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LE COLLAGE

d’éducation, nous différons ; nous n’avons ni les mêmes idées, ni les mêmes habitudes, ni les mêmes goûts.

Nous ne nous entendons d’abord pas en cuisine. J’aime le rôti cuit à point, lorsqu’il commence à rendre le sang ; madame avale la viande crue. J’adore le laitage, les œufs, la volaille, la pâtisserie et les beaux fruits bien mûrs ; je me tiens autant que possible dans une gamme d’alimentation douce. Madame, elle, se ruine l’estomac avec de la moutarde, et du vinaigre, raffole de crudités, ne vivrait que de radis, de cornichons et de salades. Et il en est de tout comme de la cuisine.

Elle ne se coiffe ni ne s’habille comme je le voudrais. À tort ou à raison, je prétends avoir des goûts distingués ; elle, malgré le milieu où je l’ai ramassée, m’apparaît une bourgeoise, une atroce bourgeoise. Bouffie de vanité, féroce d’amour-propre, entêtée comme une mule, elle ne songe qu’à « paraître chic » ; mais, ce, qui lui semble « chic » me déconcerte et me révolte. Susceptible à l’excès avec cela, dénuée d’indulgence, tranchant sur tout, portée à supposer des absurdités chez autrui, me suspectant aussi bien moi que mes intimes, que le cercle entier de mes relations, jalousant les femmes. Enfin, elle manque de culture intellectuelle, sait à peine lire et écrire. Orthographe : pitoyable ! Histoire, géographie : néant ! En arithmétique, elle a entendu