Page:Alfieri - De la Tyrannie.djvu/120

Cette page a été validée par deux contributeurs.

devinrent si puissans, que, levant l’étendard de la rebellion contre leurs souverains, ils se formèrent des états séparés et distincts ; c’est de la race de ces petits seigneurs que descend la majeure partie des tyrans actuels de l’Europe ; et par un mouvement contraire, plusieurs des tyrans souverains, devinrent assez puissans, avec le temps, pour détruire ou chasser tout-à-fait ces tyrans secondaires, et rester eux-mêmes les seuls souverains. Quoi qu’il en soit, le passage de l’autorité des petits tyrans à celle du grand ne diminua pas le poids des chaînes du peuple. Il est vraisemblable, au contraire, qu’après avoir aggrandi et assuré leurs états, les grands tyrans ayant moins de mesures à garder pour conserver une puissance plus illimitée, et moins d’ennemis à craindre, ils devinrent avec plus d’assurance et d’impunité les oppresseurs de leur misérable troupeau d’esclaves.

Autant ces nobles fondataires avaient été à craindre pour le tyran, tant qu’ils avaient conservé de la force et de l’autorité, autant ils avaient été un obstacle et un frein à la tyrannie complette d’un seul ; autant ensuite ils en devinrent la base et le soutien lorsqu’ils furent dépouillés de la force et de