’il avait lui-même professé dans son exposition de la foi.

Saint Athanase remarque que, dans cette apologie, Eusèbe en prit à sa guise, <L ; rfiélrfutv àusXoi’r’aaTO. De synodis, 13, P. G., t. xxvi, col. 704. Le terme est modéré ; car, ramener le symbole de Nicée à celui de Césarée, n'était-ce pas détruire l'œuvre de précision et de détermination voulue par les Pères du premier concile œcuménique ; et n'était-ce pas aussi se réserver le droit d'écarter le mot ôpioo-jo-to ; qu’on ne trouve pas dans la sainte Écriture ? Il n’est donc pas étonnant qu’Eustathe d’Antioche ait accusé l'évêque de Césarée d’altérer la foi de Nicée ; Eusèbe riposta par une contre-attaque de sabellianisme. Socrate, i, 23 ; Sozomène, ii, 18, P. G, , t. lxxvii, col. 144, 982. La querelle s'étendit, et les accusations continuèrent à se croiser sur le point précis de l'ôfvooûdio ;  : « Ceux qui rejetaient ce mot croyaient que les autres introduisaient par là le sentiment de Sabellius et de Montan, et les traitaient d’impies, comme niant l’existence du Fils de Dieu ; au contraire, ceux qui s’attachaient à rôfj.oo-J<rco ;, croyant que les autres voulaient introduire la pluralité des dieux, en avaient autant d’aversion que si l’on avait voulu rétablir le paganisme. » Ainsi parle Socrate, qui appelle cette première lutte un combat dans la nuit, vux-ro^cr/ia.

Il y avait pourtant là tout autre chose qu’un simple malentendu. Au fond, c'était la grave question de l’unité numérique de la substance divine qui était en jeu. L'ôuoo-Jtrioç nicéen entraînait directement la consubstantialité du Père et du Fils, mais cette consubstantialité devait en même temps s’allier à l’unité de Dieu proclamée par les Pères du concile en tête de leur symbole. Dans les réponses faites aux scrupules d’Eusèbe de Césarée, ils avaient écarté de la génération comme de la substance divine toute idée de division, de séparation, de composition ; c'était dire équivalemment que la génération du Fils ne se fait ni par une production ni par une multiplication de substance, mais par la simple communication ou co-possession d’une seule et même substance. Il fallait donc passer à l’unité numérique, incompatible avec les idées eusébiennes. Mais on doit

i reconnaître qu'à côté de la question de fond il v en avait une autre, moins importante, la question de terminologie. Dans l’anathéme nicéen, les termes ovaia et in6<nuan sont pris comme synonymes ; la chose se Comprend aisément si, avec les latins, on traduit ces termes par ceux d’essence et de substance, en 1rs oppo i la notion de personne. Mais il n’en ('lait pas de rnéme pour tous les Orientaux ; du moins, beaucoup d’entre eus ne paraissaient pas distinguer suffisamment <lr la personne l’ouata et Viitôtxamt entendues de l’este la substance. Voir Th. de Régnon, <)/' cit., I II, c. in ; Newman, The Arums, àppen dix, oote l. Pour ceux-là, L’ou.ooûffto( nicéen, énonçant I unité ou la communauté d’oûafo ou bmfaxaaiç, parais par le rail même porter atteinte à la trinité des pei onnes divines, c’est-à-dire à leur existence et è leur distinction réelle, hou, contre les nicéens, l’accusation

ibelliai. accentuie plus fortement encore après

Marcel d ^ncyre aura i mé la Trinité u.(av ! jk6 -tït. / rpiitpoecoitov. Eusi be, De eccles. theol., iii, 6, P. G., t. xxiv, col. 1016. lie longues années de discussion ni que la U i minologie s'étanl enfin Oxée ôtés, I équivoque disparai

Ainsi se forma le parti eusébien, al jist' EJtIocov, parti d’opposition au symbole de Nicée. Sans formule précise au début, il réunit divers groupes de mécontents qui, pendant toute une phase de la controverse, n’auront guère de commun que leur hostilité à l'égard de l'âjioo-juio ;  : lucianistes ayant à leur (été Eusèbe de Nicoinédie ; origénistes subordinations avec Eusèbe de Césarée pour représentant ; d’autres encore qui paraissent réellement n’avoir vu dans le terme discuté qu’une expression équivoque, et par là même dangereuse ou inopportune.

II. Coalition eusébienne contre les chefs nicéens et pour la réhabilitation des ariens. — L’attaque contre la foi de Nicée ne fut ni directe, ni franche ; Eusèbe de Nicomédie commença par un mouvement tournant, où il poursuivit parallèlement deux buts : renverser les chefs du parti nicéen, et réhabiliter pleinement Arius avec ses partisans. Saint Alexandre était mort le 18 avril 326 ou, plus probablement, le 17 avril 328 ; le 7 juin suivant, Athanase montait sur le siège patriarcal d’Alexandrie. Cette élection d’un redoutable adversaire ne pouvait que déplaire extrêmement aux eusébiens ; ils essayèrent de l’incriminer, en prétextant la jeunesse de l'élu et la pression exercée par le peuple sur les électeurs, mais la tentative fut infructueuse. Epist. heort., Chronicon, P. G., t. xxvi, col. 1352 ; Socrate, i, 23, P. G., t. lxvii, col. lil.

Les eusébiens furent plus heureux dans une campagne entreprise contre l'évêque d’Antioche, celui que sa piété et son éloquence avaient fait appeler le grand Eustathe. Un synode, réuni par eux dans cette ville vers la tin de 330, dans des circonstances qui ne font pas honneur à Eusèbe de Nicomédie, prononça la déposition du saint sur des raisons imparfaitement connues : prétendu sabellianisme, d’après les uns ; d’après les autres, imputation calomnieuse d’immoralité, ou d’irrévérence envers l’impératrice Hélène, mère de Constantin. Cette déposition occasionna un soulèvement du peuple qui aimait Eustathe ; l’empereur irrité bannit celui-ci en Thrace, où il mourut, vraisemblablement vers l’an 337, d’autres le faisant vivre jusque vers 300. Antioche resta désormais en proie aux divisions religieuses ; les eustathiens, représentant le parti de Nicée, ne reconnurent aucun des évêques, eusébiens ou ariens, qui se succédèrent sur le siège patriarcal, et tinrent des assemblées particulières. Théodorel, i, 20, 21, P. G., t. lxxxii, col. 966970.

D’autres évoques furent déposés, soit dans des conciles, soit sur un simple' ordre de l’empereur, et sous dos prétextes divers. Tels, Eutrope d’Andrinople, Euphration de lialanée, Kymace de Paltus et son homonyme de Taradus, Asclépas de Gaza, Cyrus de Béroé en Syrie, Diodore, évéque en Asie Mineure, Domnionde Sirmium et Kellanique de Tripolis. On remplaça ces évéques par des ariens, ou du moins par des personnages qui ne leur étaient pas contraires. S. Athanase, Hist.arian., 5, /'. G., i. xxv, col. 700. Fait « 'gaiement significatif, dans un long ('dit rédigé vers l’an 331 contre divers hérétiques, pour interdire leurs assemblées, le nom d’Arius et des ariens n’est plus prononcé. Eusèbe, Vila Constantini, m, 64, 65, /'. G., t. xx, col. IliO, Il il.

Une lutte autrement importante s’engageait à la même époque. Forl du sucées obtenu auprès de l’empereur par Arius et Euzoius, Eusèbe de Nicomédie écrivit a saint Athanase pour lui demander de rendre aux ariens sa communion ; les messagers devaient, en cas de refus, faire entendre des menaces. L'évêque d’Alexandrie ayanl répondu qu’il ne pouvait accueillir des hérésiarques, excommuniés par un concile oecuménique, Eusèbe obtint de i empereur qu’il lui enjoignit, sous peine de déposition ei d’exil, d’accorder sa communion a quiconque la demanderait ; mais athanase écrivit à l’empereur cl it à lui faire aci ns. Apologia contra