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de profit par la consommation qu’ils en font. C’est ainsi, et par une raison différente, que le peuple romain, qui avait coutume de tirer son existence des terres conquises par ses armes, et distribuées ensuite par le sénat, estimait davantage le consul ou le tribun dont les victoires lui donnaient une plus grande part dans la répartition générale.

Le luxe privé renversant ainsi toutes les opinions justes et vraies, il arrive que le peuple honore et estime plus ceux qui insultent à sa misère par l’ostentation d’un luxe démesuré, et qui, dans la vérité, le dépouillent, en ayant l’air de le nourrir. Est-il possible qu’un tel peuple puisse avoir l’idée, le désir et les moyens de reprendre sa liberté ?

Et ces grands, c’est-à-dire, ceux à qui l’on donne ce titre, qui dissipent leurs fortunes et souvent celles des autres, pour briller d’une vaine pompe, beaucoup plus que pour jouir véritablement ; ces grands, ou ces riches à qui tant de superfluités sont devenues insipides, mais nécessaires ; ces grands enfin, qui dans leurs repas, dans leurs assemblées nocturnes, dans leurs bals, dans leurs lits, traînent une vie efféminée, ennuyeuse et inutile, au milieu des horreurs de la satiété ; de