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sont un obstacle invincible à l’égalité des fortunes ?

Je réponds qu’une véritable liberté politique peut difficilement exister ou durer au milieu de l’excessive disparité des fortunes ; mais que cependant, dans le cas où elle aurait déjà poussé quelques racines, il y a deux moyens de la faire croître et prospérer au milieu d’une telle disparité, et malgré le luxe corrupteur qui ne cesse de la combattre. Le premier de ces moyens exige qu’il soit pourvu par de bonnes lois à ce que l’excessive inégalité des richesses procède plutôt de l’industrie, du commerce et des arts, que de l’accumulation morte d’une grande quantité de biens fonds dans les mains d’un petit nombre de propriétaires, parce qu’une telle réunion de biens ne peut avoir lieu sans qu’une infinité d’autres citoyens ne soient dépouillés de la part qui leur appartient. Par une telle compensation, les richesses du petit nombre ne causant pas alors la pauvreté totale de la majorité, il y aura alors un certain état moyen, qui divisera le peuple en trois classes, celle du petit nombre des millionnaires, celle des gens aisés, qui sera très-nombreuse, et celle des pauvres, qui se trouvera presque réduite à rien.