Page:Alexis de Tocqueville - De la démocratie en Amérique, Pagnerre, 1848, tome 2.djvu/204

Cette page a été validée par deux contributeurs.
201
CAUSES QUI MAINTIENNENT LA DÉMOCRATIE.

hommes bien moins vers l’égalité que vers l’indépendance.

Le catholicisme est comme une monarchie absolue. Ôtez le prince, et les conditions y sont plus égales que dans les républiques.

Souvent il est arrivé que le prêtre catholique est sorti du sanctuaire pour pénétrer comme une puissance dans la société, et qu’il est venu s’y asseoir au milieu de la hiérarchie sociale ; quelquefois alors il a usé de son influence religieuse pour assurer la durée d’un ordre politique dont il faisait partie : alors aussi on a pu voir des catholiques partisans de l’aristocratie par esprit de religion.

Mais une fois que les prêtres sont écartés ou s’écartent du gouvernement, comme ils le font aux États-Unis, il n’y a pas d’hommes qui par leurs croyances soient plus disposés que les catholiques à transporter dans le monde politique l’idée de l’égalité des conditions.

Si donc les catholiques des États-Unis ne sont pas entraînés violemment par la nature de leurs croyances vers les opinions démocratiques et républicaines, du moins n’y sont-ils pas naturellement contraires, et leur position sociale, ainsi que leur petit nombre, leur fait une loi de les embrasser.

La plupart des catholiques sont pauvres, et ils ont besoin que tous les citoyens gouvernent pour arriver eux-mêmes au gouvernement. Les catholiques sont en minorité, et ils ont besoin qu’on respecte tous les droits pour être assurés du libre exercice des leurs. Ces deux causes les poussent, à leur insu même, vers des doctrines politiques qu’ils adopteraient peut-être