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JOURNAL DE MONSIEUR MURE

faires des gens sont leurs affaires ! et il ne fallait pas mettre le nez dans celles des autres, surtout quand il s’agissait de gens honorables qui tenaient leurs engagements et qui ne faisaient pas remarquer une maison… au contraire ! Dès les commencements des dix-huit mois qu’ils avaient passés ici, cette jeune dame paraissait éprouver des chagrins. La santé de sa fillette était si délicate ! Elle était venue sans doute demeurer dans la maison pour que le bon air de la cité fît du bien à la petite, mais la petite ne s’en portait guère mieux. Et puis, pour tout dire, monsieur, lui, ne devait pas mener une conduite régulière. Comme les autres locataires, il avait son double passe-partout de la grille et de la porte d’entrée. Chaque nuit, malgré la précaution qu’il prenait de marcher à pas de loup comme un voleur, chacun l’entendait rentrer à des heures indues. À des trois heures, quatre heures, à des cinq heures du matin ! tellement que les pensionnaires le surnommaient « le boulanger », parce que, disaient-ils en riant, M. de Vandeuilles doit travailler la nuit, et, comme les garçons boulangers, il ne rentre qu’à l’aurore ! Mais, si les pensionnaires riaient, cette jeune dame, elle, avait souvent les yeux rouges.

— N’est-ce pas, il jouait ?

— Attendez, monsieur, vous allez comprendre…

Et je ne comprenais que trop ! À mesure que la maîtresse de la pension bourgeoise me dévi-