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CAUSES QUI MAINTIENNENT LA DÉMOCRATIE.

de l’Église et de l’État l’empire paisible que la religion exerce en leur pays. Je ne crains pas d’affirmer que, pendant mon séjour en Amérique, je n’ai pas rencontré un seul homme, prêtre ou laïque, qui ne soit tombé d’accord sur ce point.

Ceci me conduisit à examiner plus attentivement que je ne l’avais fait jusqu’alors la position que les prêtres américains occupent dans la société politique. Je reconnus avec surprise qu’ils ne remplissent aucun emploi public[1]. Je n’en vis pas un seul dans l’administration, et je découvris qu’ils n’étaient pas même représentés au sein des assemblées.

La loi, dans plusieurs États, leur avait fermé la carrière politique[2] ; l’opinion dans tous les autres.

Lorsque enfin je vins à rechercher quel était l’esprit du clergé lui-même, j’aperçus que la plupart de ses membres semblaient s’éloigner volontairement du

  1. À moins que l’on donne ce nom aux fonctions que beaucoup d’entre eux occupent dans les écoles. La plus grande partie de l’éducation est confiée au clergé.
  2. Voyez la Constitution de New-York, art. 7, § 4.

    Idem de la Caroline du Nord, art. 31.

    Idem de la Virginie.

    Idem de la Caroline du Sud, art. 1, § 23.

    Idem du Kentucky, art. 2, § 26.

    Idem du Tennessee, art. 1, § 28.

    Idem de la Louisiane, art. 2, § 22.

    L’article de la Constitution de New-York est ainsi conçu :

    « Les ministres de l’Évangile étant par leur profession consacrés au service de Dieu, et livrés au soin de diriger les âmes, ne doivent point être troublés dans l’exercice de ces importants devoirs ; en conséquence, aucun ministre de l’Évangile ou prêtre, à quelque secte qu’il appartienne, ne pourra être revêtu d’aucunes fonctions publiques, civiles ou militaires. »