milieu des nuages de son esprit, a toujours aperçu assez clairement la nécessité des libertés locales, soutint vivement Lamennais ; je fis de même. Ce furent Marrast et Vivien qui nous combattirent. Vivien était dans son rôle en défendant la centralisation ; car le mouvement des affaires administratives était sa profession ; son naturel, d’ailleurs, l’y portait. Il avait tout ce qui fait le légiste habile et l’excellent commentateur, rien de ce qui est nécessaire au législateur et à l’homme d’État. Cette fois, le danger qu’il voyait courir aux institutions qui lui étaient si chères l’enflammait ; il s’emporta jusqu’à prétendre que la république, loin de restreindre la centralisation, devait encore l’accroître. On eût dit que c’était le côté par lequel la révolution de Février lui agréait.
Quant à Marrast, il appartenait à la race ordinaire des révolutionnaires français qui, par liberté du peuple, ont toujours entendu le despotisme exercé au nom du peuple. Cet accord soudain de Vivien et de Marrast ne me surprit donc point. J’étais habitué à ce spectacle et j’avais remarqué depuis longtemps que le seul moyen de mettre à l’unisson un conservateur et un radical, c’était d’attaquer non dans l’application, mais dans le principe, le pouvoir du gouvernement central. On était sûr de se les attirer aussitôt sur les bras l’un et l’autre.