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tendent des pièges, qui le craignent et l’abhorrent, parce qu’ils sont vivement offensés de son audacieuse vertu. C’est pour cela que dans un gouvernement où un seul est maître de tout et de tous, il ne peut y avoir d’autre liaison que celle du crime et de la scélératesse. Tous les siècles, toutes les tyrannies, attestent et attesteront toujours cette triste vérité ; et cependant, malgré cela, dans tous les siècles, sous toutes les tyrannies, parmi tous les peuples esclaves, c’est la vérité la moins reçue et la moins sentie. Le tyran même, celui d’une nature douce, rend immédiatement méchans tous ceux qui l’approchent, parce que sa puissance trop étendue, et de laquelle il ne veut pas se dépouiller, quoiqu’il n’en abuse pas, remplit de crainte ceux qui l’observent de près. Cette grande crainte enfante la dissimulation ; et de la dissimulation et du silence, naissent la lâcheté et la méchanceté.

Mais l’ambition, sous la tyrannie, offre souvent à l’ambitieux un pouvoir illimité, très-peu inférieur à celui du tyran, et tel qu’aucune république jamais n’aurait pu ni voulu en accorder un semblable à aucun de ses citoyens.

Plusieurs ont voulu excuser celui qui, né