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JOURNAL DE MONSIEUR MURE

blique et le sous-préfet, presque coup sur coup. Le premier président et sa femme, les derniers. — « Madame est servie », vint-on dire.

Maintenant, on dînait. Pas de conversation générale pendant le potage, ni pendant le premier service. À peine quelques mots à demi-voix, entre voisins, et sur des généralités… L’hiver s’annonçait très froid ; les hirondelles étaient parties de bonne heure et les personnes délicates devaient prendre beaucoup de précautions… Il y avait eu quelques fièvres typhoïdes à la fin de l’été… On parlait d’une troupe de passage qui viendrait dans huit jours nous jouer les Bourgeois de Pont-Arcy… Puis, ce n’était plus qu’un bruit imperceptible de fourchettes, de vaisselle plate, d’assiettes remuées, le heurt malencontreux d’un verre aux vibrations aussitôt étouffées avec le doigt ; et les offres à voix basse des domestiques : « Saumon… — Du pain… — Madère ? » Puis des bouts de conversations discrètes se croisaient de nouveau : M. de Lancy avait moins chassé que les années précédentes dans sa terre !… Ce Sardou, de l’Académie française, était un véritable homme de théâtre, qui connaissait à fond le cœur humain et ses moindres replis… Madame de Lancy parlait au général de son fils Henri, récemment nommé lieutenant de la réserve… Le nouveau procureur général gémissait sur l’état des belles-lettres françaises ; depuis l’apparition de Notre-Dame de Paris il n’avait pas lu de roman : chaque fois qu’il