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à voir à leur capitation ; elle continuait à être réglée par l’intendant, d’après des formes particulières.

De peur que ce président, ainsi isolé du corps qu’il était censé diriger, n’y exerçât encore indirectement une influence contraire à l’intérêt de l’ordre dont il ne faisait pas partie, on demanda que les voix de ses fermiers n’y comptassent pas ; et les assemblées provinciales, consultées sur ce point, trouvèrent cette réclamation fort juste et tout à fait conforme aux principes. Les autres gentilshommes qui habitaient la paroisse ne pouvaient entrer dans ce même corps municipal roturier, à moins qu’ils ne fussent élus par les paysans, et alors, comme le règlement a soin de le faire remarquer, ils n’avaient plus le droit d’y représenter que le tiers-état.

Le seigneur ne paraissait donc là que pour y être entièrement soumis à ses anciens sujets, devenus tout à coup ses maîtres ; il y était leur prisonnier plutôt que leur chef. En rassemblant ces hommes de cette manière, il semblait qu’on eût eu pour but moins de les rapprocher que de leur faire voir plus distinctement en quoi ils différaient et combien leurs intérêts étaient contraires.

Le syndic était-il encore ce fonctionnaire discrédité dont on n’exerçait les fonctions que par contrainte, ou bien sa condition s’était-elle relevée avec la communauté dont il restait le principal agent ? Nul ne le savait précisément. Je trouve, en 1788, la lettre d’un certain huissier de village qui s’indigne qu’on l’ait élu pour