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LE COLLAGE

suis associé à leur bonheur, en reprenant parfois du kummel russe. Puis, je me suis trouvé dans la rue, seul. En remontant à petits pas l’avenue de Clichy, tout à coup, au milieu de mes réflexions, j’ai tressailli. Un contact désagréable ! Celui de la vieille femme, en bonnet noir, qui vous pose une main sur l’épaule ! Mais j’ai ressenti bien autre chose, en me revoyant ici, dans mon appartement de garçon, vide de Célina. Depuis deux semaines que c’est fini, chaque soir, à l’heure ou je rentre, j’éprouve le même serrement de cœur.

Moi qui avais la naïveté de calculer une rupture, de redouter ceci, de vouloir éviter cela ! comme si c’était quelque chose que nos prévisions ! comme si la réalité ne déjouait pas les calculs et les prudences ! Quand l’heure a sonné, notre liaison s’est dissoute d’elle-même, comme une pincée de gomme jetée dans l’eau froide. Même aucun des accidents contre lesquels je voulais me garer ne s’est produit. Comme nous nous étions mis ensemble, nous nous sommes trouvés un jour détachés l’un de l’autre : sans savoir.

Le concours préliminaire de certains menus faits avait sans doute préparé la catastrophe. Une absence de quelques jours, que je n’ai pu éviter de faire, aura habitué Célina à ne plus me voir sans cesse. Pendant ces jours-là, des parlottes le soir chez la concierge, une intimité subite avec