Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 1.2.djvu/145

Cette page n’a pas encore été corrigée
1785
1786
ARIANISME (PÉRIODE ORIGINAIRE DE L')
« sans principe » , par opposition à quelqu’un qui

procède d’un autre. Th. de Rognon, Études de théologie positive sur la sainte Trinité, IIIe série, Paris, 1898, étude XVI. Dans la pensée d’Arius, à^éwriToç et yevvrjTo ; s’opposaient nécessairement sous le rapport d’incréé et de créé, parce qu’il tenait pour synonymes les termes d’engendré et de créé. De là cette idée familière aux ariens : il n’y a pas deux àYÉvvïjTot, c’est-àdire deux incréés ou deux principes, pas plus qu’il n’y a deux infinis ou deux dieux.

2. Notion arienne de la génération.

Si Arius identifiait les termes engendré et créé, c’est que, pour lui, toute génération, et non pas seulement la génération humaine, emportait essentiellement l’idée de commencement ou de production contingente. Aussi, dans sa lettre à saint Alexandre, rejette-t-il expressément toute conception de la génération du Fils qui ne serait pas celle d’une simple production, se séparant en cela non seulement des émanatistes gnostiques, mais même de ceux qui, voyant dans le Père et le Fils des termes corrélatifs, maintenaient leur co-éternité et leur unité substantielle : « Le Fils n’est point une émission, comme l’enseignait Valentin ; ni, comme le voulait Manès, une partie consubstantielle ; ni Fils et Père tout ensemble, comme l’a dit Sabellius, divisant la monade ; ni, selon Hiéracas, une lampe allumée à une lampe, ou un flambeau partagé en deux. Il n’est pas vrai non plus qu’après avoir été d’abord, il ait été ensuite engendré ou créé Fils… Engendré hors du temps par son Père, créé et fondé avant tous les siècles, le Fils n'était pas avant d'être engendré ; mais il a été engendré hors du temps et avant toutes choses, seul par le Père seul. Il n’a pas l'être en même temps que le Père, comme le prétendent ceux qui s’en tiennent à l’idée de relation, introduisant ainsi deux principes incréés… Prendre ces expressions : Je vous ai engendré de mon sein, Je suis sorti de mon Père, dans le sens que certains leur donnent, comme si elles marquaient une partie consubstantielle du Père ou une sorte d'émission, ce serait faire du Père un être composé, divisible et muable, en d’autres termes, un corps ; ce serait assujettir le Dieu incorporel à toutes les conséquences de la nature corporelle. » Pourquoi Arius, énonçant ici tant de conceptions diverses, ne parle-t-il pas de celle-ci : génération du Fils par communication que lui fait le Père de sa propre nature, possédée en quelque sorte par indivis ? Alors, les propriétés d’ordre personnel ou hypostatique, oy£vvy)to ; et y&vvy)t<5< ; dans le sens d’inengendré et d’ercgendré, sont en dehors des propriétés d’ordre absolu ou essentiel, àYÉvvYfto ; et yewt)t6< ; dans le sens d’mcre’e et de créé. La réponse suit de ce qui précède ; c’est cette conception même qu’Arius et ses partisans n’ont pas su comprendre ou n’ont pas voulu admettre, en partie par réaction contre le sabellianisme qui aboutissait à la fusion des personnes, en partie par suite de leur théorie philosophique sur l’origine et la raison d'être du Fils.

3. Le Logos-démiurge.

On trouve dans le philosophe juif alexandrin Philon une conception du Logos ou Verbe divin dont l’inlluence fut prépondérante dans

le l’hérésie arienne. C’est la conception du Logos-démiurge, rattachée au livre des Proverbes, viii, 22. où la Sagesse dit d’elle-même, suivant la version des Septante : KJpio ; èV.TtTÉ >.t àpy.v 68fiiv « ÙToO, « Le Seigneiirm’acre’eecomme le commencement de ses œuvres. «  Plutôt supposée qu’exprimée dans la profession de foi d’Arius, cette théorie est, au contraire, très nettement formulée dans la Thalie, Oral, i contr. arian., ii, P. G., t. xxvi, col. '21 : « Dieu n’a pas toujours été l'ère… Il était d’abord seul, le Logos et la Sagesse n'étaient pas encore. Ensuite, Dieu voulant nous créer fit d’abord un certain être qu’il nomma Logos, Sagesse et Fils, afin de nous cner par lui. Il y a donc deux sagesses : l’une est la propre sagesse de Dieu et lui est co-existante ;

quant au Fils, il a été fait dans cette sagesse et, parce qu’il en participe, il est appelé, mais de nom seulement, Sagesse et Logos. La Sagesse a existé par la sagesse, en vertu de la volonté libre du Dieu sage. De même, il y a en Dieu un autre Logos que le Fils, m ;.is comme le Fils participe à ce Logos, il est appelé à son tour, par faveur, Logos et Fils. » Saint Athanase ajoute qu’on trouve dans les autres écrits des ariens la vraie conception de leur hérésie, lorsqu’on y lit « qu’il y a diverses sortes de puissances. Il y a l’unique et naturelle puissance de Dieu, qui lui est propre et qui est éternelle ; quant au Christ, il n’est pas la véritable puissance de Dieu, mais une des autres puissances parmi lesquelles l'Écriture nomme la sauterelle et la chenille » . Toutefois, comme puissance de Dieu, le Logos précède et dépasse incomparablement toutes les autres : seul il a été créé immédiatement par le Dieu suprême, avant tous les temps et les siècles ; sa relation aux autres créatures est celle de créateur, tandis que, par rapport au Père, il est lui-même créature, mais aussi instrument de création et de gouvernement. Pourquoi ce Logos-démiurge mis ainsi entre Dieu et le monde ? Comme les gnostiques, comme Philon, les ariens invoquaient la trop grande distance, la trop grande disproportion qu’il y a entre le Dieu suprême et les simples créatures ; une action immédiate est impossible. Orat. u contr. arian., 24, P. G., t. xxvi, col. 200 ; De décret. Nicœni synodi, 8, P. G., t. xxv, col. 438.

4. Nature du Fils.

La conséquence de toute cette doctrine, d’après Arius lui-même, c’est que le Fils n’est nullement égal ni consubstanliel au Père, oùSè yâp âuTiv i'<roç, à)X où8s ôjj.oo-jaio ; oeù-rôi, De synodis, , P. G., t. xxvi, col. 708 ; considéré dans sa nature et dans ses propriétés, il est entièrement dissemblable d’avec le Père, àvduoioç xatà nâvia xrjç toû 7tatpb ; o’Jtfia ; xoù (StdT-rçToç. Orat. i contr. arian., 6, P. G., t. xxvi, col. 24. Aussi n’est-il appelé Dieu, dans ces mêmes passages, que par dénomination, par adoption ou dans un sens relatif ; pareillement, « il n’est pas Fils de Dieu par nature et dans la propriété du terme, mais seulement par dénomination et par adoption, comme la créature. » De sententia Dionysii, 23, P. G., t. xxv, col. 513. Par son office, toutefois, et par son exaltation, le Fils constitue en quelque sorte une catégorie à part au sommet de l'échelle des créatures, comme Arius l’explique dans sa lettre à saint Alexandre : « Dieu l’a fait immuable et inaltérable ; sa créature parfaite, mais non comme toute autre créature ; sa progéniture, mais non comme toute autre progéniture… Le Père, en le créant, l’a associé à sa gloire. » Mais il faut rapprocher de ces paroles un passage de la Thalie, où l’hérésiarque dit du Verbe : « Il est de nature changeante et muable ; il use de son libre arbitre comme il veut, et, s’il reste bon, c’est parce qu’il le veut. Seulement Dieu, ayant prévu qu’il serait bon, lui a donné d’avance la gloire qu’il a méritée plus tard par sa vertu ; c’est à ces œuvres, connues d’avance par son Père, qu’il doit d'être ce qu’il est en naissant. » Orat. 1 contr. arian., 5, P. G., t. xxvi, col. 21. Quand Arius appelle le Fils immuable et inaltérable, arpe^Tov y.al àva), ), oid)Tov, on peut donc soupçonner qu’il a en vue une immutabilité, non pas essentielle, mais de fait. La connaissance imparfaite du l'ère par le Fils était une dei nié re conséquence de la doctrine arienne : « Le Père est invisible pour le Fils ; il ne contemple ni ne connaît complètement et exactement le Père. Ce qu’il voit et ce qu’il connaît, il le connaît dans la proportion de ses forces, comme nous aussi pouvons le connaître dans la proportion de nos forces. Le I ils ne connaît même pas pleinement sa propre nature. » Oral. I contr. arian., ti, /', C. t. xxvi, col. 24.

5. Trinité arienne.

« Il y a donc trois hypostases, » "Qo-re Tptîc e’itiv 0noTTcÎ7Eic, disait Arius dans sa lettre à saint Alexandre. Mais, qu’entendait-il par ce terme