Page:Alfieri - De la Tyrannie.djvu/83

Cette page a été validée par deux contributeurs.

ces propositions, de démontrer qu’elle n’appelle, n’exhorte, ni ne conduit les hommes à la liberté ; et cependant les hommes devraient recevoir la première impulsion vers un objet si important de la religion elle-même, puisqu’il n’y a rien qui ait tant de pouvoir sur leur âme, qui grave plus fortement dans leur cœur telle ou telle opinion, et qui les excite si puissamment à exécuter de grands desseins. En effet, dans l’antiquité payenne, Jupiter, Apollon, les Sybilles, les Oracles, commandaient à l’envi aux divers peuples qui les adoraient, l’amour de la patrie et de la liberté. Née chez un peuple esclave, ignorant et déjà entièrement subjugué par des prêtres, la religion chrétienne ne sait qu’ordonner la plus aveugle obéissance, et elle ignore jusqu’au nom de la liberté ; et le tyran prêtre ou laïc est par elle assimilé à un Dieu.

Si on examine de quelle manière elle se propagea, on verra qu’elle pénétrait et se fixait plus facilement sous les tyrannies que dans les républiques. Elle ne put s’établir dans l’empire romain que lorsque la tyrannie militaire eut entièrement détruit la liberté : et à la chûte de cet empire, ces nations barbares qui d’abord occupèrent,