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DE LA DÉMOCRATIE EN AMÉRIQUE.

me paraissent irrémédiables. Je crois que la race indienne de l’Amérique du Nord est condamnée à périr, et je ne puis m’empêcher de penser que le jour où les Européens se seront établis sur les bords de l’océan Pacifique, elle aura cessé d’exister[1].

    représentants que les Américains avaient déjà acquis par traité, à l’est et à l’ouest du Mississipi, 230,000,000 d’acres.

    En 1808, les Osages cédèrent 48,000,000 d’acres pour une rente de 1,000 dollars.

    En 1818, les Quapaws cédèrent 20,000,000 d’acres pour 4,000 dollars ; ils s’étaient réservé un territoire de 1,000,000 d’acres, afin d’y chasser. Il avait été solennellement juré qu’on le respecterait ; mais il n’a pas tardé à être envahi comme le reste.

    « Afin de nous approprier les terres désertes dont les Indiens réclament la propriété, disait M. Bell, rapporteur du comité des affaires indiennes au congrès, le 24 février 1830, nous avons adopté l’usage de payer aux tribus indiennes ce que vaut leur pays de chasse (hunting-ground) après que le gibier a fui ou a été détruit. Il est plus avantageux et certainement plus conforme aux règles de la justice et plus humain d’en agir ainsi, que de s’emparer à main armée du territoire des sauvages.

    « L’usage d’acheter aux Indiens leur titre de propriété n’est donc autre chose qu’un nouveau mode d’acquisition que l’humanité et l’intérêt (humanity and expediency) ont substitué à la violence, et qui doit également nous rendre maîtres des terres que nous réclamons en vertu de la découverte, et que nous assure d’ailleurs le droit qu’ont les nations civilisées de s’établir sur le territoire occupé par les tribus sauvages.

    « Jusqu’à ce jour, plusieurs causes n’ont cessé de diminuer aux yeux des Indiens le prix du sol qu’ils occupent, et ensuite les mêmes causes les ont portés à nous le vendre sans peine. L’usage d’acheter aux sauvages leur droit d’occupant (right of occupancy) n’a donc jamais pu retarder, dans un degré perceptible, la prospérité des États-Unis. » (Documents législatifs, 21e congrès, no 227, p. 6.)

  1. Cette opinion nous a, du reste, paru celle de presque tous les hommes d’État américains.

    « Si l’on juge de l’avenir par le passé, disait M. Cass au congrès, on doit prévoir une diminution progressive dans le nombre des Indiens, et s’attendre à l’extinction finale de leur race. Pour que cet événement