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INTRODUCTION.

chacun pourra les vérifier. Quand il s’est agi d’opinions, d’usages politiques, d’observations de mœurs, j’ai cherché à consulter les hommes les plus éclairés. S’il arrivait que la chose fût importante ou douteuse, je ne me contentais pas d’un témoin, mais je ne me déterminais que sur l’ensemble des témoignages.

Ici il faut nécessairement que le lecteur me croie sur parole. J’aurais souvent pu citer à l’appui de ce que j’avance l’autorité de noms qui lui sont connus, ou qui du moins sont dignes de l’être ; mais je me suis gardé de le faire. L’étranger apprend souvent auprès du foyer de son hôte d’importantes vérités, que celui-ci déroberait peut-être à l’amitié ; on se soulage avec lui d’un silence obligé ; on ne craint pas son indiscrétion, parce qu’il passe. Chacune de ces confidences était enregistrée par moi aussitôt que reçue, mais elles ne sortiront jamais de mon portefeuille ; j’aime mieux nuire au succès de mes récits que d’ajouter mon nom à la liste de ces voyageurs qui renvoient des chagrins et des embarras en retour de la généreuse hospitalité qu’ils ont reçue.

Je sais que, malgré mes soins, rien ne sera plus facile

    ministre plénipotentiaire à Paris). Durant mon séjour au sein du congrès, M. Livingston voulut bien me faire remettre la plupart des documents que je possède, relativement au gouvernement fédéral. M. Livingston est un de ces hommes rares qu’on aime en lisant leurs écrits, qu’on admire et qu’on honore avant même de les connaître, et auxquels on est heureux de devoir de la reconnaissance.