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terre que l’abolition, dès le dix-septième siècle, de tous les signes qui y distinguaient le fief de la terre tenue en roture.

Au quatorzième siècle, le droit féodal de franc fief est léger et ne se prélève que de loin en loin  ; mais au dix-huitième, lorsque la féodalité est presque détruite, on l’exige à la rigueur tous les vingt ans, et il représente une année entière du revenu. Le fils le paye en succédant au père. « Ce droit, dit la Société d’Agriculture de Tours en 1761, nuit infiniment au progrès de l’art agricole. De toutes les impositions des sujets du roi, il n’en est point, sans contredit, dont la vexation soit aussi onéreuse dans les campagnes. » — « Cette finance, dit un autre contemporain, qu’on n’imposait d’abord qu’une fois dans la vie, est devenue successivement depuis un impôt très-cruel. » La noblesse elle-même aurait voulu qu’on l’abolît, car il empêchait les roturiers d’acheter ses terres ; mais les besoins du fisc demandaient qu’on le maintînt et qu’on l’accrût.

On charge à tort le moyen-âge de tous les maux qu’ont pu produire les corporations industrielles. Tout annonce qu’à l’origine les maîtrises et les jurandes ne furent que des moyens de lier entre eux les membres d’une même profession, et d’établir au sein de chaque industrie un petit gouvernement libre, dont la mission était tout à la fois d’assister les ouvriers et de les contenir. Il ne paraît pas que saint Louis ait voulu davantage.

Ce ne fut qu’au commencement du seizième siècle,