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INFLUENCE DE LA DÉMOCRATIE

plus difficiles problèmes que l’humanité présente.

Je ne vois point que cette doctrine matérialiste soit établie par les faits.

Les mêmes nations se sont montrées, à différentes époques de leur histoire, chastes ou dissolues. La régularité ou le désordre de leurs mœurs tenait donc à quelques causes changeantes, et non pas seulement à la nature du pays, qui ne changeait point.

Je ne nierai pas que, dans certains climats, les passions qui naissent de l’attrait réciproque des sexes ne soient particulièrement ardentes ; mais je pense que cette ardeur naturelle peut toujours être excitée ou contenue par l’état social et les institutions politiques.

Quoique les voyageurs qui ont visité l’Amérique du Nord diffèrent entre eux sur plusieurs points, ils s’accordent tous à remarquer que les mœurs y sont infiniment plus sévères que partout ailleurs.

Il est évident que, sur ce point, les Américains sont très supérieurs à leurs pères les Anglais. Une vue superficielle des deux nations suffit pour le montrer.

En Angleterre, comme dans toutes les autres contrées de l’Europe, la malignité publique s’exerce sans cesse sur les faiblesses des femmes. On entend souvent les philosophes et les hommes d’État s’y plaindre de ce que les mœurs ne sont pas assez